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Je suis surpris – et attristé – de constater que les chrétiens évangéliques entonnent facilement le « tous pourris ! »,  le  « aucune déontologie ! » à propos des journalistes. Dès qu’un reportage ou un article, ne remplit pas les cases qu’il devrait remplir selon eux. Parfois même, à l’exemple regrettable de certains leaders ! Certes, nous avons souvent de quoi être déçus. Essayons pourtant de tordre le cou à nos préjugés, de comprendre certains des impératifs de cette profession. Pour respecter les hommes et les femmes qui la composent. Et respecter notre propre intégrité !

L’Inculture religieuse

Elle est avérée en France. Des ministres à votre voisin de palier, en passant par les journalistes, l’immense majorité des français ne sait même pas faire la différence entre « évangélistes » et « évangéliques », pour ne prendre que cet exemple. Ce n’est pas faute d’avoir essayé ! Déjà, dans les années 80, j’avais rédigé plusieurs documents comme le « Petit lexique à usage des journalistes et autres décideurs » édité par la Fédération évangélique de France – devenue plus tard le Réseau FEF . Des arguments repris et reformulés aujourd’hui par le CNEF. De nombreuses incompréhensions naissent de cette lacune. Nous pensons avoir expliqué les choses correctement à un journaliste, pourtant sa compréhension a été effectivement biaisée par son manque d’éléments de références culturelles.

Aucune déontologie !

J’ai lu récemment ce genre de remarque définitive, comme une injure suprême ! Parce qu’une interview télé avait déplu – alors que je la trouvais plutôt favorable aux évangéliques ! Soyons francs, il est injuste et inacceptable de généraliser et de formuler un avis aussi définitif sur toute une profession. Sommes-nous contaminés par la « cancel culture ? »

« Tous les chasseurs ne sont pas des mauvais chasseurs. » Déclarait, avec sagesse, Thierry Legall, directeur du Service Pastoral auprès des parlementaires dans cette même interview !

Lors de ma formation en journalisme de proximité, j’ai été accompagné par le sous-directeur d’alors de l’École Supérieure de Journalisme de Lille. L’une des meilleures de France. J’ai appris, parfois à mes dépends, ce que déontologie veut dire ! Pensez à tous ces journalistes qui risquent leur vie, travaillent à mettre en lumière les scandales les plus cachés, affaires politiques ou autres. Vous êtes constamment au bénéfice de leur travail… et de leur déontologie.

Le mythe de l’objectivité

D’abord doit-on parler dobjectivité, dhonnêteté, dimpartialité, de neutralité ? La vérité est-elle une opinion ? Si cela vaut pour le journaliste, cela vaut aussi pour nous. Nos propres paroles sont-elles toujours « objectives » ?

« Lobjectivité journalistique nexiste pas. La pratique du journalisme repose sur une série de choix et les mots « objectif, objectivité » doivent être bannis à son sujet et réservés aux sciences exactes, les seules à pouvoir y prétendre. Les journalistes préfèrent donc parler dhonnêteté dans leur travail ». Extrait du 2nd rapport de lObservatoire de la déontologie de linformation (ODI), La fameuse question de l’objectivité journalistique. Alors, soyons précis dans nos propos, autant que nous l’attendons des autres.

Le principe

C’est le journaliste qui est propriétaire de l’info, pas vous ! Cette indépendance est indissociable d’une autre valeur à laquelle vous êtes indéfectiblement attaché : la démocratie ! « En démocratie, la liberté dopinion implique lindépendante restitution des faits rapportés par linformateur. » G. Spitéry De l’indépendance du journaliste (consulté le 2 mars 2021)

Plus séduisants que d’autres ?

C’est vrai ! Dans une récente émission de télé sur les propriétés du corps humain, pour illustrer le pouvoir de la méditation, on n’a pas choisi un moine cistercien ou un pasteur protestant, non, mais le Dalaï-Lama, dont l’image est bien plus colorée et sympathique ! Certes, les évangéliques ne possèdent pas ce pouvoir de séduction. Avouons que D. Trump ou J. Bosonaro ne servent pas l’image des « évangélistes » !

Le filtre émotionnel

Nos réactions sont souvent trop émotionnelles. Souvent dictées par la préoccupation de notre image. Vous avez été interviewé, et que vous ne retrouvez plus vos propos, votre frustration peut s’expliquer. Vous vous attendiez à autre chose. Vous pensez  « avoir dit » ce qu’il fallait. Pourtant vous n’ignorez pas qu’entre ce que vous avez ditce que vous pensez avoir ditce qui a été compris…. Il y a chaque fois une étape de communication déformante. Si vous êtes simple lecteur ou spectateur, rien ne vous autorise à être aussi définitif dans votre jugement.

