Dans un monde où les défis et les épreuves semblent omniprésents, comment réagissons-nous face au malheur qui nous entoure ? Que ce soit en observant les tragédies à la télévision, en écoutant les histoires de nos proches ou en croisant des personnes en détresse dans la rue, notre réaction révèle beaucoup sur notre humanité. À travers une réflexion profonde et sincère, plongeons dans le livre de Job pour découvrir comment l’humilité et la compassion peuvent transformer notre perception et notre réponse face à la souffrance.
Transcription
Transcription réalisée de manière automatique, merci de consulter l’original avant toute citation.
On vit dans un monde où il y a beaucoup de choses qui ne vont pas bien.
Je n’ai pas besoin de vous en convaincre.
J’ai un peu rigolé la semaine dernière d’un rire jaune quand j’ai vu sur les réseaux sociaux des gens qui disaient qu’avec l’envahissement du Capitole aux Etats-Unis, il avait suffi d’une semaine à peine pour que 2021 nous fasse oublier 2020.
On a vécu des choses difficiles et c’est sûr qu’on en vivra d’autres.
On a observé des choses difficiles autour de nous et dans le monde et on en observera d’autres.
Oui, il y a beaucoup de choses qui ne vont pas bien dans ce monde.
Et la question qu’on va se poser ce matin, c’est la suivante.
Comment réagir en général au malheur ?
Je ne veux pas dire comment réagir quand moi, personnellement, subjectivement, je fais l’expérience du malheur qui survient dans ma vie.
Mais comment réagir au malheur quand je l’observe autour de moi ?
Je regarde les infos à la télé et je vois que le coronavirus continue d’infecter des gens et de faire des morts.
Je vois que des soldats français se sont fait tuer au Mali.
Je vois que le climat continue de se dérégler.
Comment est-ce que je réagis ?
Est-ce que j’éteins la télé parce que je n’ai pas envie de voir ça et j’essaye de penser à autre chose ?
Est-ce que je me dis non, mais c’est sûrement exagéré, de toute façon les médias nous mentent tout le temps ?
Je suis sur mon lieu de travail ou dans l’amphi à la fac et je vois que les gens qui ont le micro promuevent l’immoralité et l’injustice.
Et tout le monde a l’air d’être d’accord.
Est-ce que ça me met en colère à l’intérieur et je passe mes journées à pester contre ces idiots ?
Ou bien est-ce que je me replie sur moi-même et je me coupe des autres pour m’épargner cette frustration ?
Je prends le café avec un voisin ou un ami et il m’apprend qu’il a perdu son travail, que son conjoint l’a abandonné, qu’il va devoir déménager avec ses quatre enfants dans un tout petit deux pièces et qu’il prend des médicaments pour ne pas sombrer dans la dépression.
Comment je réagis ?
Est-ce que je prends mes distances avec cet ami parce que sa souffrance me fait peur ?
Ou bien je suis en route pour l’église le dimanche matin et je vois des SDF allongés sur des matelas sous la voie ferrée alors que la température est en dessous de zéro.
Est-ce que je me dis au fond que ces gens ne doivent pas y être pour rien s’ils sont à la rue aujourd’hui ?
Est-ce que je me rassure quelque part en me disant ça ?
Comment je réagis ?
Je participe à la réunion de prière le mardi soir ou le mercredi soir et un chrétien demande la prière pour une situation familiale difficile, ou pour des problèmes de santé, ou pour des difficultés rencontrées au travail.
Est-ce que je réponds « oui, bien sûr, on va prier, qu’est-ce que ça doit être dur pour toi » alors qu’au fond je suis en train de me dire dans mon cœur « mais prends-toi en main, chochotte, c’est fatigant de t’entendre te plaindre tous les mardis soirs ».
Comment donc réagir en général aux choses qui ne vont pas bien dans notre monde quand on les observe autour de soi ?
C’est une question à laquelle on a déjà pu réfléchir dans le cadre de notre série de messages sur le livre de Job qu’on poursuit aujourd’hui et à laquelle on va revenir encore ce matin, mais un peu plus spécifiquement à travers le texte qu’on va lire et étudier dans un instant.
Alors c’est vrai qu’au fur et à mesure de notre étude du livre de Job, on peut avoir l’impression que les messages se répètent.
Et on peut trouver ça un peu lassant.
Pourtant tous ces textes ont des choses spécifiques à nous apprendre et la leçon du passage qu’on va regarder dans un instant, celui qui va nous intéresser aujourd’hui, la leçon de ce passage, honnêtement, est une leçon difficile.
Et c’est la suivante.
C’est qu’en observant le malheur autour de nous, on devrait être incité à une extrême humilité qui procède d’une extrême lucidité.
Ferme la bouche et ouvre les yeux.
Voilà le message de ce texte.
On va essayer de voir ce que ça veut dire en pratique pour nous aujourd’hui.
Mais si ça ne vous intéresse pas, ce matin, cette leçon, voici au moins ce qui pourrait vous intéresser.
C’est que ce passage, c’est un des deux seuls passages dans l’Ancien Testament où il est question explicitement de caca.
Et ça, je sais que ça a le potentiel d’en intéresser quelques-uns parmi nous.
Alors, comme on en a pris l’habitude ces derniers temps, on va lire le passage au fur et à mesure de la prédication pour essayer de mieux comprendre ce qui se passe dans ce texte.
On reprend donc là où on s’était arrêté la semaine dernière.
Les amis de Job sont en train de reprendre la parole, chacun à son tour, une deuxième fois pour faire des reproches à Job.
Ils sont persuadés que Job, cet homme sur qui le malheur s’est abattu, eh bien, il a sûrement fait quelque chose de mal pour mériter ça.
