Dans le dialogue entre la science et la foi, l’affaire Galilée cristallise souvent le débat. On pense y voir là une preuve que science et foi ne font pas bon ménage, et que la foi s’oppose à la science. Mais est-ce vrai ? Connaissons-nous vraiment les composantes de l’affaire Galilée ?
Transcription
Nous avons vu que la foi chrétienne permet et encourage même la science, et que d’ailleurs tous les grands noms qui sont à l’origine de la science moderne étaient chrétiens. Pourtant, l’affaire Galilée ne montre-t-elle pas que science et foi ne font pas bon ménage ?
Reprenons les faits. Nous sommes au XVIIe siècle et Galilée, un astronome catholique, déduit de ses observations que ce n’est pas le soleil qui tourne autour de la terre mais que c’est la terre qui tourne autour du soleil, ce qu’affirmait déjà Copernic quelques décennies plus tôt. Le problème c’est qu’à l’époque tout le monde croit que la terre est immobile que tout tourne autour de la terre, qui est le centre de l’univers. Cette idée, qu’on appelle géocentrisme, est conforme à la course du soleil que chacun peut observer dans le ciel, utile aux voyageurs et surtout concorde parfaitement à la lecture littérale de la Bible que l’Eglise Catholique défend. La thèse de Galilée s’appelle l’héliocentrisme et elle est contestée, tant par les savants que par les théologiens, dont certains intentent un procès contre Galilée. En 1616, le Saint-Siège condamne l’héliocentrisme comme hérétique. Quelques années plus tard, Galilée est pourtant autorisé à écrire sur le système héliocentrique, à condition de le traiter comme hypothèse. Galilée n’en tient pas compte et écrit un dialogue dans lequel il présente l’héliocentrisme comme décrivant correctement le monde et y rédige même une petite satire du pape. Il est jugé en 1633 et nie que son dialogue soit une défense de l’héliocentrisme. Il est alors assigné à résidence jusqu’à la fin de ses jours.
Que retenir de cette affaire ? Désamorçons d’abord quelques préjugés courants. Non, l’Eglise n’a pas torturé Galilée. Elle ne l’a pas condamné à mort. Elle ne l’a pas jeté en prison non plus, et non, Galilée n’était pas un ennemi de la foi mais un croyant convaincu et fermement engagé dans sa foi. Pour autant, il ne s’agit pas de dire que l’Eglise est irréprochable dans cette affaire. Ce n’est pas le cas, mais l’affaire Galilée n’est pas non plus le symbole du conflit science-foi que l’on croit. Qu’est-ce que l’Eglise reprochait vraiment à Galilée ? Certainement pas de faire de la science, non, mais au contraire d’affirmer la véracité d’une thèse qu’il était incapable de prouver scientifiquement, de vouloir remettre en cause l’interprétation des textes à partir de ces travaux non prouvés, de ne pas avoir respecté sa promesse de ne parler de l’héliocentrisme que comme d’une hypothèse et d’avoir menti lors de son procès en 1633. L’Eglise a condamné Galilée pour ces raisons et non parce qu’elle s’opposait à la science. On sait aujourd’hui que Galilée avait raison, c’est bien la terre qui tourne autour du soleil et non l’inverse. Pour autant, il est bien facile pour nous de juger les bons et les méchants de cette affaire, mais n’oublions pas qu’à l’époque des faits, Galilée ne parvenait pas à prouver sa thèse. Les plus grands scientifiques de l’époque, comme Tycho Brahe, n’étaient absolument pas convaincus. D’ailleurs, toutes les découvertes télescopiques de Galilée s’expliquaient également dans le système de Tycho Brahe.
Concluons avec ces mots de Lydia Jaeger : « Le Saint-Siège, dans son combat contre Galilée, ne militait pas tant pour la foi biblique que pour une théologie qui n’avait pas gardé ses distances critiques vis-à-vis de la science d’une certaine époque. » Vu sous cet angle, le procès de Galilée ne nous met pas en garde contre trop de Bible, mais contre trop de sciences, incorporée à la vision du monde promue par l’Eglise.