Révolution et répétition
Vous avez peut-être déjà entendu ce trait d’esprit : Dieu nous a créés à son image, et depuis on lui rend la pareille en lui appliquant la nôtre. Si cela est vrai de notre vision de Dieu, ça l’est encore plus en ce qui concerne son Fils : nous aimons tous penser que Jésus voyait le monde comme nous le voyons, et que notre manière de vivre ressemble à la sienne lorsqu’il vivait sur Terre. La christologie adoptée par de nombreux chrétiens (et la plupart des non-chrétiens) se résume en cinq mots : Jésus était exactement comme nous.
Ce principe tend à s’appliquer tout particulièrement à la vision qu’avait Jésus des hommes et des femmes. Eh bien, préparons-nous à être surpris. Si Jésus n’a jamais « remis les femmes à leur place », il n’a pas non plus cherché à déloger les hommes de la leur. Il est un défenseur sans pareil des droits de la femme ; pour autant, sa position en faveur des femmes n’a jamais impliqué qu’il se positionne contre les hommes ou même contre la différenciation sexuelle. Il est très intéressant de noter que celui qui suscite la foi et la mène à la perfection pouvait interagir audacieusement et noblement avec les femmes de son époque et, en même temps, équiper les hommes pour leur rôle de leaders.
Un ministère révolutionnaire
Le contexte culturel dont Jésus était issu minimisait la dignité des femmes jusqu’à les dépersonnaliser. C’est dans ce cadre que Jésus affirme résolument la valeur de ces dernières et qu’il bénéficie volontiers de leur ministère essentiel. Il prend l’habitude (très rare à l’époque) de discuter librement avec les femmes – et en public, qui plus est (Lu 7.12,13 ; Jn 4.27 ; 8.10,11). De plus, il pourvoit fréquemment aux besoins de femmes qui souffrent, comme la belle-mère de Pierre (Mc 1.30,31), la femme courbée depuis dix-huit ans (Lu 13.10-17), celle qui était atteinte d’une perte de sang (Mt 9.20-22), ou la Syro-Phénicienne (Mc 7.24-30).


Les hommes et les femmes dans l'Église
Kevin DeYoung
Quand Dieu a créé l’humanité, il a fait des hommes et des femmes. Il importe plus que jamais de reconnaître cette vérité.
Créés l’un pour l’autre, mais distincts l’un de l’autre, l’homme et la femme ne sont pas interchangeables : ils sont conçus pour fonctionner selon une complémentarité divine. Lorsque cette conception est mal comprise, ignorée ou utilisée inadéquatement, les conséquences sont désastreuses.
Les hommes et les femmes se complètent mutuellement – particulièrement dans le mariage, mais aussi dans la vie en général. Cette vérité biblique est immuable et universelle. Du début à la fin, l’histoire biblique – ainsi que tout le projet de Dieu pour la création – dépend de la distinction entre l’homme et la femme. Les hommes et les femmes dans l’Église explique comment la complémentarité des hommes et des femmes, telle qu’elle a été divinement conçue, s’applique aux différentes facettes de la vie et, plus particulièrement, au ministère dans l’Église.
Non seulement Jésus a servi les femmes, mais il leur a aussi permis de le servir.
Non seulement Jésus a servi les femmes, mais il leur a aussi permis de le servir. Certaines ont oint sa tête, et il a reçu chaleureusement leur service (Mt 26.6-13 ; Lu 7.36-50) ; quelques-unes ont contribué financièrement à son ministère (Lu 8.2,3), et d’autres lui ont offert l’hospitalité (Lu 10.40 ; Jn 12.2). Bon nombre de femmes – Marie de Magdala, Jeanne, Susanne, Marie (la mère de Jacques et de Joseph), Salomé, Marie et sa sœur Marthe – sont nommées dans les Évangiles, ce qui indique leur rôle crucial dans le ministère de Jésus. Elles étaient également nombreuses à faire partie de la bande des disciples. Plus important encore, les premiers témoins de la résurrection de Jésus sont des femmes (Mt 28.5-8 ; Mc 16.1-8 ; Lu 24.2-9 ; Jn 20.1,2).
Un postulat radical sous-tend le ministère de Jésus : les femmes ont une valeur et un rôle immenses. L’exemple le plus éloquent s’avère celui de sa propre mère, Marie, à qui Dieu a accordé sa faveur (Lu 1.28). Par ailleurs, Jésus choisit des femmes pour illustrer ses enseignements : il mentionne la reine du Midi (Mt 12.42), la veuve de Sarepta (Lu 4.26), les femmes lors du retour de Christ (Mt 24.41), et celle qui avait perdu une pièce (Lu 15.8-10). Il présente la veuve persistante comme illustration de la persévérance dans la prière (Lu 18.1-5) et celle qui était pauvre, apportant son offrande, comme un exemple de générosité (Lu 21.1-4).