Mais Job, dans ses réponses, il s’en défend.
Il est persuadé, lui, d’être en réalité intègre devant Dieu.
Pas sans péché, mais intègre devant Dieu, confiant en Dieu et docile sous sa main.
Et ça, il l’a répété à la fin de sa réponse à Bildad, c’est le nom d’un de ses amis, à la fin du chapitre 19.
Il a même dit qu’il était persuadé que Dieu était son rédempteur, c’est-à-dire que Dieu lui était favorable et que, lui, Job serait ainsi justifié dans l’au-delà, au jour du jugement, alors que ses amis, eux, qui lui font des reproches, eux devraient s’inquiéter de ce qui leur arrivera à eux au jour du jugement.
C’est ça qu’il leur dit à la fin du chapitre 19.
Et il n’en fallait pas plus pour que Tsofar, le nom de son troisième ami, le pire des trois d’ailleurs, comme on l’a vu précédemment, pour qu’il se mette vraiment en colère.
On va voir qu’il est vraiment très vexé.
Il ne supporte pas que Job sous-entende que c’est lui et ses amis qui seraient en tort, Tsofar et les deux autres qui seraient en tort.
Et donc Tsofar réagit comme s’il était choqué que Job n’arrive pas à voir l’évidence même.
Mais Job, c’est grotesque, c’est tellement évident que ce qui t’arrive, c’est ce qui arrive aux méchants.
Mais n’importe qui t’en dira autant, Job.
J’en peux plus tellement tu es aveugle sur ta propre condition.
Et donc Tsofar va essayer de secouer Job en le forçant à voir le parallèle entre sa condition et celle ordinaire des méchants, d’après lui, d’après Tsofar.
Sa thèse, c’est que le bonheur ne dure jamais pour les méchants.
Et puisque le bonheur n’a pas duré pour Job, puisque sa prospérité a été momentanée et s’est évanouie, ça veut dire que Job est un méchant.
Tout simplement.
Alors lisons le texte.
Job chapitre 20, je vais commencer par les versets 1 à 11.
Tsofar de Nahama prie la parole et dit « Voici pourquoi mes pensées inquiètes me forcent à répondre.
À cause de l’agitation qui est en moi, j’ai entendu des reproches qui me mettent dans la confusion.
Le souffle de mon intelligence donnera la réplique.
Ne sais-tu pas que de tout temps, depuis que l’homme a été placé sur la terre, le souffle des méchants écourt et la joie de l’impime momentanée.
Quand sa taille s’élèverait jusqu’au ciel et que sa tête toucherait aux nuages, il périra pour toujours comme son ordure. »
Il est là le mot « caca » dans l’hébreu.
« Et ceux qui le voyaient diront ‘Où est-il?’
Il s’envolera comme un rêve et on ne le retrouvera plus.
Il sera chassé comme une vision nocturne.
L’œil qui le regardait ne le regardera plus.
Le lieu qu’il habitait ne l’apercevra plus.
Ses fils seront assaillis par les indigents et ses mains restitueront ce qui faisait sa fortune.
Ses membres étaient remplis de la vigueur de la jeunesse, mais celle-ci se couchera avec lui dans la poussière. »
Donc le texte est en train de nous montrer ici que Tsofar est vraiment trop sûr de lui.
Il est trop sûr de lui.
Il se précipite avec son arrogance et ses certitudes.
Il aurait dû se calmer, il aurait dû respirer un peu, il aurait dû réfléchir.
Et ça c’est notre premier point ce matin.
« Quand tu observes le malheur, remets-toi en question. »
Vous avez vu que Tsofar est tellement sûr de lui qu’il se croit habilité à faire des affirmations absolument catégoriques.
Et de la même façon, il se croit habilité…
Pardon, j’ai trop de cerise sur mon pupitre.
Il se croit habilité de la même façon à écraser sans concession son interlocuteur, son adversaire Job, non seulement en lui assénant des paroles tout à fait péremptoires, c’est-à-dire radicales, à l’emporte-pièce, mais aussi en se montrant lui-même tout à fait injurieux.
« Il périra pour toujours comme son ordure, et ceux qui le voyaient diront où est-il ? »
Verset 7.
Tsofar est en train de parler à Job.
Il est en train de parler de Job.
Et donc soyons clairs, il dit à Job qu’il est une grosse crotte et qu’il va finir au fond de la cuvette, et qu’on va tirer la chasse et après on va dire « Où est-ce qu’il est passé ? »
C’est très injurieux, vous comprenez ?
C’est choquant même.
C’est choquant, c’est pour ça qu’il n’y a pas beaucoup de passages dans l’Ancien Testament où il y a ce mot.
Mais imaginez que vous soyez convaincu que la Terre est plate, et que vous en discutiez avec quelqu’un qui est convaincu qu’elle est ronde, ou sphérique.
Il a beau vous présenter tous ces arguments pour vous convaincre que vous avez tort, et bien vous, vous n’en démordez pas.
Et vous lui reprochez à lui d’être naïf, et de juste croire sans réfléchir tout ce qu’il a toujours entendu et tout ce qu’on lui a toujours dit à l’école.
Et ça vous énerve !
En fait vous êtes frustrés, vous avez du mépris pour lui, qui s’est laissé embobiner par ce grand complot mondial.
Vous avez envie de vous moquer de lui, peut-être même de l’insulter.
Ben, Zophar il réagit un peu comme ça, c’est ce que le texte nous montre, que Zophar est trop sûr de lui.
En observant le malheur de Job, il aurait dû prendre un peu de recul et se remettre en question.
