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Plus d’un chrétien a certainement bondi sur son canapé le 20 juin… La Radio Télévision Suisse (RTS) a en effet diffusé une émission d’une heure au titre évocateur : « Les évangéliques à la conquête du pouvoir ». Elle s’intéresse à l’ascension et à la mentalité des évangéliques en Suisse, aux Etats-Unis et au Brésil, mettant notamment en avant les liens entre foi et politique. Que faut-il en penser ? Dix leçons à tirer de ce reportage.

1. Un reportage est toujours subjectif

Les auteurs de cette émission avaient comme objectif de montrer les évangéliques comme une puissante force de frappe conservatrice aux Etats-Unis, au Brésil et en Suisse. Ils ont évidemment trouvé des églises, des représentants du milieu évangélique, des interlocuteurs et des faits pour étayer leur hypothèse. On est reconnaissant de l’avertissement final, qui précise que tous les évangéliques ne partagent pas cette soif de pouvoir. Cependant, l’impression générale que laisse ce « Temps Présent » est celle d’un milieu évangélique puissant et à certains égards dangereux. Tout est mis dans le même panier : influence politique malsaine, créationnisme fondamentaliste, homophobie, Evangile de la prospérité, lutte contre l’avortement, défense d’Israël, violence verbale, etc., laissant au spectateur une piètre image des évangéliques.

2. Il n’y a pas de complot évangélique mondial

Le spectateur a l’impression qu’on lui brosse le tableau d’une sorte de complot évangélique mondial organisé. L’impression est renforcée par une musique digne d’un « thriller », qui nous met mal à l’aise : on retient son souffle, s’attendant à ce que chaque nouvelle séquence nous révèle encore quelque sombre aspect de ce monde évangélique plutôt tyrannique et malveillant. Le langage employé est évocateur : il est question d’ « infiltration » dans la politique, d’un étudiant qui s’est senti « trahi et chassé » pour avoir critiqué les évangéliques, d’un parlement brésilien où il est « plutôt déconseillé de s’abstenir » de participer aux cultes organisés par les députés chrétiens, d’un pasteur qui dirige un « empire » de 90 églises, et ainsi de suite. L’assassinat d’une lesbienne progressiste au Brésil en 2018, sans que le reportage ne l’attribue explicitement aux évangéliques, apparaît implicitement comme une nouvelle démonstration de ce que l’évangélisme peut faire comme « victimes ».

3. Tout le monde se bat pour quelque chose

L’émission a raison : les évangéliques sont des battants, ils défendent une vision du monde à laquelle ils tiennent. Cependant, le reportage lui-même se fait le porte-parole de plusieurs « causes » et d’une certaine vision du monde, ostensiblement progressiste. Il constitue en lui-même une « arme » dans ce combat, non seulement par sa tonalité générale, mais aussi en donnant la parole à un pasteur qui s’est « repenti » de son fondamentalisme, à un activiste gay qui déclare « Nous sommes un mouvement, nous allons nous battre », ou encore à une jeune femme qui, après avoir beaucoup souffert dans le monde évangélique en raison de son orientation sentimentale, a trouvé une acceptation inconditionnelle dans une église moins « rigoriste ».

4. L’Histoire est vite oubliée

Il est frappant de constater combien l’Histoire a été vite oubliée. Pendant des siècles, et jusqu’à pas si longtemps en arrière, la pensée dominante sur plusieurs thématiques éthiques était celle que défendent encore les évangéliques aujourd’hui. Les évangéliques continuent de défendre une vision chrétienne du monde… tandis que la société occidentale défend une vision laïque du monde, comme si tout le monde avait toujours pensé ainsi.

5. Nous resterons toujours incompris

En francophonie au 21e siècle, la croix est plus que jamais un scandale ou une folie. L’attachement à une Parole de Dieu considérée comme vraie et infaillible ne peut pas être cautionné par une société postmoderne et relativiste. La notion d’un Dieu unique, à qui toute la terre doit obéissance et soumission, ne fait plus recette. Quand les évangéliques interrogés dans ce reportage parlent de leur foi, de leur amour pour Jésus-Christ, du changement de vie que Dieu a opéré en eux, de leur envie que d’autres soient à leur tour convertis, il est inévitable qu’un spectateur incroyant ne comprendra pas. Il comprendra encore moins que des chrétiens brésiliens encouragent des femmes à ne pas avorter ou défendent une vision « traditionnelle », c’est-à-dire biblique, du mariage.

6. Ne soyons pas naïfs

Puisque l’Evangile est une folie pour les incroyants, nous avons besoin de sagesse pour savoir comment en parler autour de nous, en particulier devant les médias. Nous avons aussi besoin d’être équipés théologiquement pour savoir répondre intelligemment et Bible en mains à ceux qui nous demandent compte de l’espérance qui est en nous. Sinon, nous risquons de discréditer l’Evangile.

7. Les évangéliques donnent parfois un contre-témoignage

Le reportage a le mérite de relever plusieurs erreurs qui, hélas, habitent effectivement le monde évangélique. La RTS est choquée de l’Evangile de la prospérité au Brésil ? Elle a raison. Elle ne comprend pas que le président d’une université chrétienne invite Donald Trump pour défendre son programme politique ? Elle a raison. Elle ne saisit pas pourquoi des évangéliques cautionnent des personnalités politiques dont la vie morale n’a rien à voir avec les enseignements bibliques ? Elle a raison. Elle s’étonne d’entendre dans les églises des soi-disant « prophéties » qui, finalement, ne se réaliseront finalement pas ? Elle a raison. Les chrétiens sont observés, et Christ nous appelle à incarner et vivre véritablement l’Evangile.

8. Les liens entre religion et politique sont parfois malsains

On pourrait discuter longtemps des liens qui, bibliquement, devraient ou ne devraient pas exister entre religion et politique. Une chose est sûre, ce « Temps Présent » met bel et bien le doigt sur des abus en la matière, par exemple en dénonçant l’opportunisme de certains candidats qui veulent s’attirer les faveurs de l’électorat évangélique ou en critiquant l’influence excessive d’un pasteur néo-pentecôtiste brésilien sur le président.

9. Attention à l’adulation des « leaders religieux »

Que penser d’une adolescente brésilienne qui suit aveuglément son pasteur, non seulement dans ses enseignements « bibliques » mais aussi dans ses recommandations de vote ? Ce travers est peut-être moins développé en francophonie, mais ce « Temps Présent » nous rappelle la nécessité du discernement devant tous les « prophètes », « apôtres » et autres figures influentes du monde « évangélique ».

10. Il ne faut pas se tromper de combat et de morale

L’émission se plaît à relever que le déménagement de l’ambassade américaine à Jérusalem a réjoui les évangéliques, et elle mentionne la volonté des évangéliques brésiliens de voir leur pays faire le même choix. Mais est-ce vraiment le premier combat des évangéliques ? En ce qui concerne l’éthique, également, nous sommes appelés à garder des positions claires, sans rien lâcher. Dieu ne change pas, ses standards moraux non plus. Mais si nous critiquons la morale du monde sans chercher nous-mêmes à être des exemples de moralité, nous n’avons aucune légitimité. Que Dieu nous garde de ressembler à ce pasteur brésilien qui, lorsqu’il parle de l’homosexualité, se met à hurler, animé d’une profonde colère, et qui, dans le même temps, ne voit aucun problème à mettre la pression sur ses ouailles pour qu’elles ouvrent leur porte-monnaie. Que Dieu nous accorde certes le courage d’appeler ce monde à la repentance et la foi, mais qu’il nous aide à vivre cette repentance et cette foi dans notre propre vie et dans nos églises.

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