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Je n’ai jamais été bon en maths. Pour quelques raisons, les mots ont toujours signifié davantage pour moi que les nombres – et c’est toujours le cas. Mais il m’est difficile d’oublier les quatre mots favoris de mon professeur de maths : « Fais voir ta démonstration ! » Ne me donne pas seulement la bonne réponse, montre-moi comment tu y es arrivé !

Pendant de nombreuses années, la prédication évangélique a été orientée vers la mise en évidence de la démonstration. L’influence de prédicateurs comme John Stott et Dick Lucas a été profonde sur le ministère de prédication au travers de notre nation.

Toutefois, je me demande si dans les dernières années, nous ne sommes pas devenus moins désireux de prêcher des sermons d’exposition explicite de l’Écriture.

En particulier, j’ai relevé une tendance à faire des sermons qui sont au sujet de la Bible mais pas dans la Bible. Des sermons qui sont ancrés non dans l’Écriture proprement dite mais qui sont une histoire développée ou une illustration en relation avec l’Écriture.

Maintenant, ne vous méprenez pas sur ma pensée. Les illustrations sont remarquablement importantes. Mais je me demande si les prédicateurs évangéliques ne doivent replacer la priorité sur la prédication d’exposition explicite du texte biblique. N’avons-nous pas besoin de faire voir notre démonstration plus clairement ?

Prédicateur, quand était-ce la dernière fois, dans un sermon, que tu as :

  • souligné les répétitions de mots et de phrases;
  • montré les relations entre les idées;
  • fait la relation entre ton texte et le but central de tout le livre biblique d’où il était tiré;
  • révélé et résolu les tensions présentes dans le texte;
  • croisé les références de citations et allusions de l’Ancien Testament ou
  • fait voir la logique du livre sur lequel tu étais en train de prêcher ?

Il est vrai que tout cela ressemble plus à l’œuvre d’un commentateur qu’à celle d’un prédicateur. Mais je voudrais suggérer trois bienfaits-clefs découlant de la mise en évidence de notre démonstration.

1. Cela place notre autorité en Dieu

C’est pénible d’admettre cela, mais les choses n’ont pas beaucoup changé depuis Corinthe.

Les églises sont encore attirées par les prédicateurs possédant un certain charisme et promptes à idolâtrer « la sagesse éloquente » (1 Cor 1:17). Instinctivement elles situent l’autorité non en Dieu mais dans leur prédicateur (1 Cor 1:11–12). Et, trop aisément, elles accordent leur cœur à la voix du prédicateur et non à celle du Berger.

Au même moment, les prédicateurs font face à la tentation constante de l’ambition personnelle (Phil 1:17). Et si nous ne sommes pas vigilants, la prédication peut facilement devenir un exercice dans la glorification de soi. La chaire est un terrain où il est dangereux de se tenir.

Les prédicateurs font face à la tentation constante de l’ambition personnelle. La chaire est un terrain où il est dangereux de se tenir.

 

L’exposition qui explique l’Écriture combat cette double tentation en fixant les yeux de notre église sur le Dieu immortel et invisible. De manière tout à fait littérale elle détourne les regards de nous et les dirige vers l’Écriture. Cela peut ne pas être la meilleure pratique rhétorique, mais l’une de nos phrases essentielles devrait être : « Regardons le verset suivant » En appelant notre église à regarder le livre, nous les incitons à considérer Dieu comme la seule vraie autorité.

En nous attachant nous-mêmes au texte, nous proclamons l’autorité de la Parole de Dieu. Tout comme Ézéchiel était muet excepté pour prononcer les paroles de Dieu, nous les prédicateurs n’avons aucune autorité en dehors de ces mêmes paroles (Ez. 3:26–27). C’est la raison pour laquelle Heinrich Bullinger peut déclarer : « la prédication de la Parole de Dieu est la Parole de Dieu ».

Des sermons qui se proclament des expositions du texte biblique mais qui manquent de regarder le livre courent le risque de devenir des conversations TED [1] au sujet de la Parole, au lieu de la Parole prêchée elle-même. Nos congrégations devraient regarder vers le bas les pages de leur Bible plutôt que vers le haut à nos personnes.

2. Cela nous maintient publiquement comptables face à la Parole

Comment nos églises peuvent-elles discerner la vérité de nos paroles ? Nos sermons nous rendent-ils, de manière appropriée, vulnérables au regard scrutateur de notre troupeau ? En tant que prédicateurs, il doit y avoir chez nous une franche volonté d’être interrogés et mis au défi face à ce que nous avons déclaré.