Et de manière similaire, nous aussi, on doit se remettre en question quand on observe le malheur autour de nous.
C’est très tentant de se précipiter pour interpréter une situation.
On veut très vite appliquer notre expérience et nos certitudes quand on voit un truc qui ne va pas.
On se positionne très vite, n’est-ce pas, quand on voit quelque chose à la télé, ou quand quelqu’un nous partage une difficulté qui traverse, ou quand on observe tout simplement que quelque chose ne va pas chez quelqu’un ou quelque part.
On veut se positionner très vite.
Mais on devrait plutôt ralentir.
On devrait prier si on est croyant.
On devrait faire taire nos passions.
Tenir en bride notre arrogance, dire non à nos impulsions, et se rappeler qui on est.
On est des êtres limités et faibles, et surtout des êtres faillibles.
Il y a un malheur, oui, et je ne suis pas un expert.
Donc premièrement, quand tu observes le malheur, remets-toi en question.
Deuxièmement, ne joue pas aux devinettes.
Sophar va donc continuer de s’adresser à Job, et après avoir montré à Job que la trajectoire de sa vie était celle de la vie d’un méchant, il va maintenant pointer le fait que si Job a perdu tout ce qui faisait son bonheur, c’est forcément parce qu’il a dû gagner ces choses de manière malhonnête.
Il y a un anguille sous roche.
C’est tout à fait évident pour Sophar.
C’est comme ça que ça se passe normalement.
Les méchants sont égoïstes et avides.
Leur but ultime, c’est d’avoir des richesses et d’en profiter un maximum.
Mais la justice veut que cette jouissance ne dure pas longtemps.
D’après Sophar, la douceur du péché devient amère dans le ventre.
Mais puisque Job est passé par là, puisque les choses qui procuraient à Job de la joie lui procurent maintenant de la souffrance, maintenant qu’elles ont disparu, c’est parce que Job a dû pécher.
Il a dû pécher pour se procurer ces choses, au départ.
Elle procède sûrement, ces choses, d’un mauvais désir ou de plusieurs mauvais désirs.
Maintenant, Job reçoit tout simplement la rétribution de son péché, d’après Sophar.
Alors lisons la suite.
Et écoutez bien, parce qu’après avoir parlé de caca, Sophar va parler de vomi.
On est au chapitre 20, verset 12.
« Si le mal est doux à la bouche, s’il le dissimule sous la langue, le conserve sans l’abandonner, le retient au milieu de son palais, sa nourriture se transformera dans ses entrailles, elle deviendra au-dedans de lui du fiel de vipère.
Il a englouti des richesses, il les vomira, Dieu les arrachera de son ventre.
Il suce le venin des vipères, la langue du cobra le tuera.
Qu’il ne fixe plus les regards sur les ruisseaux, sur les fleuves, sur les torrents de miel et de crème.
Il rendra ce qu’il a péniblement acquis et ne l’engloutira plus.
Des biens de son commerce il ne jouira plus, car il a écrasé, délaissé les indigents.
Il a ruiné une maison qu’il ne reconstruira pas.
Il n’a pas connu d’accalmie dans son avidité, dans sa convoitise il ne laisse rien échapper.
Rien n’était soustrait à sa voracité, mais son bien-être ne durera pas.
Le texte nous montre maintenant que Tsophar est en train de juger les motivations secrètes de Job.
Il lui reproche un péché que lui ne peut pas observer directement.
Il suppose que Job, qui était si prospère, avait gagné cette stature, cette prospérité, par des procédés suspects et avec des motivations mauvaises.
Il devine ce qu’il y a dans le cœur de Job.
Tu aimais le mal Job, parce que ça te procurait du confort et du plaisir, j’en suis sûr.
Tu as triché pour devenir riche et puissant.
Tu étais motivé par la convoitise.
Dans ta voracité, Job, tu as dû exploiter les vulnérables pour t’enrichir.
Et bien voilà Job, tu récoltes maintenant ce que tu as semé.
On comprend évidemment que Tsophar est complètement à côté de la plaque.
Mais le problème qui est souligné en particulier, c’est qu’il s’égare Tsophar en supposant des choses qu’il ne peut pas vérifier.
Il fait un procès d’intention à Job.
Il pense qu’il voit dans son cœur et qu’il peut dénoncer le mal qu’il y a dedans.
Mais nous, on sait qu’il fait un très mauvais diagnostic, parce que nous, on a lu le reste de l’histoire, on a lu Prologue notamment.
Et vous pouvez demander aux médecins qui sont dans notre église, si on fait un mauvais diagnostic, ça peut être très grave à la fin, pour le patient.
Les bons médecins, normalement, ils ne jouent pas aux devinettes.
Voyons, voyons, vous avez mal au ventre ?
Là ?
Ah !
Je parie que vous avez trop mangé de galettes des rois cette semaine.
C’est bien ça, hein ?
Ah, c’est sûr.
Vous avez abusé de la galette, je le vois dans vos yeux.
Ça vous apprendra.
Eh bien tant pis pour vous.
Vous n’aviez qu’à vous retenir.
Ça vous servira de leçon.
Et pendant ce temps, peut-être que l’appendicite va empirer, se transformer en péritonite, qui elle-même pourrait provoquer la mort du patient.
Eh bien, Tsophar non plus, dans notre texte, n’aurait pas dû jouer aux devinettes.
Et nous non plus, quand on observe le malheur autour de nous, on ne doit pas jouer aux devinettes.
C’est très tentant, quand on voit des choses qui ne vont pas bien autour de nous, de nous positionner sur le pourquoi de l’affaire.