Les journalistes tendent des pièges

C’est rarement le cas. Comprenons qu’ils sont régulièrement face à des interlocuteurs, institutionnels ou politiques, qui sont rodés à la com’, coachés par des communicants, pratiquant la langue de bois. Or, nous ne supportons pas cette façon de nous parler, avec ces tournures de langage préparées à l’avance. Nous devrions êtres reconnaissants aux journalistes de travailler à « casser » ces discours convenus et policés pour parvenir à donner à entendre quelque chose d’authentique. C’est leur boulot. Même si nous, qui sommes peu expérimentés dans nos relations avec la presse, sommes un peu les victimes collatérales de leur sagacité.

Vous ne retrouvez pas vos propos ?

Vous avez répondu à une interview. Vous ne reconnaissez pas vos propos. C’est inévitable. D’abord vous ne pouviez pas vous attendre à ce que le journaliste vous reprenne mot pour mot tout ce que vous avez dit. Sauf pour quelques citations. Selon sa compréhension, il a construit SON article. Il a coupé, recoupé… Très certainement aura-t-il parlé à d’autres témoins qui ne lui auront pas dit exactement la même chose que vous. C’est particulièrement vrai dans nos milieux évangéliques, peu habitués à cet exercice. De plus, le passage de l’oral à l’écrit provoque inévitablement une transformation. Cela vous arrive, lors d’un compte-rendu de réunion. Vous ne reconnaissez pas vos propos. Vous ne qualifiez pas le secrétaire de votre association de pourri, ni ne remettez en question sa déontologie. Si ?

Le titre vous agace ?

Vous avez eu un bon contact avec un journaliste, et patatra, le titre vous semble sorti de nulle part, et vous contrarie. Ne criez pas au scandale. Dans la plupart des médias, écrits en particulier, ce n’est pas le journaliste qui choisit le titre. Soit le rédac’chef, soit même un spécialiste de la titraille… Non, le journaliste ne vous a pas trahi !

Vous avez été censuré ?

Probablement pas ! Là encore ce n’est pas la faute de ce journaliste sympa avec lequel vous avez dialogué. Tous les articles sont écrits en pyramide inversée. D’abord le message essentiel, puis les différents arguments par paragraphe en ordre inverse d’importance. Et une chute pour terminer. Au moment de l’édition, le rédac’chef  doit gérer le volume des infos qui toutes, trouveront place dans la publication. Parfois, à cause de l’actualité, celui-ci doit faire des choix, et raccourcir des articles. – quand il ne les supprime pas !  La technique est simple. Il va couper paragraphe par paragraphe, en partant du bas de la pyramide… du coup, ce qui vous semblait important, ne figure plus dans l’article. Nulle mauvaise intention, encore une fois.

Le différé

Que ce soit en radio ou en télé, si votre interview est en différé, le montage-coupage découpage, provoquera les mêmes frustrations que celles évoquées plus haut.

Renonçons à nos préjugés

Les préjugés, et la manière dont nous qualifions la profession de journaliste, a au moins deux conséquences:

A – Je ne vois pas comment, nous évangéliques, pourrions développer des relations avec la presse, ni apprendre à communiquer, si nous persévérons dans d’attitude. Comment voulons-nous prier, témoigner, en tant que corps de Christ, sans renoncer à notre hostilité et à nos préjugés ?

B – Les jeunes chrétiens seront découragés de se tourner vers une profession honorable dans laquelle l’éthique chrétienne serait la bienvenue. En Allemagne, en Angleterre, ailleurs… des journalistes chrétiens qui ont trouvé leur place dans de grands médias, et reflètent Christ là où Dieu les a placés. N’est-ce pas aussi votre prière ?

À l’heure où le CNEF déploie des efforts remarquables envers les autorités nationales et locales – députés, sénateurs, préfets… qu’existent de vrais enjeux à propos du projet de loi sur « les séparatismes », renonçons à stigmatiser cette profession. Elle a besoin de Christ. Et nous avons besoin de communiquer.

Veillez sur vos propos

Vous êtes leader spirituel ? Vous cassez du journaliste ? Ce n’est pas digne de Celui dont nous sommes ambassadeurs. Dans une société violente, ne cédons pas nous-mêmes à la surenchère. Frustrés, déçus, il y a parfois de quoi ! Ne jouons pas les victimes. Même si nous étions fondés à contester une déontologie, ne dérogeons pas à la nôtre : honorer Christ dans tous nos propos.

« Qu’aucune parole malsaine ne sorte de votre bouche, mais seulement de bonnes paroles qui, en fonction des besoins, servent à l’édification et transmettent une grâce à ceux qui les entendent. » Eph 4 : 29

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