Nous continuons notre série sur la parentalité aujourd’hui, en donnant la parole à deux femmes très expérimentées : Catherine Dickson et Anne Kitt. Elles ont élevé leurs enfants, servi dans leur église locale, et sont aujourd’hui grand-mères. C’est pour bénéficier de la sagesse qui vient avec les années que j’ai voulu les rencontrer, et leur poser ces quelques questions.
Bonjour, Anne, bonjour Catherine ! Je suis ravie que vous preniez le temps de répondre à mes questions. Est-ce que vous pouvez vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Anne, je suis écossaise d’origine, en France depuis presque 44 ans, pour servir aux côtés de mon mari. Mariée depuis 49 ans, je suis mère de 3 enfants et grand-mère de 7 petits-enfants de 4 à 18 ans. J’ai eu l’occasion pendant de nombreuses années de connaître et cheminer avec des mères, surtout de jeunes enfants, et j’ai constaté qu’elles ont souvent les mêmes questionnements au sujet de la parentalité !
Je suis Catherine, mère de 3 enfants aujourd’hui jeunes parents, et grand-mère de 7 petits enfants. J’ai toujours été très intéressée par tout ce qui se rapporte à la famille, la conjugalité et la parentalité. Je ne voulais pas reproduire le modèle familial de mon enfance, sans vrai lien avec mes parents et avec une religion plus que superficielle. J’ai donc beaucoup lu tout ce que je trouvais comme littérature chrétienne sur le sujet du couple et de l’éducation. Plus tard je me suis formée en tant que conseillère familiale et conjugale pour pouvoir être utile aux couples de notre église.
Quels souvenirs gardez-vous des années de petite enfance de vos propres enfants ?
Catherine : J’ai apprécié les années d’enfance de nos enfants et les parties de fous rires aux repas, les câlins, les questions sur la vie, la foi… Mais à dire vrai, ce ne sont pas des années que je regrette. Ce furent des années assez fatigantes où la logistique est très prenante et quand je vois mes filles aujourd’hui gérer famille, travail, église au milieu de l’agitation d’une famille de petits, je me demande comment j’ai fait ! Et pourtant je l’ai fait aussi.
Anne : Comme Catherine, j’ai apprécié et j’aime me souvenir de fous rires, des bons moments passés ensemble. Nous aimions lire, faire des jeux… c’était une joie et un privilège d’être maman et c’est une joie et un privilège aujourd’hui d’être grand-mère. Tout comme pour mes enfants, j’aime voir chacun de mes petits-enfants grandir et avancer dans la vie, voir leur personnalité se développer.
La maternité m’a vraiment permis de développer ma relation avec Dieu, pour crier à l’aide, voir ce qui avait besoin d’être transformé, et me réjouir de Le voir à l’œuvre.
Catherine : En repensant à ces années, je réalise de plus en plus la grâce de Dieu qui a gardé nos enfants malgré les pièges de la vie et de l’adolescence, et les a guidés vers Lui malgré tous mes manquements et erreurs. La maternité m’a vraiment permis de développer ma relation avec Dieu, pour crier à l’aide, voir ce qui avait besoin d’être transformé, et me réjouir de Le voir à l’œuvre. Sans les enfants, je pense que je serais une personne très différente et beaucoup plus centrée sur moi-même et dans mes illusions.
J’entends beaucoup de jeunes femmes refuser la maternité pour des raisons de confort ou de peur de l’avenir. C’est vrai, les enfants, ça coûte, financièrement et émotionnellement. C’est vrai, l’avenir est incertain, mais ça l’a toujours été depuis le début de l’humanité !
Un enfant n’est pas un obstacle qui m’empêche de me » réaliser », de m’épanouir ; mais c’est justement en m’occupant de lui que je peux trouver une satisfaction et une joie profondes.
Anne : Je disais que c’est un privilège d’être maman, d’abord parce que ce n’est pas donné à toutes. J’ai vu la souffrance des amies chères qui auraient aimé être mamans, mais qui n’ont pas pu avoir d’enfants. Et puis c’est un privilège d’accompagner nos enfants par toutes les étapes de l’enfance et de l’adolescence, en partageant avec eux la joie de connaître Dieu. Dans les différentes circonstances de la vie, nous pouvons saisir les occasions de leur parler de la bonté, de la grâce, du pardon de notre Père céleste. Un enfant n’est pas un obstacle qui m’empêche de me » réaliser », de m’épanouir ; mais c’est justement en m’occupant de lui que je peux trouver une satisfaction et une joie profondes.
Catherine : Être parents nous a apporté beaucoup de joies et de larmes, mais ça nous a permis de mieux comprendre l’amour de Dieu le Père, de mieux voir notre péché, notamment d’égoïsme et d’orgueil, et notre besoin permanent de son pardon. Ça nous a permis de venir à lui dans les moments de crises et de nous remettre en question de nombreuses fois.
Anne : Je suis d’accord avec Catherine. Être parents nous aide à voir combien nous dépendons de Dieu, de la force et de la sagesse qu’il est prêt à nous donner.
Une situation en particulier m’a beaucoup frappée quand nos enfants étaient jeunes. J’étais désemparée, ne sachant quoi faire. J’ai demandé de l’aide au Seigneur, qui m’a répondu à travers sa parole. J’ai réalisé comme jamais auparavant combien Dieu est patient avec son peuple, et j’ai commencé à voir (au moins un peu !), sa patience envers moi. La réponse a été le chemin de la patience, avec l’aide du Seigneur pour avancer !