Mais on n’a presque jamais, pour ne pas dire simplement jamais, on n’a jamais tous les éléments pour pouvoir le faire, pour pouvoir se positionner sur le pourquoi de l’affaire.
Surtout, c’est tentant d’expliquer le malheur en le rapportant à une faute, soit une faute morale, soit, sans aller jusque-là, tout simplement une imprudence.
Parce que c’est rassurant pour nous de se dire ça.
Mais s’il n’y a pas de faute évidente, on va facilement imaginer qu’il y a une faute sûrement dans le cœur de quelqu’un.
Une faute cachée, une faute secrète, une faute qui n’est pas avouée, ou qui est peut-être minimisée.
Peut-être même que c’est quelque chose dont personne n’a encore conscience, une faute involontaire et encore inconnue, mais que nous, on soupçonne.
Ou sans aller jusqu’à une faute, on va soupçonner, je le disais, l’imprudence, ou l’immaturité, la naïveté, le manque d’expérience, ou au moins une erreur, une défaillance, un défaut quelconque.
Il y a quelque chose qui cloche quelque part pour que ça aille mal comme ça.
Mais il ne faut pas faire ça.
Il nous est impossible de tout savoir, et donc il nous est impossible de donner une explication complète au malheur.
Et si ça, c’est vrai, alors on doit se montrer extrêmement prudent.
En observant le malheur, ne joue pas aux devinettes.
Troisièmement, descends de tes grands chevaux.
On revient au texte, toujours en chapitre 20, qui est en train de nous rapporter les paroles que Zophar adresse à Job, et qui est en train, ce texte, de nous montrer ce que Zophar fait de mal.
Et Zophar va conclure son intervention en prononçant tout simplement un jugement contre Job.
Zophar a établi le parallèle entre la condition de Job et la condition des méchants, et maintenant il décrit le sort qui est réservé aux méchants, c’est-à-dire le châtiment de Dieu, sous-entendu le sort réservé à Job.
Un châtiment que Zophar va décrire en des termes absolument horribles.
Et ce qui doit nous frapper, c’est que Zophar se permet de parler avec une grande autorité du jugement de Dieu lui-même.
Zophar, vous allez voir, va faire des affirmations qui engagent Dieu, qui engage le ciel, qui engage l’éternité.
Zophar, il se prend pour un prophète, tout simplement, et il prononce la condamnation de Job.
Mais il n’aurait jamais dû monter sur ses grands chevaux comme ça.
Regardons le texte, chapitre 20, la suite, verset 22, à la fin du chapitre.
Au milieu de son abondance, il sera dans la détresse.
Toute action le rendra malheureux.
Alors qu’il se remplit le ventre, Dieu enverra sur lui l’ardeur de sa colère et fera pleuvoir sur lui des flèches qui pénètreront dans sa chair.
En la fuite, devant les armes de fer, l’arc de bronze le transpercera.
S’il arrache de son corps une flèche et une lame étincelantes de son foie, les terreurs viendront sur lui.
Toutes les ténèbres sont tenues en réserve pour ses trésors, un feu que personne n’attisera, le dévorera, et ce qui restera de sa tente en deviendra la pâture.
Le ciel révèlera sa faute et la terre s’élèvera contre lui.
Les revenus de sa maison seront balayés, remportés au jour de la colère de Dieu.
Tel est de la part de Dieu le lot de l’homme méchant, sous-entendu Job, et ce que de la part de Dieu il retirera de ses discours.
Donc, Sophar prononce la condamnation de Job en parlant pour Dieu.
Il dit que ce qui lui est arrivé à Job dans son expérience du malheur, c’est le châtiment de Dieu, c’est l’expression de sa colère.
Et encore, il n’a pas encore tout reçu.
Il dit même que toute la création témoigne contre lui, contre Job.
Sophar se donne une grande autorité quand même.
Et bien sûr, le texte est en train de nous montrer que Sophar ne devrait pas du tout parler comme ça, puisqu’on sait que Job est intègre en réalité devant Dieu.
Alors comme on l’a vu la semaine dernière, Sophar fait un peu comme Bildad, celui qui a parlé avant lui.
C’est-à-dire qu’il ne dit rien, à ce moment-là en tout cas, qui soit techniquement faux en soi.
C’est vrai que le mal est détestable aux yeux de Dieu.
Et c’est vrai que la justice de Dieu qui implique le châtiment, c’est quelque chose de redoutable quand on fait le mal.
Mais cette vérité est extrêmement mal appliquée dans cette situation.
Et voilà, puisque Sophar a fait un mauvais diagnostic en jouant aux devinettes, il administre un mauvais traitement, un mauvais médicament, ou plutôt un bon médicament, mais pas pour la bonne maladie, comme on le disait la semaine dernière.
Et vous savez très bien que ça peut être très dangereux de faire ça.
D’ailleurs, depuis des mois, on n’arrête pas de débattre sur la meilleure façon de traiter les patients atteints de la Covid.
Et au cœur de ces débats, il y a souvent des questions de médicaments.
Est-ce qu’on devrait traiter massivement les patients avec tel ou tel médicament ?
Ou bien est-ce que ce médicament présente des dangers, donc il ne vaut mieux pas les traiter avec ces médicaments ?
En fait, pratiquement tout médicament présente des risques d’effets secondaires ou de complications, et donc c’est la raison pour laquelle on veut vraiment s’assurer qu’on administre toujours le bon médicament pour la bonne maladie, parce que ce n’est pas anodin de prendre un médicament.
Ce n’est pas anodin non plus de dire quelque chose en réponse au malheur qu’on observe autour de soi.
