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Le monde est post-moderne, hyper-moderne, post-chrétien ou post-vérité. Choisissez votre expression, et plus important encore, choisissez le bon « post ». Quel que soit votre choix, ce qui est certain, c’est que la société change. Rien de bien radical dans cette affirmation. Le monde change, une nouvelle société émerge des ruines de la précédente. Certains accueillent une telle société avec inquiétude, d’autres avec une naïve indifférence. D’autres la célèbrent parce qu’elle marque une radicale indépendance de toutes religions, celles qui divisent et détruisent.

Que nous regrettions cette évolution ou non, il serait facile de penser que, enfin !, la société a terminé sa métamorphose. Dieu, les dieux, le surnaturel tant invoqué pour justifier tout et n’importe quoi, sont abandonnés. Tout ce qui dirigeait nos yeux et nos cœurs vers « autre chose », quelque chose de plus grand que nous, vers le « transcendant », a disparu, effacé par la créativité et la rationalité humaines.

Croire au destin

Et cependant…

Certains sondages suggèrent que ce n’est pas le cas. Si les religions traditionnelles sont en déclin, cela ne signifie pas que toute impulsion religieuse a été étouffée. Ce n’est pas le cas. Elle a cependant trouvé une autre manifestation. Les croyances alternatives à l’astrologie, aux autres médecines, à la réincarnation, etc., sont maintenant courantes. Une autre alternative aux religions traditionnelles et organisées est le renouveau des religions traditionnelles.

Tout ce qui dirigeait nos yeux et nos cœurs vers « autre chose », quelque chose de plus grand que nous, vers le « transcendant », a disparu, effacé par la créativité et la rationalité humaines.

Un sondage de 2018[1] met en lumière quelque chose de surprenant : nos contemporains ont une forte tendance à croire au « destin ». Il ne faut pas croire que c’est le cas seulement dans les pays « religieux » ou pour les personnes qui se disent « croyantes ». Voilà le plus surprenant : dans les pays d’Europe occidentale ou seulement 10% des personnes se disent « très religieuses » (entendez « je vais à l’Eglise plusieurs fois par mois »), la croyance au « destin » est partagée par 30% des personnes !

Plus spécifiquement : en Belgique, où seulement 10 % des adultes se disent « très religieux », 49% croient au « destin ». En Allemagne, où seulement 12% des adultes se disent « très religieux », 31% croient au « destin ». Les chiffres sont comparables en Suisse (12% et 28%), au Danemark (8% et 36%) et au Royaume-Uni (11% et 25%). En France, 12% des personnes sont « très religieuses » et 31% croient au « destin ». Même si certaines personnes peuvent être croyantes (en telle ou telle religion) et aussi croire au destin, tout cela doit nous faire réfléchir.

Il est plus naturel pour nos contemporains de croire au « destin » que de croire en Dieu !

Quel « destin » ?

Nos voisins croient au destin… si je simplifie un peu. Mais quel destin ? Et pourquoi est-ce tellement commun ?

Le destin pour la majorité de nos contemporains, c’est tout simplement croire que tout a une raison. C’est croire qu’il n’y a pas de hasard et que tout a une direction. Il y a une « force » qui détermine la tournure des événements. Cette force est impersonnelle, elle ne se contrôle pas, mais elle impose bien sa « volonté ». Il y a une forme de fatalité dans le « destin » auquel croient nos contemporains.

Étrange non ? Surtout dans un monde dans lequel plus de 85% de nos contemporains identifient comme valeur essentielle la liberté de choix individuel. Le plus important est de pouvoir prendre des décisions indépendamment, par nous-mêmes. Nous mettons en tête de liste, dans les valeurs humaines, le contrôle de notre vie. Et en même temps…  30% des gens croient qu’une volonté qui nous est indifférente (voilà qui est clé !), contrôle toutes choses.

Le destin est quelque chose qui va tellement à l’encontre de tout ce que nos contemporains cherchent, de ce qu’ils disent être important pour eux. Pourquoi alors croire au « destin » ?

Une première raison, c’est que nous n’aimons pas assumer nos responsabilités. Lorsque nous réussissons un examen, que nous avons une promotion « tant méritée », ou que nous décrochons un bon job… c’est « grâce à nous ». Nous sommes la raison de nos succès. Par contre, si je tombe malade, que je perds mon boulot ou que je rate misérablement mon dernier examen… « c’est le destin ». L’être humain déteste assumer ses erreurs. Cela vous rappelle quelque chose ? Invoquer le « destin » pour ne pas assumer sa faute, c’est faire la même chose qu’Adam et Eve… sauf que nous avons « sécularisé » Dieu en le transformant en vague force supérieure.

Le destin, c’est un exemple de la manière dont la présence de Dieu hante toujours l’existence humaine. Notre voisin peut avoir rejeté Dieu, il peut nier tous les aspects de la réalité de Dieu… mais il demeure créature de Dieu. Le Créateur, celui qui nourrit et soutien sa création et l’amène à sa plénitude, n’est jamais absent. Nos contemporains, qui ne croient pas en ce Dieu personnel et bienveillant, Dieu d’amour et souverain, ont sécularisé la providence de Dieu. Ils ont fait de l’action généreuse de Dieu, qui dirige tout vers le royaume, un vague destin impersonnel.

Invoquer le « destin » pour ne pas assumer sa faute, c’est faire la même chose qu’Adam et Eve… sauf que nous avons « sécularisé » Dieu en le transformant en vague force supérieure.

Il n’y a pas de hasard

Rien n’arrive par hasard, il y a toujours une raison. Voilà une vision contemporaine du destin. Peut-être que vous pensez que ce n’est pas si différent de l’obsession de certains chrétiens avec les « décrets de Dieu » ou la « prédestination ». Après tout, est-ce que ce n’est pas un fatalisme de croire que Dieu dirige toutes choses et que finalement, nous les êtres humains, n’avons rien à faire, aucune décision à prendre ?

Il y a une différence « radicalement absolue » entre le destin et la providence de Dieu. Le premier est totalement impersonnel. Le deuxième, Dieu, est tout l’inverse : il vous a créé, il désire que vous le connaissiez en Christ.

Je serai direct : si vous avez une telle vision des « décrets divins » ou de la providence de Dieu, il faut revoir votre vision de Dieu.

Lorsque nous parlons de la providence de Dieu, nous parlons de la manière dont le Dieu vivant, qui est créateur, qui est plein de compassion, qui désire la restauration du monde, et notre communion restaurée, dirige le monde. Il y a une différence « radicalement absolue » entre le destin et la providence de Dieu. Le premier est totalement impersonnel : il n’a que faire de vous. Il ne vous a pas créé, il n’a aucun désir ou plan pour vous, votre avenir ne le concerne pas. Le deuxième, Dieu, est tout l’inverse : il vous a créé, il désire que vous le connaissiez en Christ, il veut vous accompagner par son Esprit jusqu’à la venue de son royaume.

La providence, c’est l’action d’un Dieu plein d’amour et de compassion !


1. Eastern and Western Europeans Differ on Importance of Religion, Views of Minorities, and Key Social Issues,” October 29, 2018, Pew Research Center, https://www.pewresearch.org/religion/2018/10/29/eastern-and-western-europeans-differ-on-importance-of-religion-views-of-minorities-and-key-social-issues
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