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En hommage à Antonin Hako

Il est seul dans son atelier. Il travaille, à sa table. Il est concentré, silencieux. Devant lui sont étalés une multitude de lambeaux de papier, qu’il a peints, redécoupés. Une sorte de patchwork, de ses couleurs à lui, avec une dominante de mauve, celui des colchiques. Sur une grande feuille de carton, épais, dont il a d’abord recouvert la surface, avec une aube pâle, il réassemble les pièces d’un puzzle dont lui seul a le secret. Il crée du rythme, avec les couleurs et les formes, patiemment. Il est comme enclos dans son jardin.

C’est un bruit qui le sort de lui-même. Un cri, venu de l’extérieur. Il se dirige vers la baie vitrée. La vue s’étend, considérable, sur les toits parisiens de la Défense, sous le ciel gris. Il passe de l’intensité de la vie, dans l’espace limité de l’oeuvre en création, au silence de la ville, morose. Il a ouvert la baie vitrée. D’où venait le cri ? Il s’avance sur les toits plats, lui, seul, comme au-dessus du monde, entre le ciel et les immeubles. Il travaille avec un collectif d’artistes, installés dans les anciens locaux d’une entreprise, réaménagés. Il ouvre tout grand ses bras, comme un oiseau prêt à l’envol. Son regard brasse l’horizon. Les intensités de lumière, variables, du gris au blanc, fluctuent sur les façades de verre des tours, hautes. La pensée lui vient de tous ces gens, là, derrière leurs barrières de verre, toutes ces vies, cachées. Ces coeurs battants. Et pourtant, tellement de silence, et d’absence de communication, de vie. Alors, quelque chose de vague vient solliciter son attention : un mouvement bleu, flottant dans l’espace, une toile légère, agitée par le vent … il vient d’avoir une idée !

Lui qui a toujours travaillé sur des surfaces dures : cartons ; toiles ; murs … s’est dit qu’il pourrait transposer son travail de recherche sur tissu et, au lieu de réaliser des tableaux, des fresques, confectionner de larges drapeaux, qui flotteraient au vent. Sur la pièce de toile, légère, étendue au sol, il a laissé partir ces impulsions colorées, qui créent son style, dynamique, et harmonieux. Il passe toujours, en ce qu’il réalise, un souffle de vie, et de plus, ces oeuvres-là, qu’il va répéter, en série, sont destinées à être emplies, habitées par le vent. La toile fixée à un manche, rigide, aussi haut que lui, il sort sur les toits. Le drapeau, d’abord pendant, inerte, le long du manche, se met à frémir. Il le déploie d’un geste ample, l’air vient et la toile semble rire de toutes ses couleurs à la face du monde. Il est lui-même surpris par ce qui advient, ce déploiement musical. Il pose sa bannière, rentre à l’atelier et revient avec un appareil pour diffuser de la musique, superposer musique et mouvement. C’est tout son être à lui qui se met alors à entrer en danse, en agitant son drapeau d’art sur le rythme de la musique.

Il discerne d’abord un appel, vague, qui retentit. Des fenêtres s’ouvrent, sans visage, mais des points colorés, des silhouettes apparaissent, bougent. Il entend deux syllabes : « Mer-ci ! » Le mot est repris, en rumeur, montante. Des foulards colorés sont agités, en écho. ils sont ensemble dans une fête improvisée de l’instant.

Jean 16 : 20 :
« Vous serez dans la tristesse, mais votre tristesse sera changée en joie. »

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