A quoi ressemblent vos temps de « méditation personnelle » ? Etes-vous plutôt « lecture de la Bible » ou « prière » ? Certains chrétiens lisent beaucoup l’Écriture, mais prient peu. D’autres prient beaucoup, mais ouvrent peu la Bible. Pour d’autres encore, leur temps de culte personnel ressemble à l’enchaînement de deux monologues : ils « écoutent » Dieu un moment en lisant la Parole de Dieu… puis parlent à Dieu par la prière, mais sans aucun rapport avec ce qu’ils viennent de lire. Dans cet article, nous allons réfléchir à la manière dont l’étude de la Bible et la vie de prière peuvent et doivent aller de pair : notre vie de prière s’améliorera si elle se nourrit de la méditation de la Bible, de sorte que le culte personnel soit toujours plus un dialogue avec Dieu.
Pas de « commandement » de lire la Bible ?
Avant tout, nous avons besoin d’être convaincus que la lecture de la Bible est importante. On entend parfois dire, dans les milieux évangéliques : « Il n’existe pas de commandement à lire la Bible. Je peux très bien être en relation avec Dieu toute la journée sans l’ouvrir ». Plutôt que de répondre directement à cet argument, faisons un détour par le Psaume 119. Il s’agit d’un long poème, dans lequel l’auteur insiste sur la beauté de la loi divine, pour amener ses lecteurs à partager son émerveillement pour ce cadeau extraordinaire de Dieu à son peuple. A l’époque, Israël n’avait probablement à disposition que les cinq premiers livres de notre Bible actuelle… ces cinq livres qui nous paraissent si souvent pénibles à lire. A combien plus forte raison les vérités du Psaume 119 devraient-elles nous habiter alors que nous avons en main le Canon complet !
La loi de Dieu suscite l’émerveillement
« Combien j’aime ta loi ! Elle est tout le jour ma méditation » (verset 97). C.S. Lewis témoigne qu’il a eu du mal, au début, à comprendre que quelqu’un puisse dire « J’aime la loi ! ». Pour lui, c’était comme aimer les instruments du dentiste : on peut les « aimer » pour le bien qu’ils produisent, mais pas les aimer en tant que tels. Puis Lewis a compris que la loi de Dieu est digne de notre amour, parce qu’elle est d’une beauté morale remarquable, qui va susciter l’émerveillement : « Tes préceptes sont merveilleux : c’est pourquoi mon âme les garde » (verset 129). Est-ce que nous considérons la Bible avec des yeux pétillants d’admiration, conscients que par elle, c’est Dieu lui-même qui nous parle ? Le psalmiste ajoute : « Que tes promesses sont douces à mon palais, plus que le miel à ma bouche ! »(verset 103). Et : « J’ouvre la bouche et je soupire, car je suis avide de tes commandements » (verset 131). En d’autres termes, l’Écriture est un aliment plus doux que la nourriture la plus douce, et une richesse plus désirable que le plus désirable des trésors.
Est-ce que nous considérons la Bible avec des yeux pétillants d’admiration, conscients que par elle, c’est Dieu lui-même qui nous parle ?
La Parole de Dieu est-elle la voix dominante dans nos pensées ?
Le psalmiste ne peut qu’arriver à cette conclusion : « Combien j’aime ta loi ! Elle est tout le jour l’objet de ma méditation ». Amour et méditation sont liés : plus j’aime la Bible, plus je voudrai la méditer ; plus je vais la méditer, plus je l’aimerai. Méditer la Parole de Dieu, c’est s’imprégner de ce qu’elle dit et y réfléchir. A longueur de journée, nous pensons à toutes sortes de choses. Est-ce que la Parole de Dieu fait partie de ce flot de pensées ? Est-elle la voix dominante ? Pour qu’elle soit l’objet de notre méditation, nous avons besoin de prendre l’habitude de nous arrêter pour la méditer : nous serions prétentieux d’imaginer que la Parole de Dieu sera dans nos pensées si nous ne l’ouvrons pas ; nous serions naïfs de penser qu’avec des vies aussi chargées que les nôtres, la seule écoute de la prédication du dimanche matin nous suffira.
Pas de maturité sans lecture de la Bible
Pour étoffer son argumentation, l’auteur du Psaume 119 décrit tous les bienfaits positifs de la méditation de la loi de Dieu. Citons-en rapidement trois. D’abord, seule la Parole de Dieu procure la sagesse, la crainte de Dieu et la maturité : nous resterons immatures si nous ne lisons pas notre Bible. Ensuite, seule la Parole de Dieu conduit à l’obéissance : la stabilité et la force de faire les bons choix ne se trouvent pas ailleurs. Enfin, seule la Parole de Dieu apporte la paix et la confiance : c’est en apprenant à connaître Dieu par la méditation de la loi que le psalmiste grandit dans sa confiance en Dieu en toutes circonstances.
Nous pourrions citer bien d’autres textes bibliques pour étayer ces vérités, et démontrer que la méditation de l’Écriture fait de nous des croyants heureux, stables et porteurs de fruits (Psaume 1) ; qu’elle nous permet de mener à bien nos entreprises (Josué 1,8) ; qu’elle est utile pour nous enseigner, nous convaincre, nous corriger, nous instruire dans la justice et nous préparer à toute œuvre bonne (2 Timothée 3,16-17). Bref, se priver de méditer la Parole de Dieu est un choix qui déshonore le Dieu qui nous en a fait cadeau.