Ce n’est jamais anodin de dire quelque chose en réponse au malheur qu’on observe autour de soi, mais on ne veut pas faire comme Tsofar, sous peine d’effets secondaires désastreux.
On doit descendre de nos grands chevaux, on doit tourner sept fois la langue dans la bouche avant de parler, on doit tourner sept fois ses pouces dans la poche avant de tweeter et de dire ce qu’on pense sur Facebook.
On ne doit surtout pas parler à la place de Dieu ou donner l’impression qu’on parle à la place de Dieu, c’est-à-dire prononcer à titre personnel un jugement en son nom.
Alors bien sûr, Dieu parfois habilite certaines personnes en certains contextes à prononcer un jugement en son nom.
Je pense par exemple à ce qu’on appelle la correction ecclésiastique.
Parfois les anciens sont appelés à prendre une décision, à parler au nom de Dieu.
C’est ce que le Nouveau Testament appelle le pouvoir des clés et ainsi de suite.
Je ne vais pas rentrer là-dedans.
Mais en tout cas, à titre personnel, on ne devrait pas prononcer un jugement au nom de l’Éternel sous peine de prendre son nom en vain.
C’est dur parce qu’on a envie de réagir avec force au malheur.
On peut être indigné par le malheur, et c’est normal.
Ou on peut être affligé et donc on a envie d’intervenir, on a envie de faire quelque chose, ça nous presse.
On a envie d’offrir une solution, on a envie de résoudre le truc.
Cette envie est parfaitement compréhensible.
Mais attention, attention, attention à l’impudence.
Je dis bien l’impudence, pas l’imprudence, mais l’impudence, c’est-à-dire l’outrecuidance quand on va au-delà de ce qui est correct pour nous.
Attention à l’excès d’audace que cette envie pressante peut produire.
Fais attention, fais gaffe.
En observant le malheur, ne te prends pas pour ce que tu n’es pas.
Remets-toi en question, ne joue pas aux devinettes et descends de tes grands chevaux.
À la place, arrête-toi et pleure.
Et c’est le quatrième point.
Maintenant c’est Job qui va prendre la parole à son tour et qui va répondre à Tsofar, chapitre 21.
Et voici ce qu’il va dire en gros, dans un premier temps, dans sa réponse.
Les amis, Eliphaz, Bildad, Tsofar, les amis, vous êtes venus pour me consoler.
Mais franchement, il vaudrait mieux que vous vous taisiez plutôt que de dire de telles énormités.
Je pense que vous n’avez pas bien compris la situation.
Je souffre horriblement alors que je suis innocent.
Dieu m’a envoyé le malheur, souverainement, il est souverain, il gouverne l’univers, c’est Dieu dans sa providence qui m’a envoyé le malheur alors que je ne le mérite pas.
Et cette réalité, mes amis, devrait vous stupéfier comme moi-même elle me stupéfie et me bouleverse.
Lisons chapitre 21, versets 1 à 6.
Job répondit, écoutez, écoutez mon propos, donnez-moi seulement cette consolation.
Permettez que ce soit à moi de parler.
Et quand j’aurai parlé, tu pourras te moquer.
Est-ce que pour moi ma plainte est contre un homme ?
Et pourquoi mon esprit ne serait-il pas impatient ?
Tournez-vous vers moi, soyez étonnés et mettez la main sur la bouche.
Quand j’en ai le souvenir, je suis épouvanté.
Et un tremblement saisit ma chair.
Juste après avoir dit ça, Job va ajouter un argument qu’on verra dans un instant pour expliquer pourquoi il ne croit pas à la thèse de ses amis qui est que le malheur serait le signe de la défaveur de Dieu et donc du péché dans la vie d’une personne.
On y viendra dans un instant, mais dans un premier temps, dans ces six versets là, Job décrit simplement ce que lui inspire sa situation étant donné qu’il est innocent.
Et il décrit ce que sa situation aurait dû entraîner comme réaction chez ses amis.
Ils auraient dû se taire et l’écouter et accueillir ses paroles.
Ils auraient dû en être étonnés, dit Job, et mettre la main sur leur bouche.
En fait, Job, il ironise un peu ici sur le fait que ses amis étaient venus de loin pour le plaindre et le consoler.
C’est ce que l’on découvre dans les deux premiers chapitres, dans le prologue de cette histoire, où ils ont entendu parler des malheurs de Job.
Ils viennent de loin pour le plaindre et le consoler.
Et Job ironise en disant maintenant, donnez-moi seulement cette consolation.
C’est-à-dire juste taisez-vous.
Ce sera mieux que tout ce que vous avez dit jusqu’à présent.
Alors Job ne sous-entend pas que ses amis n’auraient rien dû dire du tout.
Il sous-entend que le silence aurait mieux valu que ce qu’ils ont dit.
Vous comprenez la nuance.
Mais la réaction qu’ils auraient dû avoir, ce n’est pas le silence en soi.
C’est la stupéfaction en constatant que Job, un homme extrêmement intègre, est extrêmement affligé.
Alors qu’il est extrêmement intègre, il est extrêmement affligé.
Cette stupéfaction aurait pu être exprimée avec des mots.
Ce n’était pas interdit de l’exprimer avec des mots.
Job, lui, l’a exprimé avec des mots au chapitre 3.
C’est ce qu’on appelle une lamentation.
Et ça consiste tout simplement à s’étonner d’une situation.
Et ça consiste à déplorer cette situation.
C’est-à-dire, j’aime pas, j’aime pas cette situation.
Ça, c’est une lamentation.
Quand on voit quelque chose qui nous choque, c’est vrai que parfois ça nous laisse sans voix.