Dans les jours de Jérémie, les faux-prophètes annonçaient : « J’ai eu un songe ! » et ils présentaient leurs mensonges comme les paroles de Dieu. Ils étaient les « prophètes de la tromperie de leur propre pensée ». En réponse, le SEIGNEUR déclarait :

« Le prophète qui n’a qu’un songe doit rapporter ce songe, mais celui qui a ma parole doit prononcer ma parole en vérité. Ma parole n’est-elle pas comme un feu – ceci est la déclaration du SEIGNEUR – et comme un marteau qui pulvérise le roc ? » (Jér 23:28–29)

En dévoilant notre démonstration, nous les prédicateurs « parlons les paroles de Dieu avec vérité » et nous nous tenons comptables envers elle. Nous nous tenons en garde contre le fait de prophétiser un mensonge au nom de Dieu en exposant nos paroles à la claire lumière des paroles de Dieu.

L’exposition qui explique la Parole de Dieu ne se contente pas d’exposer seulement le texte mais aussi le prédicateur. Elle travaille contre le cléricalisme de nos temps modernes en ramenant les croyants au meilleur de la tradition des Béréens, « qui reçurent la parole avec empressement et examinaient chaque jour les Écritures pour voir si ces choses qui leur étaient prêchées étaient ainsi » (Actes 17:11).

3. Elle assure un ministère biblique à long terme

Un des grands risques que nous courons en ne montrant pas notre démonstration est celui de cultiver une dépendance de notre église envers nous. Nous pouvons prêcher le plus orthodoxe et le plus évangélique des sermons, mais sans une exposition explicite du texte, nous n’exercerons pas les membres de notre église à lire la Bible pour eux-mêmes.

En vérité, le plus grand risque est que notre prédication puisse être fidèle bibliquement tandis que nos congrégations resteront illettrées bibliquement. Nos églises jouissent de la réputation d’une prédication biblique mais souffrent de la réalité d’une pauvreté quant à la Bible.

Le grand risque est que notre prédication puisse être fidèle bibliquement tandis que nos congrégations resteront illettrées bibliquement

Dans The Strange Silence of the Bible in the Church (L’étrange silence de la Bible dans l’église), James Smart observe que : « Sans la Bible, le Christ dont on se souvient devient le Christ qu’on imagine, [un Christ qu’on se fabrique] par la religiosité et les désirs inconscients de ses adorateurs. »

Bien entendu, à moins que ses adorateurs ne sachent effectivement comment lire la Bible, le Christ dont on se souvient deviendra inévitablement le Christ imaginé — si ce n’est dans cette génération, alors ce sera dans la suivante. Le prédicateur qui se transforme en la seule source de sagesse biblique a la garantie de cette perte de mémoire. Il accroît la dépendance de son église envers un homme fini et limité et non envers la parole éternelle et sans limite (Ps. 119:89–96).

Le terrain de l’Évangile gagné en une génération peut aisément être perdu dans la suivante. En exposant notre démonstration, nous exerçons les adorateurs de Dieu à se souvenir de Christ longtemps après qu’ils nous auront oubliés.

L’exposition explicite de la Parole n’est-elle que pour les intellectuels ?

Je me demande si notre discret éloignement de la prédication d’exposition explicite de la Parole n’est pas conduit par un souci pastoral et d’évangélisation bien intentionné. Après tout, nous pouvons tous penser à des prédicateurs qui exposaient leur démonstration mais qui étaient secs et, reconnaissons-le, tout à fait barbants.

Mais, quand elle est bien conduite, une exposition explicite a le potentiel de mettre un turbocompresseur à notre prédication.

  • Elle peut fortifier nos applications en ne se contentant pas de simplement commander par l’impératif, mais en démontrant par l’indicatif.
  • Elle peut affûter notre évangélisation en montrant que l’évangile est la sûre promesse de Dieu et non des mots creux de l’homme.
  • Elle peut allumer nos affections et notre passion non du fait de notre capacité rhétorique, mais par la rhétorique interne, le ton et le genre du texte.

Et elle peut exercer tous les croyants – pas les seuls intellectuels – en les conduisant pas à pas dans un voyage de découverte.

Prédicateur, montre-nous comment tu t’y prends.

Traduit de : Preacher, Show your Working Out

[1] Les conférences TED sont une série de conférences organisées au niveau international par la fondation à but non lucratif nord-américaine The Sapling foundation. Elle a pour but, selon son slogan, de diffuser des « idées qui valent la peine d’être diffusées »

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