Le Psaume 63 nous montre la prière non pas comme une « liste de requêtes et de commissions », mais comme le réflexe normal et joyeux de celui qui aime Dieu.
Et si nous passions souvent à côté d’un des plus beaux privilèges que Dieu nous ait accordés en tant que chrétiens ? Et si nous ressemblions à des gens dont la cave est pleine de pièces d’or dont ils ne vont jamais se servir ? Ou à des veinards qui vivent à 100 mètres de la mer mais ne prennent jamais le temps d’y aller, préférant rester cloitrés chez eux avec les volets fermés ? Ce privilège, ce trésor si précieux que nous négligeons si souvent, c’est la prière : un cadeau que nous avons tendance à considérer comme un devoir religieux plus que comme un plaisir, comme une activité plus que comme une relation. Où sont la passion, la persévérance et la foi dans notre vie de prière ?
Quel est notre réflexe quand nous souffrons ?
Qu’apprend-on donc de la prière ? Premièrement, la prière cherche Dieu. David a composé ce Psaume lorsqu’il était dans le désert de Juda, en fuite soit devant Saül, soit devant Absalom (les commentateurs sont partagés à ce sujet). Une chose est sûre : David souffre, il doit se cacher, c’est un SDF vivant dans des lieux hostiles. Comment aurions-nous réagi en de pareilles circonstances ? Peut-être aurions-nous prié… mais de prières du type « Au secours, Seigneur, j’en ai marre ! ». Bien sûr, comme le révèlent d’autres Psaumes, David a aussi formulé ce genre de prières « SOS », mais le Psaume 63 nous dépeint plutôt, lui, une magnifique confiance et un remarquable attachement à Dieu.
La prière cherche Dieu
« O Dieu ! Tu es mon Dieu, je te cherche, mon âme a soif de toi, mon corps soupire après toi, dans une terre aride, desséchée, sans eau » (verset 2). David peut dire que Dieu (celui que la Bible nous présente comme ayant tout créé en six jours, celui qui est trois fois saint, celui qui a libéré son peuple d’Egypte) est son Dieu ! C’est là le privilège ahurissant de la prière : lorsque nous prions, nous nous adressons à ce Dieu avec l’assurance qu’il est notre Dieu. Et ce Dieu n’est pas distant ou indifférent : nous pouvons le chercher… et c’est ce que fait David : « Je te cherche ! ». Or, quand nous prions avec l’humilité joyeuse de venir vers celui qui nous aime et que nous aimons, alors nous le trouvons.
Lorsque nous prions, nous nous adressons à ce Dieu avec l’assurance qu’il est notre Dieu. Et ce Dieu n’est pas distant ou indifférent
Assoiffés de Dieu ?
David est dans un désert. Il a probablement réellement soif, mais il est conscient que son plus grand besoin est sa soif spirituelle. Plus que de l’eau, il veut Dieu, la communion et l’intimité avec lui. Avez-vous déjà eu très soif ? Vous n’avez pas le choix : vous devez boire ! David vit cette réalité sur le plan spirituel, et ce Psaume nous y encourage aussi : Dieu aimerait que nous ayons soif de lui et que nous ne puissions pas désirer autre chose qu’étancher notre soif en lui, par une rencontre avec lui, par la prière. La prière nous fera alors le même « effet » qu’une boisson bien fraîche qui vient nous désaltérer lorsque nous mourons de soif.
« J’ai vraiment goûté au ciel »
Au milieu du 18e siècle, David Brainerd est parti comme missionnaire parmi les Indiens d’Amérique. Il s’est retrouvé seul au milieu des païens et d’une nature sauvage, sans aucun confort. Son journal intime révèle que rien n’était plus important pour lui que la prière. Il écrit, après un temps en prière : « J’ai passé une heure si douce, seul avec Dieu. J’ai été élevé au-dessus des soucis et des flatteries de ce monde, j’ai goûté à la délectation des joies célestes, comme si mon âme avait rejoint le monde éternel. Oui, j’ai vraiment goûté au ciel ».
Comment puis-je préférer les réseaux sociaux à la prière ?
Cela peut ressembler à un idéal quasiment inaccessible. Comment y goûter ? Si nous prenons conscience que la prière est une rencontre avec Dieu, nous serons convaincus que nous devons dégager du temps pour prier. Cela ne se fera pas sans sacrifier d’autres choses, dont certaines sont bien futiles : si l’on y réfléchit, comment est-ce possible de préférer passer des heures sur les réseaux sociaux plutôt que de s’arrêter pour prier ? En fait, même certaines occupations légitimes et même excellentes portent peut-être préjudice à notre vie de prière : ne serait-il pas sage, parfois, d’écouter un podcast de moins ou de lire un bon livre chrétien de moins, pour passer du temps en prière ?