Mais souvent, on exprime notre étonnement, n’est-ce pas ?
Mon fils Augustin, Saint Augustin pour les intimes, qui a 6 ans aujourd’hui, peut-être qu’il écrira des livres plus tard, me fait rire à chaque fois qu’il voit un truc qui le surprend.
Ça peut être, et c’est souvent, en regardant par la fenêtre de la voiture en allant à l’école, par exemple.
Tout le monde est dans le silence relatif, et tout d’un coup, on entend une petite voix qui dit « What ? »
« What ? »
Parfois agrémentée d’un « T’es sérieux ? »
Et notre texte est en train de nous dire ici qu’il y a quelque chose dans notre monde qui devrait susciter chez nous ce genre d’étonnement.
« What ? »
On peut être innocent et souffrir.
Et en découvrant la situation de Job, ses amis auraient dû s’exclamer « What ? »
Job, ce gars connu pour son intégrité, est en train de souffrir à un tel point.
Ils auraient dû être stupéfaits, ils auraient dû s’arrêter et pleurer.
Et c’est vrai qu’ils ont sangloté au début.
Mais ils auraient dû continuer comme ça, et lamenter la condition de Job, et écouter ses lamentations à lui, et pleurer avec lui, et se tenir à ses côtés dans l’étonnement et dans la compassion, plutôt que de lui faire la morale.
Compassion, étymologiquement, ça veut dire en latin « souffrir avec ».
L’équivalent en grec, c’est la « sympathie ».
Compassion, en latin, « sympathie ».
En grec, « souffrir avec ».
Et nous aussi, quand on observe le malheur autour de nous, on devrait avoir cette réaction par défaut.
Non pas de nous précipiter pour dire quelque chose, pour donner une explication, pour proposer une solution, pour prononcer un jugement, mais de nous arrêter et de pleurer.
La souffrance existe.
Et elle est choquante.
Le malheur frappe.
Et il frappe même des innocents. 5 personnes sont mortes dans les émeutes à Washington.
C’est horrible.
On n’est pas habilité à expliquer ou à juger, mais on est habilité à s’arrêter et à pleurer.
À déplorer la souffrance, à se lamenter et à prier.
Des SDF dorment dans la rue en plein hiver, dans des températures en dessous de zéro.
Certains vont mourir cet hiver.
C’est choquant.
Arrête-toi et pleure.
Tu peux peut-être rien faire d’autre, mais au moins tu peux mettre la main sur la bouche et être épouvanté, comme dit Job dans ce texte, par la souffrance des malheureux.
Ton voisin tombe gravement malade, ton ami est abandonné par son conjoint, ton frère fait faillite.
What ?
Je suis stupéfait.
Et un tremblement saisit ma chair, comme dirait Job.
Pourquoi ?
Parce que le malheur existe dans ce monde et c’est une réalité scandaleuse.
Ce qui nous amène au dernier point.
Regarde la réalité en face.
On revient dernière fois au texte, et c’est donc Job qui est en train de répondre à Tsofar, et maintenant tout le reste de sa réponse va consister tout simplement à décrire une réalité dans notre monde que les amis de Job ne voyaient pas, ou bien qu’ils ne voulaient pas voir.
Je vous rappelle que leur thèse, leur présupposée aux amis de Job, qui fondent toute leur analyse de la situation et de l’expérience de Job, leur thèse c’est que le malheur frappe les gens qui ont fait quelque chose pour le mériter.
Mais la réalité que Job va leur décrire maintenant, c’est qu’en fait, ici-bas, la plupart des méchants sont rarement inquiétés pour leur méchanceté.
Lisons, à partir du verset 7 jusqu’à la fin.
Pourquoi vieillissent-ils, les méchants, et même reprennent-ils des forces ?
Leurs descendants s’affermient avec eux, en leur présence, et leur rejeton prospère sous leurs yeux.
Dans leur maison, c’est la paix et non la peur.
Le bâton de Dieu n’est pas contre eux.
Leur taureau est fécond, sans un succès.
Leur vache met bas et n’aborde pas.
Ils laissent courir leurs gamins comme le petit bétail et leurs fils prennent leurs ébats.
Ils élèvent la voix au son du tambourin et de la harpe.
Ils se réjouissent au son du chalumeau.
Leur jour s’achève dans le bonheur, mais en un instant, ils sont terrifiés par le séjour des morts.
Ils disaient pourtant à Dieu, « Écarte-toi de nous, nous ne voulons pas connaître tes voix.
Qu’est-ce que le Tout-Puissant pour que nous le servions ?
Que gagnerions-nous à le supplier ? »
Certes, leur bonheur n’est pas entre leurs mains.
Le conseil des méchants est bien loin de moi.
Mais arrive-t-il souvent que la lampe des méchants s’éteigne, que la misère fonde sur eux, que Dieu leur distribue leur part dans sa colère, qu’ils soient comme la paille emportée par le vent, qu’ils soient comme la balle enlevée par le tourbillon ?
Est-ce pour les fils du méchant que Dieu réserve son châtiment ?
C’est lui que Dieu devrait punir pour qu’ils le reconnaissent.
Ses yeux devraient contempler sa propre misère.
C’est lui qui devrait s’abreuver de la fureur du Tout-Puissant.
En effet, que lui importe sa maison après lui quand le nombre de ses mois est mesuré ?
Est-ce à Dieu qu’on enseignera la connaissance, à lui qui gouverne les êtres supérieurs ?
L’un meurt au sein de son intégrité, de sa tranquillité totale et de son insouciance, au lieu d’intégrité, il faut peut-être lire « prospérité », dans sa tranquillité totale et de son insouciance, les flancs chargés de graisse et la moelle des os remplies de sèvres.
