C’est désormais une réalité qui ne nous surprend même plus vraiment : bien des mariages vont mal, et les chrétiens ne sont pas forcément meilleurs que les autres en la matière… En plus des séparations et des divorces, on observe qu’une certaine médiocrité règne parfois au sein des couples qui vivent encore ensemble : beaucoup semblent s’accommoder d’une sorte de cohabitation, où les époux ont arrêté de faire des efforts pour garder leur couple en bonne santé. Le mariage est-il donc un engagement trop difficile à assumer ? Une institution qui comprend davantage d’inconvénients que de points positifs ? Un pari risqué plutôt qu’une union joyeuse ?
Un reflet de l’alliance entre Christ et l’Eglise
Non, trois fois non ! Nous avons besoin de nous rappeler que le mariage est quelque chose de beau, de possible, de glorieux… et de sérieux. Et on peut remercier John Piper de nous le rappeler avec force et conviction dans son livre « Ce mariage éphémère, un reflet de l’alliance éternelle » (BLF Éditions). Il nous martèle cette vérité capitale : « Le mariage consiste à manifester aux yeux de tous l’amour d’alliance entre Christ et son peuple ». Il ajoute : « Voilà la raison d’être du mariage. Si vous êtes marié, c’est pour cette raison que vous l’êtes. Et si vous espérez l’être un jour, c’est de cela que vous devriez rêver ».
Il y a là de quoi réfléchir : ceux qui sont mariés sont censés avoir un objectif clair pour leur vie à deux, celui de refléter l’union entre Christ et son Église. Rien que ça ! Si nous saisissions la portée de cette vérité, nous serions assurément plus engagés pour construire notre mariage, pour le protéger lorsqu’il est en danger et pour le reconstruire lorsqu’il a été mis à mal. Si nous saisissions la portée de cette vérité, nous ne nous contenterions pas de la médiocrité et nous ferions tous nos efforts pour éviter d’en arriver à la séparation ou au divorce, même lorsqu’il y a déjà bien du plomb dans l’aile…
Christ ne divorce jamais de son épouse
John Piper est catégorique : la formule « Jusqu’à ce que la mort nous sépare » n’est pas une simple formule. Elle est ancrée dans la certitude que nos couples reflètent la relation indestructible entre Christ et son Église. « Si le divorce et le remariage sont tellement insupportables aux yeux de Dieu, ce n’est pas seulement parce qu’ils supposent la rupture de l’alliance contractée envers le conjoint, mais aussi parce qu’ils dénaturent l’image du Christ et de son Église ».
Pour John Piper, on pourra donc se mettre à songer au divorce lorsqu’on constatera que Christ envisage de divorcer d’avec son peuple. Or Jésus-Christ ne fait jamais cela à son Épouse : « Il ne l’abandonne jamais, ne la délaisse jamais et ne la maltraite jamais. Il l’aime toujours. Il l’accueille toujours à nouveau quand elle s’est égarée. Il est toujours patient envers elle. Il est toujours prêt à prendre soin d’elle, à pourvoir à ses besoins et à la protéger. Et, merveille des merveilles, il trouve toujours son plaisir en elle ».
Jésus-Christ, le réparateur du mariage
Voilà la façon dont Christ a aimé son Église. Il est venu rétablir ce qui a été brisé dans le jardin d’Éden. Avant la Chute, Adam et ÈVE n’avaient pas honte de leur nudité, notamment parce que chacun savait qu’il était aimé de l’autre inconditionnellement : pour John Piper, cela préfigurait l’alliance que Christ établirait avec son Église, une alliance dans laquelle Jésus-Christ ne regarde jamais son peuple avec un regard de désapprobation et ne s’arrête pas à sa honte.
La Chute a conduit Adam et ÈVE à la honte et à un profond sentiment de vulnérabilité, non seulement devant Dieu mais aussi l’un envers l’autre. L’amour d’alliance a volé en éclats, la douce et rassurante sécurité du mariage a disparu. Mais Jésus-Christ est venu recoller les morceaux. En Christ, les époux sont censés retrouver cet amour originel et cet amour « » où ils s’aiment l’un l’autre inconditionnellement, sans avoir honte de qui ils sont. De même que Christ a couvert leur honte, de même les conjoints doivent s’accepter sans tenir compte des péchés de l’autre.
