Chers pasteurs et prédicateurs, vous êtes engagés dans le plus grand combat du monde, et vous avez besoin d’une arme (la Bible), d’une armée (l’Église) et de forces (le Saint-Esprit) pour le mener à bien. Voilà, en substance, le message que Charles Spurgeon a adressé à ses collègues pasteurs quelques mois avant sa mort, dans un discours percutant qui nous est rapporté dans le petit livre « Le plus grand combat du monde », publié en 2021 par Publications Chrétiennes. Le propos n’a pas perdu de son actualité et peut assurément encourager tous les hommes engagés dans le ministère pastoral à poursuivre leur mission avec persévérance… mais aussi tous les chrétiens à rester fidèles dans leur vie de disciple. Dans ce premier article, nous réfléchirons au premier élément de ce combat : notre arme, la Bible.
Pas besoin d’être original dans les prédications
Charles Spurgeon insiste : la Bible est suffisante ! Prêchez-la avec fidélité, sans compromis, sans succomber au piège de l’innovation ou à la tentation de l’originalité. A l’époque (fin du 19e siècle), l’essor du libéralisme et du rationalisme semblent beaucoup inquiéter le « prince des prédicateurs », qui encourage ses collègues à ne pas céder à ses sirènes. « Nous sommes en présence d’une nouvelle génération d’hommes qui cherchent sans relâche un nouveau moteur, un nouvel Évangile pour leurs Églises. La couverture de leur lit n’étant pas assez longue, ils veulent emprunter un peu d’étoffe au rationalisme, à l’agnosticisme et même à l’athéisme ».
Aujourd’hui, les idéologies et philosophies à la mode ne sont pas tout à fait les mêmes, mais la tentation demeure, pour les Églises et les pasteurs, de se laisser séduire par toutes sortes de courants de pensée à la mode et de les introduire, parfois subtilement et inconsciemment, dans leur enseignement. Ou alors, de rejeter des enseignements qui ne sont plus au goût du jour de la société. Qu’on ajoute ou qu’on retranche, le résultat est finalement le même : la pureté de la Bible est entamée.
Le Plus Grand Combat du monde
Charles Haddon Spurgeon
Seule la Bible change réellement des vies
Écoutons alors Spurgeon défendre la pertinence de la Bible même lorsqu’elle est attaquée : « Ceux, ici, qui grisonnent déjà peuvent vous assurer qu’ils ont éprouvé la Parole comme l’argent est éprouvé dans un creuset de terre ; elle a résisté à la fournaise, même chauffée sept fois ». La Bible a fait ses preuves. Elle continue de changer des vies, a contrario des idéologies à la mode : « J’aimerais regarder un catalogue des conversions opérées par la théologie moderne. J’investirais volontiers pour obtenir un exemplaire d’un tel ouvrage ! », ironise Spurgeon.
La Bible convertit. La Bible console. La Bible édifie et produit des vies saintes. La Bible apaise et affermit les malades. Quelle autre doctrine peut en dire autant ? « Nous sommes constamment étonnés par la merveilleuse puissance du vieil Évangile. Bien que nous l’ayons contemplée bien souvent, elle nous tient toujours sous le charme ». Et d’ajouter : « Et combien de fois, depuis votre conversion, la Bible n’a-t-elle pas été votre tout ? Vous avez eu, probablement, des moments de faiblesse, mais n’avez-vous pas été restauré par cette précieuse consolation : les promesses du Dieu fidèle ? Un passage des Écritures appliqué à un cœur tremblant suffit pour lui rendre l’énergie et le courage ».
Jamais blasé de l’Évangile !
Etes-vous blasés du message biblique et d’enseigner toujours la même chose ? Avez-vous soif d’originalité ? Ce n’était pas le cas de Spurgeon : « Après avoir prêché l’Évangile pendant quarante ans, et après avoir fait imprimer chaque semaine les sermons que j’ai prêchés, au nombre de deux mille deux cents, et ce, pendant trente-six ans, j’ai le droit de parler de la richesse et de la plénitude de la Bible, considérée comme le livre culte du prédicateur. Elle est inépuisable. Une vie nous suffira à peine pour explorer les rives de ce vaste continent de lumière. Si vous deviez prêcher pendant l’éternité, vous auriez devant vous de quoi remplir cette période tout entière ».