L’autre meurt, l’amertume dans l’âme, sans avoir goûté au bonheur.
Ensemble, ils se couchent dans la poussière, et la vermine les recouvre.
Je connais bien vos pensées et les réflexions par lesquelles vous me faites tort.
Quand vous dites « Où est la maison du notable ?
Où est la tante qu’habitaient les méchants ?
Mais quoi, n’avez-vous pas interrogé les passants et voulez-vous méconnaître ce qu’ils prouvent au jour de la misère ?
Celui qui fait le mal est épargné, au jour où le courroux se déchaîne.
Qui lui reproche en face sa conduite ?
Qui lui rend ce qu’il a fait ?
Il est porté au cimetière, et l’on veillera sur son sépulcre.
Les mottes de la vallée lui sont légères.
Tout homme se laisse entraîner derrière lui.
Des gens sans nombre l’avaient précédé.
Pourquoi donc m’offrez-vous de vaines consolations ?
Ce qui reste de vos réponses n’est que tromperie.
Voilà donc en gros ce que Job est en train de dire à ses amis.
Regardez un peu autour de vous.
Premièrement, contrairement à ce que vous dites, les méchants connaissent le bonheur sur la terre, un bonheur durable.
Et en plus, ils obtiennent ce bonheur comment ?
Et bien précisément en rejetant ouvertement Dieu.
Versets 7 à 16.
Deuxièmement, ces méchants arrivent à la fin de leur vie sans jamais être châti pour leur méchanceté.
Alors qu’il y a des gens, à l’inverse, qui souffrent, mais qui ne sont pas forcément méchants.
Versets 17 à 26.
Troisièmement, mes amis, les méchants ne sont presque jamais inquiétés ou dénoncés.
Et même après leur mort, on continue de les admirer et de les honorer.
Versets 27 à 33.
Donc en conclusion, mes amis, Eliphaz, Bildad, Sophar, en conclusion, vous racontez n’importe quoi.
Verset 34.
Job invite ses amis à regarder la réalité en face.
Et en regardant la réalité en face, ses trois compères devraient revoir leur présupposé.
Non seulement les innocents souffrent, comme Job, mais les méchants prospèrent.
Telle est la réalité.
Et cette réalité devrait leur faire baisser la tête.
Non, le monde ne fonctionne pas selon un principe de rétribution mécanique, ce que d’autres appelleraient le principe du karma, où si tu fais le bien, tu es récompensé, si tu fais le mal, tu es châtié.
C’est comme ça.
Non, ça ne marche pas comme ça, parce que de toute évidence, le mal, ça paye bien, en fait.
En fait, on dirait bien que quand on rejette Dieu, ça rapporte de plus.
Et ça, c’est dingue, parce que le reproche que le diable avait fait concernant Job au tout début de l’histoire, c’était qu’il craignait Dieu pour obtenir quelque chose en retour.
Le diable avait dit que Job était fidèle à Dieu, certes, mais de manière intéressée.
Or, Job est en train de dire ici que ceux qui veulent vraiment connaître la prospérité, il ferait mieux d’être méchant plutôt qu’intègre et juste.
Vous comprenez ?
Et cette réalité, on la constate aussi aujourd’hui, non ?
Qui sont les gens les plus riches du monde aujourd’hui ?
Qui sont les gens les plus puissants ?
Qui sont les gens les plus étincelants dans ce monde ?
Qui sont les gens dont on parle dans les médias quand ils meurent et qu’on commémore même après leur disparition et dont on protège la tombe ?
Qui voit-on sur les affiches électorales ou en couverture des magazines ?
Est-ce que ce sont pour la plupart des gens honnêtes, qui craignent Dieu, qui respectent la loi, qui prennent soin de la veuve et de l’orphelin ?
Pas sûr.
Et donc, quand on observe le malheur autour de soi, on doit regarder la réalité en face.
Le malheur existe.
Et il ne frappe pas seulement les méchants.
On dirait même qu’il frappe moins les méchants.
On dirait que c’est cool de ne pas croire en Dieu et de chercher pour devenir riche, et d’exploiter les faibles, et de tromper son conjoint, et d’avoir une vie résolument centrée sur soi-même.
On a l’impression que c’est cool.
Mais regarder la réalité en face, ça ne doit pas nous conduire au cynisme non plus.
Oscar Wilde a dit, le poète irlandais, que le cynisme consiste à voir les choses telles qu’elles sont et non telles qu’elles devraient être.
Mais Job voit les choses telles qu’elles sont et pourtant ça ne le conduit pas au cynisme parce que lui a résolu, malgré tout, d’être quand même fidèle à Dieu.
Autrement dit, Job voit les choses telles qu’elles sont, mais il les voit aussi telles qu’elles devraient être.
Et à notre tour aujourd’hui, on doit regarder la réalité en face pour que cette réalité honnêtement nous fasse mal.
Comme elle fait mal à Job et comme elle devrait faire mal à ses amis.
On devrait regarder la réalité en face pour voir que cette réalité est effroyable.
On vit dans un monde profondément dysfonctionnel, brisé, où le malheur existe et où le malheur n’est pas corrélé à la moralité des gens.
Et si c’est vrai, alors quand on observe la souffrance autour de soi, ça devrait avant tout nous maintenir dans une forme d’effarement et de crainte.
Un peu comme quand on se trouve devant un volcan en éruption ou une tornade ou une avalanche.
C’est un truc horrible qui existe, que j’ai en face de moi.
Et ça me dépasse complètement.
Comment donc réagir au malheur quand je l’observe autour de moi ?