Se faire grâce, se pardonner, accepter l’autre inconditionnellement
En d’autres termes, puisque, rappelons-le, un mariage est le reflet de l’alliance entre Christ et son Église, les conjoints sont censés transposer la justification dans leur couple : de même que Christ a pardonné à son Épouse en mourant pour elle, de même le mari est censé pardonner à son épouse, mourir à sa place, se donner pour elle. Et il est évident que l’épouse est censée manifester ce même esprit de pardon et de grâce, que l’on trouve formulé magnifiquement en Colossiens 3,12-13 : se revêtir d’ardente compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience ; se supporter et se faire grâce réciproquement. Il y a donc désormais, bien plus qu’à l’époque où le divorce était autorisé à cause de la dureté du cœur de l’homme (Matthieu 19,8), « un niveau d’attente plus élevé à l’égard du peuple de la nouvelle alliance dans ce monde corrompu et éphémère », remarque John Piper.
Le mariage n’est donc pas « une relation au sein de laquelle rien ne change et où l’on est uniquement condamné à endurer une cohabitation pénible. Certes, c’est toujours mieux que le divorce aux yeux de Dieu, et une telle relation comporte une certaine gloire. Mais ce n’est certainement pas la meilleure façon de refléter la relation entre le Christ et l’Église ». Non, le mariage est un endroit où l’homme et la femme travaillent ensemble à leur sanctification, ce qui passe notamment par l’apprentissage du pardon, de la patience, de la douceur et de l’amour véritable.
Le mariage n’est pas un but en soi
Nous constatons que le défi est de taille, c’est vrai. Et à certains égards, c’est normal, puisque ce mariage est une institution éphémère, temporaire, créée par Dieu pour refléter momentanément l’alliance entre Christ est l’Église. Écoutons John Piper : « Le mariage est une préfiguration de la gloire de la relation entre le Christ et l’Église. Cependant, à la résurrection, la préfiguration disparaîtra pour céder la place à la forme la plus parfaite de cette gloire ». Il s’agit, on l’a bien compris, de rendre cette copie aussi conforme que possible à l’original ; mais il s’agit aussi de ne pas idolâtrer le mariage, en voyant là le but de la vie humaine. Le mariage et la sexualité sont des réalités merveilleuses, des dons de Dieu aux hommes, mais ils ne sont pas des buts en soi : leur but, c’est d’exposer à tous la gloire du Christ et de son amour pour son peuple.
Les célibataires ne sont pas incomplets
John Piper s’adresse donc aux célibataires, en leur rappelant qu’ils ne sont pas incomplets s’ils ne sont pas mariés. En effet, les liens en Christ sont plus durables et plus précieux que les liens familiaux. A l’instar du mariage, les familles humaines sont des institutions temporaires qui reflètent une réalité spirituelle : cette réalité, c’est que tous ceux qui croient en Christ forment sa descendance et constituent, ensemble, une véritable famille. Le mariage et la famille sont de nature temporaire, tandis que l’Église est de nature éternelle. Un célibataire a donc l’essentiel, il fait partie de la descendance du Christ, il fait partie de la famille de Christ. Les célibataires en Christ sont des membres à part entière de la famille chrétienne, au même titre que tous les autres, et ils héritent même de frères et sœurs, de mères et d’enfants au centuple (Marc 10,29-30).
De même, les couples sans enfants ne sont pas non plus incomplets, puisqu’ils ont la possibilité d’engendrer des enfants dans la foi, à l’image de Paul qui considère régulièrement les destinataires de ses lettres comme ses enfants.
Laissons le mot de la fin à John Piper : « Dans peu de temps, l’ombre des choses à venir fera place à la glorieuse Réalité. Ce qui est incomplet deviendra Perfection. L’avant-goût cédera la place au Festin. Le sentier semé d’embûches débouchera sur le Paradis. Une centaine de soirées aux chandelles trouveront leur apogée dans le festin des noces de l’Agneau. Et ce mariage éphémère sera englouti par la Vie. Le Christ sera tout et en tous. Et la finalité du mariage sera accomplie »