Pensez-vous qu’aujourd’hui, les parents font face globalement aux mêmes défis que vous lorsque vos enfants étaient jeunes ?
Les difficultés et défis de mon époque étaient les mêmes qu’aujourd’hui : équiper nos enfants pour vivre dans le monde tout en ayant des valeurs d’un autre monde, savoir se laisser remettre en question et venir à Dieu pour implorer son aide pour nous et pour eux.
Catherine : Les difficultés et défis de mon époque étaient les mêmes qu’aujourd’hui : équiper nos enfants pour vivre dans le monde tout en ayant des valeurs d’un autre monde, savoir se laisser remettre en question et venir à Dieu pour implorer son aide pour nous et pour eux. Savoir développer leur autonomie tout en les protégeant, en faire des disciples avec ce que nous sommes, apprendre à s’oublier soi-même et laisser Dieu utiliser cette école accélérée de sanctification…
Anne : Ce qui est universel, et surtout dans la petite enfance, est la difficulté d’ajuster sa vie aux besoins de quelqu’un qui dépend entièrement de nous. Ne pas se plaindre des nuits sans beaucoup de sommeil, des journées sans conversations intéressantes… Mais ce qui aide, c’est réaliser que c’est pour un temps. Le principal défi relevé est de s’occuper des enfants en les considérant comme notre service pour eux, et surtout pour le Seigneur, et donc de vivre dans l’amour et la grâce. Ce que je trouve crucial aussi est le défi d’enseigner la parole de Dieu (et surtout de montrer l’exemple !)
Avez-vous noté des défis qui sont présents aujourd’hui, mais que vous n’avez pas connus, liés au contexte actuel ? Des défis qui vous surprennent ?
Anne : Je constate plusieurs défis de nos jours, que je n’ai pas connus. Dès la grossesse, qui est beaucoup plus médicalisée, les parents peuvent se sentir assez stressés déjà avant l’arrivée de l’enfant. J’ai aussi remarqué qu’aujourd’hui la pression d’être des parents « parfaits » est très forte ! Il faut être parents parfaits, d’enfants parfaits. Cette pression ressentie a plusieurs origines, je pense, mais a pour conséquence que l’on voit la maternité comme une chose à travers laquelle on doit s’épanouir. Et lorsque les erreurs ou difficultés viennent, le sentiment d’échec vient enlever la joie qui pourrait rester au cœur de la vie d’une maman.
De nos jours, je vois aussi le défi pour les parents d’enseigner une façon de vivre qui est différente de celle de beaucoup de nos contemporains. Par exemple, comment ne pas gaspiller son temps devant un écran, que ce soit pour des jeux vidéo ou même son téléphone. Continuer à soutenir son enfant qui subit des moqueries parce qu’il ou elle est différent(e) de ses copains, camarades d’école.
Et surtout, je vois la difficulté d’insister sur la vérité de la Parole de Dieu, dans un monde où les valeurs chrétiennes sont bafouées.
Catherine : Le problème qui me frappe aujourd’hui, mais qui existait aussi il y a quelques années, c’est le problème des limites que les parents n’osent pas ou ne savent pas poser et qui laissent l’enfant devenir un enfant-roi qui peine à accepter les limites familiales et sociales.
Par contre je suis très heureuse d’avoir pu élever nos enfants avant l’ère d’internet et des écrans, et leurs lots de pressions dont Anne parlait, et la libéralisation de plus en plus forte des mœurs, qui à mon sens présentent d’énormes défis pour les parents d’aujourd’hui.
Selon vous, comment l’église peut-elle accompagner les parents ?
Catherine : L’église et les camps famille sont une aide précieuse pour les couples et les parents qui ont besoin de repères, d’aide et d’encouragements. Les groupes de prières de jeunes mamans aussi permettent de tenir ensemble avec des sœurs dans les mêmes situations que nous.
Et on ne le dira jamais assez, mais les camps chrétiens pour enfants et ados sont une aide pour les parents en renforçant sur un autre registre ce qu’on essaie de faire passer à nos enfants tout au long de l’année, et … ça donne des vacances aux parents pour se retrouver !
L’église peut être aux côtés des parents, et avant tout, en priant beaucoup pour eux !
Anne : L’église peut être aux côtés des parents, et avant tout, en priant beaucoup pour eux ! Je dirais que dans l’église, les chrétiens mûrs peuvent être d’un grand soutien en montrant un vrai intérêt pour les enfants et les jeunes.
Pour les questions brûlantes auxquelles les parents font face, comme la sexualité, le transgenre, le wokisme, l’église peut aider les parents à trouver les bons outils. Nous pouvons réfléchir en église à ces sujets et apporter des éclairages !
L’église locale a aussi un rôle d’enseignement, et doit apporter un enseignement clair sur les sujets d’actualité, et un enseignement clair au sujet des privilèges et responsabilités des parents. Quel beau et important rôle de l’église d’accompagner les parents qui le désirent, et qui l’acceptent, au moins !
Merci Anne et Catherine ! Pour finir, une dernière chose à dire aux parents qui se sentent un peu submergés ?
Catherine : On n’est pas des mères parfaites, mais Dieu nous a confié des enfants pour en faire des disciples. C’est un privilège et une responsabilité, mais nos enfants, comme nous, sont dans Sa main. C’est une vérité à ne jamais oublier.
Anne : Je conseillerais un petit verset écrit par l’apôtre Pierre: « Déchargez-vous sur lui de tous vos soucis, car il prend soin de vous. » (1 Pierre 5.7)