On l’a dit en introduction, la leçon de tout ce passage, c’est qu’en observant le malheur autour de nous, on devrait être incité à une extrême humilité qui procède d’une extrême lucidité.
Ferme la bouche et ouvre les yeux.
Voilà le message de Job pour nous.
Quand tu observes le malheur, remets-toi en question.
Ne joue pas aux devinettes, descend de tes grands chevaux, arrête-toi et pleure, et enfin regarde la réalité en face.
C’est un monde cruel que celui dans lequel on vit.
Bien sûr qu’il y a aussi beaucoup de joie autour de nous, beaucoup de plaisir à partager, beaucoup de bonheur avec un petit bait qu’on peut observer chez les gens.
Mais le malheur est aussi une effroyable réalité.
Il peut s’abattre du jour au lendemain, sans explication, sans cause qu’on puisse discerner, sans discrimination, sur des gens qui n’ont rien demandé à personne, et même sur des gens particulièrement faibles et vulnérables comme des bébés ou de jeunes enfants, ou bien sur des gens particulièrement fidèles à Dieu, qui l’aiment de tout leur cœur.
Le malheur et l’injustice sont là.
On y est confronté facilement tous les jours.
En réaction, on peut être tenté d’opter pour le déni, ou pour la colère, ou pour le repli sur soi, ou pour le jugement, ou pour le désespoir.
Mais ce texte nous dit d’opter pour la stupeur et la compassion.
Le problème, c’est qu’on ne peut pas tenir longtemps dans cette posture, sans avoir au moins quelques certitudes.
Et comme on l’a vu jusqu’ici dans cette série de messages, si Job est capable de persévérer dans son extrême affliction, sans tomber dans un désespoir absolu, ou sans devenir fou, c’est parce qu’il a des certitudes concernant le caractère de Dieu.
Et même dans notre passage, Job fait allusion à ce qu’il sait sur Dieu.
Il est persuadé que Dieu est juste, il est persuadé que Dieu est souverain.
Ça fait partie des raisons pour lesquelles Job est convaincu que Dieu exercera sa justice un jour, au moins dans l’au-delà.
Et donc Job peut persévérer, quand toutes les circonstances lui sont contraires, ici-bas.
Mais un des trucs qu’on a vu aussi dans le cadre de cette série, c’est que nous, en 2021, après Jésus-Christ, on est tellement mieux équipés que Job pour avoir des certitudes sur le caractère de ce Dieu juste et souverain qui gouverne notre monde cruel.
On sait, parce qu’on a toute la Bible, et parce qu’on a le témoignage de l’histoire qui nous précède, on sait comment Dieu a manifesté sa compassion et son amour pour les malheureux.
Et on sait comment il a accopié la rédemption sur laquelle Job comptait tant.
Dieu s’est approché lui-même des hommes, par Jésus-Christ.
Il a fait l’expérience lui-même de ce monde cruel, et il en a souffert lui-même, jusqu’à l’agonie et la mort de la croix.
Et là, il a pris sur lui la peine ultime de nos fautes qui nous séparaient spirituellement de lui, et qui avaient plongé notre monde dans le malheur et l’injustice et la souffrance.
Il a pris sur lui la peine de nos fautes, justement, pour que dans l’au-delà, si on fait confiance à Dieu, pour qu’on soit accueillis dans son paradis pour toute l’éternité, où, dit l’apôtre Jean, il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, plus de lamentation dans le paradis de Dieu pour tous ceux qui placent leur confiance en lui, sur la base de ce que Jésus-Christ a fait en mourant et en ressuscitant.
Car il est ressuscité des morts le troisième jour, et aujourd’hui, il est vivant, Jésus-Christ, et il prépare la place des croyants dans son royaume.
Il n’y a que cette espérance-là qui peut nous faire tenir en face du malheur aujourd’hui, et qui peut nous libérer pour regarder le malheur en face, regarder la souffrance dans les yeux, dans toute sa violence et sa laideur.
Il n’y a que cette espérance-là qui nous permet de nous lamenter, et de lamenter et de déplorer l’existence du mal, et de déplorer la présence de l’injustice et de la souffrance dans notre monde et dans la vie de notre prochain.
Il n’y a qu’avec l’espérance qu’on a en Jésus-Christ qu’on peut être libre de faire cela, et de continuer de le faire jusqu’au dernier jour.
Et tout cela avec une authentique humilité, parce qu’on ne comprend pas, mais on craint Dieu, qui est notre Sauveur.
Amen.
Seigneur notre Dieu, merci d’avoir, de t’être préoccupé de nous, de t’être soucié de nous, et de t’être approché de nous dans notre condition déchue, et d’avoir fait l’expérience de ce qui va mal dans ce monde.
En Jésus-Christ, Tu en as souffert.
Tu as porté le poids de nos fautes qui nous séparaient de Toi, pour nous présenter une issue, une issue de secours, si j’ose dire, pour qu’en te faisant confiance en retour, on puisse vivre dans l’espérance du paradis.
Et je prie Seigneur que Tu fortifies cette espérance dans chacun de nous aujourd’hui, pour les jours, les semaines, les mois et les années à venir.
Amen.
Alexandre Sarran est le pasteur de l’Église Lyon Gerland, une église réformée évangélique en cours d’implantation, située depuis 2011 dans un quartier de Lyon en plein renouveau. Après des études de musicologie qui l’ont conduit jusqu’à la maîtrise, Alexandre a fait sa formation théologique à distance avec la Faculté Jean Calvin (Aix-en-Provence). Alexandre est le mari (privilégié) de Suzanne, et le père (débordé) de six enfants.