Nous publions une série de 3 articles sur le thème du complémentarisme : l’auteur relève 5 objections courantes soulevées contre le complémentarisme.
Etant donné la nature volatile de la sexualité dans notre monde, il n’est pas surprenant que la complémentarité homme/femme du point de vue divin soit un sujet controversé. D’une part, nous voulons être humbles devant le Seigneur et les uns devant les autres, en reconnaissant que nous pouvons faire des erreurs d’interprétation.
D’autre part, nous ne voulons pas miner l’autorité pratique de la Bible en déclarant que tout ce dont nous disposons relève d’« interprétations ». Le fait qu’il existe des interprétations concurrentes n’exclut pas que l’une d’entre elles soit juste ou du moins plus correcte qu’une autre. Le conseil « Venez, argumentons ensemble ! » est nécessaire pour le peuple de Dieu aujourd’hui comme il l’a toujours été (Ésa. 1:18).
Ayant ceci en tête, permettez-moi de répondre à un certain nombre d’objections courantes contre le complémentarisme.
Objection 1 : Galates 3 :28
« Il n’y a plus ici ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme, car tous vous êtes un en Christ Jésus. » (Gal. 3:28)
Selon certains chrétiens, ce texte règle la question des rôles des sexes dans l’Église. Alors que les enseignements de Paul dans 1 Corinthiens et 1 Timothée étaient plus liés à des circonstances spécifiques, affirment-ils, il s’agit clairement là d’une question transculturelle. Galates 3:28 est le verset. On ne peut rien comprendre au sujet des hommes et des femmes en dehors de ce cadre et chaque autre verset, pour être valable, se doit d’être examiné au travers de ce prisme.
Mais, outre l’approche discutable qui consiste à faire de ce verset le dernier mot sur le sujet, enseigne-t-il ce que certains chrétiens prétendent ? Galates 3:28 efface-t-il les rôles spécifiques aux sexes dans l’église ?
Considérons le contexte plus large des Galates. Paul essaie de frayer un chemin théologique à travers la controverse entre Juifs et Gentils qui ravage l’église. L’enjeu principal est de savoir si les Gentils doivent se mettre à vivre comme les Juifs pour être sauvés. Ce qui ramène Paul à la question plus large de savoir ce que signifie être un vrai Juif en premier lieu. Recevons-nous l’Esprit par la loi, ou en croyant (3,2) ? Sommes-nous justifiés par la loi, ou par la foi (2,16) ? La réponse claire de Paul est que nous sommes déclarés justes devant Dieu par la foi en Christ.
Mais certains Juifs risquaient de manquer le coche. Pierre, par exemple, a dû être réprimandé parce qu’il refusait la communion à table avec les Gentils (Gal. 2:11–14). Apparemment, certains en Galatie commettaient la même erreur en pensant que les Juifs et les Gentils se trouvaient sur un plan spirituel différent. Pour contrer cette erreur, Paul soutient vigoureusement que nous sommes tous un en Christ.
Mais que signifie « nous sommes tous un » ? En quoi n’y a-t-il ni homme ni femme ? La différence sexuelle cesse-t-elle d’avoir de l’importance pour ceux qui sont en Christ ? Certainement pas, sinon la logique derrière la condamnation par Paul de l’intimité sexuelle entre personnes du même sexe n’aurait pas de sens (Rom. 1:18–32).
Nulle part dans les lettres de Paul, nous n’avons la moindre indication que l’homme et la femme ont cessé d’être des catégories importantes pour la vie et le ministère. Paul ne supprime pas la différence sexuelle de manière générale. Il rappelle plutôt aux Galates que lorsqu’il s’agit d’être juste devant Dieu et d’être ensemble en Christ, les marqueurs du sexe, d’ethnie et du statut social ne sont d’aucune utilité.
Paul ne supprime pas la différence sexuelle de manière générale. Il rappelle aux Galates que les marqueurs de sexe, d’ethnie et du statut social ne sont d’aucune utilité quand il s’agit de justice devant Dieu.
Au risque d’importer nos sensibilités modernes dans le monde biblique, nous pouvons dire, dans un sens soigneusement défini, que Paul enseigne l’égalité entre les sexes. L’homme et la femme sont tous deux prisonniers sous la loi (3:23), tous deux sont justifiés par la foi (3:24), tous deux sont libérés des liens de la loi (3:25), tous deux sont fils de Dieu en Christ (3:26), tous deux sont revêtus en Christ (3:27), et tous deux appartiennent au Christ en tant qu’héritiers selon la promesse (3:29). Ce que Paul veut dire, ce n’est pas que la masculinité et la féminité soient abolies en Christ, mais que la différence sexuelle ne rapproche ni n’éloigne personne de Dieu.