Peut-être avons-nous parfois peur de lasser les chrétiens de nos Églises en répétant les mêmes choses, et cette pensée peut nous venir à l’esprit : « Ne devrais-je pas citer davantage d’autres sources ? Prévoir des prédications plus novatrices ? Proposer des cultes plus expérimentaux ? ». Spurgeon raconte une histoire, celle d’un roi qui donnait chaque semaine des fêtes à son peuple. Après quelque temps, le nombre de convives se mit à diminuer. Le roi fit une enquête et découvrit la raison de l’impopularité de ses festins : ses mets n’étaient plus au goût du peuple. Il résolut d’examiner lui-même les tables et les mets… et remarqua avec surprise que l’on avait remplacé les bons plats sortis de ses meilleurs magasins par une nourriture de mauvaise qualité. Ses serviteurs expliquèrent que, redoutant que les convives ne se lassent du vin délicieux du roi, de sa viande savoureuse et de son goûteux pain blanc, ils avaient pris l’initiative d’innover un peu… Le roi prit les choses en main pour proposer à nouveau les bons repas qui étaient servis à l’origine, et le peuple revint en masse. La leçon de l’histoire n’est pas bien difficile à comprendre…
Ne nous laissons pas impressionner par toutes sortes de théories…
Un autre « oui mais » pourrait alors émerger : « Oui, mais l’enseignement biblique n’est-il pas trop simpliste ? Fait-il vraiment le poids face à toutes les propositions scientifiques et idéologiques de notre temps ? ». Pour Spurgeon, il n’y a aucun complexe à avoir. Ce qu’il dit des sciences peut être transposé aux grandes théories sociales, culturelles ou philosophiques de notre époque. Écoutons-le : « Que les sages de chaque génération nous disent ce qu’ils pensent de ceux de la génération précédente. Que dis-je ? Aujourd’hui, la moitié d’une génération juge la moitié de celle qui l’a précédée, car peu de théories scientifiques subsistent après vingt ans, et bien peu d’entre elles verront le premier jour du vingtième siècle. Nous voyageons si rapidement, aujourd’hui, que nous laissons derrière nous les hypothèses scientifiques à la même vitesse que nous voyons défiler devant nous les paysages lorsque nous sommes assis dans un train express ». En d’autres termes : ne nous laissons pas impressionner. Le monde passe, les théories savantes vont et viennent… mais la Parole de Dieu ne change pas et demeure éternellement.
« Nous voulons la Bible entière, ou pas de Bible du tout »
Du temps de Spurgeon, la pression était aussi visiblement forte, y compris de l’intérieur même de l’Église, pour que certaines doctrines soient évacuées, histoire de rendre le christianisme plus « politiquement correct ». On pourrait facilement céder à la tentation : « Jetons l’inspiration aux critiques, et qu’ils déchirent cette doctrine-là. Jetons la doctrine de l’élection et tout notre vieux calvinisme. Jetons le dogme de la chute, celui des peines éternelles, celui de la prière efficace. Jetons aux loups la doctrine de l’expiation ». Pari judicieux ? Nullement, répond Spurgeon : « Mes frères, ces conseils sont lâches et meurtriers. La vérité, toute la vérité, rien que la vérité… ou rien. Nous ne voulons pas en sauver la moitié en sacrifiant le reste. Nous voulons la Bible entière, ou pas de Bible du tout ».
« Ayons le courage de prêcher des vérités impopulaires ! »
Plus loin, il avertit contre le cercle vicieux qui nous attend et la distance toujours plus grande qui se créera avec l’orthodoxie au fil des ans et des générations, si l’on accepte de sacrifier certaines doctrines : « Mes frères, n’abandonnons rien ! Ayons le courage de prêcher des vérités impopulaires ! Il peut se faire qu’aucun mal ne résulte, de notre vivant, de nos omissions ou de nos ajouts erronés, mais nous serons tout aussi responsables des fruits qu’ils porteront après nous. Je n’ai aucun doute que l’omission de certaines doctrines, par les Églises des premiers siècles, a produit plus tard de graves erreurs. Soyons très exacts dans nos propos : ne dépassons pas d’une ligne l’enseignement des Écritures et ne restons pas une ligne en deçà ».
Comment donc remporter le plus grand combat du monde ? Charles Spurgeon ne dit finalement rien d’autre que Paul à Timothée : « Prêche la Parole ! » (2 Timothée 4,2). Mais ce n’est pas tout. Dans l’article suivant, nous considérerons deux autres grandes exhortations de Spurgeon dans ce discours : combattons avec l’Église et en comptant sur les forces du Saint-Esprit.