Tout culte personnel est un dialogue : Dieu parle, je réponds
Ce trésor va changer notre vie. Mais comment ce processus de transformation va-t-il s’opérer en moi ? Comment ma méditation de la Bible portera-t-elle du fruit ? Ce sera le cas si elle devient prière, si j’apprends à m’approprier ce que je lis et à y répondre. Un culte personnel (tout comme un culte en assemblée, d’ailleurs) est un dialogue : Dieu parle et je réponds.
D’ailleurs, les choses fonctionnent forcément ainsi, car le langage de Dieu existait avant le nôtre. Eugène Peterson, cité par Timothy Keller dans son livre « La prière », rappelle que quand nous venons au monde, « nous sommes longés dans un océan de paroles. Puis, syllabe après syllabe, nous acquérons la capacité de répondre : maman, papa, boire, non, donne. Mais aucun de ces mots n’a jailli de notre bouche sans avoir été prononcé auparavant par autrui. Tout discours est une réponse ». Il en va de même avec Dieu : il nous a parlé, et c’est ce qui nous permet de connaître son langage et de lui répondre. Dès lors, notre prière est forcément une réponse à ce que Dieu nous a dit ; notre prière va prendre de la consistance au fur et à mesure qu’elle est nourrie du langage de Dieu. Il est souvent difficile à ceux qui lisent peu la Bible de savoir quoi dire dans leurs prières, tandis que les chrétiens « imbibés » de la Parole de Dieu prononcent quant à eux souvent des prières riches.
Notre prière va prendre de la consistance au fur et à mesure qu’elle est nourrie du langage de Dieu.
Une méditation à la fois intelligente et contemplative
C’est par la méditation que l’on se remplit de cette Parole de Dieu : une méditation qui n’est ni mysticisme, ni pure intellectualisation. La vraie méditation est à la fois intelligente et contemplative : intelligente, car le texte a un sens en soi, que je cherche à comprendre et qui va transformer mes pensées ; contemplative, car la rumination des vérités du texte va réchauffer mon cœur et me rendre heureux comme l’homme du Psaume 1. Ma méditation ressemble à une sorte de dégustation et de digestion spirituelle de la Parole.
Quand l’étude devient méditation, et quand la méditation devient prière
Un exemple. Peut-être que, dans votre lecture quotidienne, vous avez lu la rencontre de Jésus avec le jeune homme riche. Votre lecture vous amène à réfléchir : « Quelles sont les choses qui, dans ma vie, ont encore trop d’importance et qui m’empêchent de vraiment suivre Jésus-Christ pleinement ? Quelles sont mes idoles ? Jésus dit qu’il est difficile à ceux qui ont des biens d’entrer dans le royaume de Dieu : n’est-ce pas là le problème de notre pays ? N’y a-t-il donc aucun espoir ? Oui, il y a de l’espoir, car Jésus dit que ce qui est impossible aux hommes, est possible à Dieu ».
Cette méditation va peut-être vous amener à prier pour que Dieu révèle vos idoles ; elle va vous amener à demander pardon à Dieu parce que vous aimez trop peu Christ ; elle va vous conduire à prier pour votre pays et à supplier Dieu qu’il ouvre le cœur de vos proches, qui ressemblent tellement au jeune homme riche. L’étude est devenue méditation. La méditation est devenue prière. Il y a eu un dialogue. Charles Spurgeon l’exprime ainsi : « La simple écoute de la Parole est de peu de valeur en soi, mais quand les paroles de Dieu entrent dans la chambre intérieure du cœur, alors la lumière se répand de tous côtés ».
Aussi une question d’habitude
Tous nos temps de culte personnel n’ont pas forcément cette richesse. Nos pensées continueront à être distraites. La fatigue rendra parfois la compréhension du texte difficile. Certains passages resteront un peu fermés à notre intelligence. Notre cœur ne sera pas toujours touché comme il le devrait. Mais peu à peu, à force d’habitude, notre culte ressemblera toujours plus à un vrai dialogue.
Notre cœur ne sera pas toujours touché comme il le devrait. Mais peu à peu, à force d’habitude, notre culte ressemblera toujours plus à un vrai dialogue.
Nous grandirons dans notre compréhension de la personne de Dieu et serons poussés à des prières d’adoration et de louange. Nous nous approprierons des promesses bibliques données à ceux qui souffrent, ce qui nous amènera à supplier Dieu de réaliser ces promesses dans notre vie, à épancher notre cœur devant lui et à lui exprimer toute notre confiance et l’attente de son intervention. Nous nous identifierons aux croyants de l’Ancien Testament et pourrons dire peut-être, comme David Brainerd en témoigne après sa lecture du récit de la vie d’Elie : « Mon âme a été émue, en observant la foi, le zèle et la puissance de ce saint homme ; combien il a lutté avec Dieu dans la prière. Mon âme a crié avec Elie : « Où est le Dieu d’Elie ? ». Oh, j’aspire à tellement plus de foi ! Mon âme a soupiré après Dieu et plaidé avec lui, pour qu’une double portion de son Esprit, qui a été donnée à Elie, repose sur moi. Et ce qui a rafraîchi et fortifié mon âme, c’est de voir que Dieu est le même qu’aux jours d’Elie ». Oui, tout passage de l’Écriture peut devenir le formidable moteur d’une belle et riche vie de prière et nous conduire à vivre ce pour quoi nous avons été créés : être en communion avec Dieu.