Jésus, plein de tendresse envers les femmes, les appelle « filles d’Abraham » et les place ainsi au même niveau spirituel que leurs homologues masculins (Lu 13.16). Son enseignement sur le divorce montre qu’il les considère comme des personnes et non comme des biens matériels (Mt 5.32 ; 19.9), et celui sur la convoitise rejette l’idée que les femmes ne seraient que de simples objets du désir sexuel (Mt 5.28). À une époque où il était suspect pour une femme de chercher à s’instruire, Jésus prend la peine d’enseigner à certaines d’entre elles, et ce, à plusieurs occasions (Lu 10.38-42 ; 23.27-31 ; Jn 11.20-27). En résumé, Jésus honore les femmes, les estime, les respecte, bénéficie volontiers de leur service envers lui, et les inclut dans son ministère de manière significative.
Jésus honore les femmes, les estime, les respecte, bénéficie volontiers de leur service envers lui, et les inclut dans son ministère de manière significative.
Un apostolat et un Christ masculins
L’honneur avec lequel Jésus traite les femmes est en accord avec le dessein originel de Dieu pour le leadership masculin. Conformément au schéma créationnel, l’attitude révolutionnaire de Christ envers les femmes ne va pas jusqu’à les inclure dans les sphères de responsabilité qui étaient prévues pour les hommes.
On ne peut pas simplement déclarer que Jésus se contente de suivre les traditions de son époque ; après tout, il n’a aucun problème à briser les tabous sociaux, raison pour laquelle il n’hésite pas à se mêler aux collecteurs d’impôts, à manger sans s’être lavé les mains, à redéfinir le sabbat, à réinterpréter la signification du temple, à condamner les pharisiens, et même à honorer les femmes ! S’il est vrai que Jésus renverse certaines des interprétations juives (notamment sur le divorce, la convoitise sexuelle et la rétribution), il ne rejette toutefois jamais l’enseignement de l’Ancien Testament (Mt 5.17). Jésus honore les femmes de façon contreculturelle sans pour autant abandonner les principes et les schémas fondamentaux que son arrière-plan juif et vétérotestamentaire lui a légués.
Jésus honore les femmes de façon contreculturelle sans pour autant abandonner les principes et les schémas fondamentaux que son arrière-plan juif et vétérotestamentaire lui a légués.
Certains s’opposent à ce raisonnement en soulignant que Jésus n’appelle que des hommes juifs à devenir apôtres. Par la même logique, les positions de responsables dans l’Église ne devraient- elles donc être occupées que par des personnes juives ? Non. Le fait que les apôtres aient été juifs est lié à un moment particulier de l’histoire du salut ; le fait qu’ils aient été des hommes, lui, ne l’est pas. Après la Pentecôte, le royaume que Jésus inaugure n’est plus réservé seulement aux juifs ; les non-juifs tels que Luc et Tite accèdent à des postes d’enseignant et de responsable. Si les premiers responsables de l’Église étaient juifs, c’est tout simplement parce que la communauté chrétienne avait le judaïsme pour terreau. Au fur et à mesure que la communauté s’étend pour inclure des non-juifs, le noyau de leaders change lui aussi de visage et fait de même. Le fait que le leadership soit masculin, au contraire, est une caractéristique essentielle qui, elle, ne changera pas avec le temps. Lorsque les disciples doivent choisir un successeur à Judas, les apôtres recherchent un homme qui ait été avec eux depuis long- temps (Ac 1.21,22).
Enfin, n’oublions pas de mentionner la réalité la plus évidente de toutes : Jésus était un homme. Cela ne signifie pas que Dieu soit un homme – l’éternel « grand barbu » dans les cieux. Malgré tout, la masculinité de Jésus n’est pas sans importance. Il était un homme tout comme les prophètes (publics), les prêtres et les rois d’autrefois, tout comme le premier Adam. Jésus était un homme, en tant que nouveau Moïse et nouvel Israël, en tant que personnage divin envoyé par l’Ancien des jours et en tant qu’Agneau parfait pour le sacrifice. Et lorsque Jésus reviendra comme un guerrier triomphant et un juge juste, c’est en tant qu’homme qu’il apparaîtra.
Aucun être humain n’a autant défendu la cause des femmes que Jésus ; et personne, au moyen de son exemple et dans sa propre personne, n’a autant œuvré que lui pour défendre la véritable masculinité.
Jésus, bien sûr, est venu sauver des hommes et des femmes. Mais en se présentant sous la forme d’un homme, il a littéralement incarné ce en quoi consiste la véritable masculinité : sauver, protéger, libérer, diriger, enseigner, et servir. Il semble donc logique que, tout en honorant les femmes et en les rendant aptes à servir dans le ministère, ce soient exclusivement des hommes qu’il sélectionne pour occuper des positions d’autorité. Aucun être humain n’a autant défendu la cause des femmes que Jésus ; et personne, au moyen de son exemple et dans sa propre personne, n’a autant œuvré que lui pour défendre la véritable masculinité.