Mon besoin le plus pressant : contempler Dieu
Une deuxième chose que nous montre ce Psaume 63, c’est que la prière contemple Dieu et médite sur lui : « Ainsi je te contemple dans le sanctuaire, pour voir ta puissance et ta gloire » (verset 3). David se languit du culte qu’il pouvait rendre à Dieu avec son peuple lorsqu’il n’était pas en fuite. En même temps, il sait que le sanctuaire de Dieu, c’est aussi et ultimement le ciel, le lieu où Dieu réside. Par la prière, il y est comme transporté. Et il contemple alors Dieu, et deux attributs en particulier : sa puissance et sa gloire. David est un SDF en fuite et assoiffé. Mais ce qui, dans ce contexte, lui fait le plus de bien, c’est de s’arrêter pour prier et, en prière, de méditer sur la puissance et la gloire de Dieu. Nous voyons ainsi que la prière ne cherche pas d’abord des solutions : elle cherche Dieu. Cela ne signifie pas que ses besoins « naturels » et humains seraient sans importance, mais son besoin le plus pressant est spirituel : dans ces circonstances, il a besoin de trouver et de contempler Dieu.
La prière ne cherche pas d’abord des solutions : elle cherche Dieu.
Nos soucis s’atténuent lorsque Dieu devient grand à nos cœurs
Cela fait réfléchir : lorsque nous traversons des déserts, il est si naturel de venir à Dieu de manière un peu frénétique et angoissée, pour lui demander de résoudre nos problèmes. Nous avons le droit de le faire. Dieu nous accueille. Mais David semble nous dire que la première chose à faire serait plutôt de commencer par contempler Dieu. Imprégnés de ce que nous savons de lui, parce que nous l’avons lu dans sa Parole, nous pouvons l’adorer pour qui il est, dire en prière que nous lui faisons confiance parce qu’il est puissant et glorieux. Au fur et à mesure que Dieu deviendra ainsi grand à nos esprits et à nos cœurs, nos problèmes paraîtront diminuer en intensité et en gravité.
Se nourrir de ce que l’on sait de Dieu
Pour grandir dans cet émerveillement, David pense à Dieu… même la nuit : « Lorsque je me souviens de toi sur ma couche, je médite sur toi pendant les veilles de la nuit » (verset 7). Même la nuit, David médite sur Dieu. Il cherche à grandir dans sa connaissance de lui, pas dans une connaissance intellectuelle, mais dans une connaissance personnelle. De cette méditation, il en ressort la joie. De cette joie, il en découle la prière. David se souvient. David médite. Ces deux verbes indiquent une sorte de rumination de vérités concernant Dieu. Il y a un côté intentionnel, volontaire. Nous ne grandirons pas dans notre connaissance de Dieu juste « comme ça » ; la méditation ne tombe pas du ciel, elle implique de prendre du temps pour se nourrir de ce que l’on sait de Dieu.
La méditation ne tombe pas du ciel, elle implique de prendre du temps pour se nourrir de ce que l’on sait de Dieu.
De la contemplation à la louange
Troisièmement, ce Psaume nous montre que la prière loue Dieu et se rassasie de lui. Vous est-il déjà arrivé de considérer quelque chose comme admirable ? Un paysage, un tableau, une musique… L’admiration nous pousse à la louange. C.S. Lewis en tire l’application suivante : si Dieu est l’objet d’admiration par excellence, la seule chose qui en découlera sera de le louer et de dire à tous combien il est admirable. C’est le cheminement de David : « Car ta bienveillance est meilleure que la vie : mes lèvres te glorifieront. Ainsi je te bénirai toute ma vie, j’élèverai mes mains en ton nom. Mon âme sera rassasiée de graisse et de moelle. L’acclamation aux lèvres, ma bouche te louera » (versets 4-6).
David contemple notamment la bienveillance de Dieu, qui le pousse à la louange. L’être le plus puissant et glorieux de l’univers me regarde et me considère avec bienveillance. C’est mieux que la vie ! Et David se sent rassasié, comme après un bon repas qui l’aurait « rempli » et lui aurait accordé une sorte de plénitude. Par la prière, David s’est approché de Dieu, il l’a contemplé et ce qu’il a vécu n’est pas théorique : il a passé un moment béni avec Dieu.
Sa situation n’a pas changé, mais la prière l’a changé
Sa situation n’a pas changé, mais lui a changé. La prière l’a changé.
Finalement, les derniers versets du Psaume (versets 10-12) nous révèlent que la prière s’attend à Dieu. Avec confiance, David exprime son assurance que Dieu interviendra en sa faveur et contre ses ennemis. Sa situation n’a pas changé. Il est toujours dans son désert, toujours poursuivi par ses ennemis. Sa situation n’a pas changé, mais lui a changé. La prière l’a changé. Il a pu en quelque sorte s’élever dans le ciel et se réfugier à l’ombre des ailes de Dieu. Se sachant spirituellement « là-haut » avec Dieu, et sachant Dieu « ici en bas avec lui », il ne craint plus rien. Sa cause est entre les mains d’un Dieu qui va agir.