Objection 2 : Éphésiens 5 :21
« Vous soumettant l’un à l’autre par révérence pour Christ… » (Éph. 5:21).
Personne ne devrait nier que nous devons nous aimer les uns les autres, préférer les autres à nous-mêmes, nous comporter avec douceur les uns envers les autres, répondre avec gentillesse et traiter les autres avec respect et humilité. C’est une sorte de « soumission mutuelle », je suppose, mais est-ce bien cela dont parle le texte ? Certains chrétiens soutiennent que la soumission mutuelle annule les différences dans les responsabilités conjugales et les structures d’autorité. Même s’il est dit aux femmes de se soumettre à leur mari (et le mot grec est sous-entendu mais pas précisé au verset 22), ce n’est que dans le contexte d’une soumission mutuelle déjà existante. C’est l’argumentaire, mais tient-il la route ?
La clé pour comprendre le verset 21 est de regarder ce qui suit. Après l’injonction de se soumettre les uns aux autres, Paul décrit la relation appropriée entre les différents partenaires. Les épouses doivent se soumettre à leur mari, les enfants obéir à leurs parents, et les esclaves obéir à leurs maîtres. Paul a à l’esprit des relations spécifiques lorsqu’il ordonne la soumission mutuelle.
Sa préoccupation n’est pas que chacun traite l’autre avec grâce et respect (bien que ce soit aussi une bonne idée) mais que les chrétiens se soumettent à ceux qui sont en position d’autorité au-dessus d’eux : les femmes à leur mari, les enfants à leurs parents, les esclaves à leurs maîtres. Se soumettre l’un à l’autre par révérence pour Christ signifie que nous nous soumettons à ceux dont la position implique une autorité sur nous. (Il convient également de souligner que le langage « l’un l’autre » n’implique pas toujours la réciprocité. Voir, par exemple, Matt. 24:10; Luc 12:1; 1 Cor. 7:5; 11:33.)
Se soumettre l’un à l’autre par révérence pour Christ signifie que nous nous soumettons à ceux dont la position implique une autorité sur nous
Une autre signification d’Éphésiens 5:21 ne rend pas justice au grec. Le mot utilisé pour soumission (hypotasso) n’est jamais utilisé dans le Nouveau Testament pour parler d’un amour en général et du respect pour les autres. Hypotasso apparaît 37 fois dans le Nouveau Testament en dehors d’Éphésiens 5:21, et fait toujours référence à une relation dans laquelle une partie a autorité sur l’autre.
Ainsi, Jésus se soumit (hypotasso) à ses parents (Luc 2:51), les démons se soumirent aux disciples (Luc 10:17, 20), la chair à la loi (Rom. 8:7), la création à la futilité (Rom. 8:20), les Juifs à la justice de Dieu (Rom. 10:3), les citoyens à leurs dirigeants et à ceux qui les gouvernent (Rom. 13:1, 5; Tite 3:1; 1 Pi. 2:13), les esprits des prophètes sont soumis aux prophètes (1 Cor. 14:32), les femmes dans l’église sont soumises (1 Cor. 14:34), les chrétiens le sont à Dieu (Héb. 12:9; Jacques 4:7), toutes choses le sont à Christ ou à Dieu (1 Cor. 15:27–28; Éph. 1:22; Phil. 3:21; Héb. 2:5, 8; 1 Pi. 3:22), le Fils l’est à Dieu (1 Cor. 15:28), les femmes à leurs maris (Éph. 5:24; Col. 3:18; 1 Pi. 3:1, 5), les esclaves doivent l’être à leurs maîtres (Tite 2:9; 1 Pi. 2:18); les plus jeunes aux anciens (1 Pi. 5:5), et les chrétiens aux serviteurs de l’évangile (1 Cor. 16:16). Nulle part dans le Nouveau Testament le verbe hypotasso ne fait référence aux vertus réciproques de patience, de bonté et d’humilité. Il y a toujours une partie ou une personne ou une chose qui doit s’aligner sous l’autorité d’une autre.
Note de l’éditeur :
Contenu adapté de Men and Women in the Church (Hommes et femmes dans l’église) par Kevin DeYoung, ©2021. Utilisé avec la permission de Crossway.