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À l’orée de cette nouvelle année, il pourrait, me semble-t-il, nous être utile de réfléchir ensemble sur la vocation humaine telle qu’elle nous est révélée dès les premières pages de la Bible. Notre Créateur, parfait dans ses desseins, pertinent et sage a conçu l’être humain pour sa gloire. Et c’est en entrant dans la vocation pour laquelle nous avons été conçus que nous manifesterons cette gloire.

Les années et les millénaires passent, mais la vocation de tout être humain ne change pas. Nous sommes non seulement de la même nature que nos premiers parents, mais aussi appelés à nous accomplir dans notre travail, notre obéissance et nos relations.

Dans le second chapitre de la Genèse, nous trouvons une vision approfondie et complémentaire du récit de la création qui ouvre une fenêtre unique sur la vocation humaine. En étudiant ce texte, trois thèmes essentiels émergent: le travail, l’obéissance et les relations. Ces éléments ne se contentent pas de décrire les premières étapes de l’histoire humaine, mais servent aussi à articuler une vision théologique durable de l’existence selon le dessein divin.

Le travail: Une bénédiction fondamentale

Dès le début de Genèse 2, le texte souligne que la terre ne portait pas de fruits, car «il n’y avait point d’homme pour cultiver le sol» (Genèse 2.5). Cette simple observation dévoile une vérité profonde: le travail est une composante fondamentale du plan divin pour l’homme. Contrairement à l’idée que le travail serait une conséquence directe de la chute (Genèse 3.17-19), ce passage nous enseigne que le travail précède le péché et qu’il était conçu comme un moyen de refléter l’image de Dieu. Jean Calvin relèvera la dignité de cette vocation. Ce sont cette dignité et valeur spirituelle qui font l’originalité de la conception calvinienne du travail. Comme l’écrit André Biéler: «Le travail est pour Calvin l’acte par lequel l’homme collabore avec Dieu dans la marche du monde et dans le développement du Royaume.» (Biéler, « La pensée économique et sociale de Calvin », 1959).

Le travail, dans son essence, participe à l’acte de création. Comme Dieu crée, façonne et maintient le monde, l’être humain est appelé à contribuer à cette transformation. Par exemple, dans Proverbes 6.6-8, la sagesse est illustrée par l’industrie de la fourmi qui prépare sa nourriture à temps. Cette même sagesse créative se reflète dans l’appel à cultiver la terre. Dans le Nouveau Testament, Colossiens 3.23 nous rappelle de travailler «de tout notre cœur, comme pour le Seigneur, et non pour des hommes». Ainsi, le travail devient un acte de culte, une manière d’honorer le Créateur.

Cependant, après la chute, le travail se complique et devient synonyme de labeur (Genèse 3.17-19). Néanmoins, l’intention originelle demeure: le travail, bien qu’éprouvant, reste un privilège qui permet à l’humanité d’exercer la domination bienveillante sur la création confiée par Dieu (Psaume 8.6-8).

L’obéissance: Une relation de confiance

Un autre élément central du plan divin se révèle dans l’instruction donnée à Adam: «Tu pourras manger de tous les arbres du jardin; mais tu ne mangeras pas de l’arbre de la connaissance du bien et du mal» (Genèse 2.16-17). Cette restriction divine soulève une question fondamentale: pourquoi imposer une interdiction dans un contexte parfait? La réponse réside dans la nature même de la relation entre Dieu et l’homme.

Cette limite n’est pas arbitraire. Elle constitue un appel à une obéissance volontaire, un acte d’amour et de confiance envers le Créateur. En respectant cette limite, Adam et Ève auraient affirmé leur dépendance étroitement liée à Dieu. Comme le souligne John Stott dans Basic Christianity, «l’obéissance n’est pas un esclavage, mais le véritable chemin vers la liberté. C’est en cédant à la volonté divine que nous découvrons notre identité et notre vocation». Cette même thématique est explorée ailleurs dans les Écritures. Dans Deutéronome 6.5, nous lisons: «Tu aimeras l’Éternel, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force.» L’obéissance jaillit de cet amour profond pour Dieu et devient une manière de démontrer notre adoration.

Dans le Nouveau Testament, Jésus lui-même incarne l’obéissance parfaite: «Il s’est humilié lui-même, en se rendant obéissant jusqu’à la mort, même jusqu’à la mort de la croix» (Philippiens 2.8). Cette obéissance parfaite rachète la désobéissance d’Adam, offrant une nouvelle possibilité de communion avec Dieu. L’appel à obéir dans Genèse 2, bien qu’il préfigure la chute, présente aussi la possibilité d’une vie centrée sur Dieu.

Les relations: Refléter la communion divine

Enfin, Genèse 2 nous rappelle que l’homme est fondamentalement un être relationnel. Dieu déclare: «Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Je lui ferai une aide semblable à lui» (Genèse 2.18). Cette affirmation, unique dans le contexte de la création, souligne que l’isolement n’est pas conforme au dessein de Dieu. L’être humain est créé pour vivre en communauté et dans des relations d’amour et de complémentarité.

La création d’Ève comme «une aide semblable à lui» met en avant la complémentarité et la coopération. Ce modèle de relation reflète la communion parfaite au sein de la Trinité, où chaque personne partage une union harmonieuse. Dans le Nouveau Testament, cette thématique est reprise dans Éphésiens 5.31-32, où le mariage est décrit comme une image du mystère de l’unité entre Christ et l’Église.

Au-delà du mariage, cette dimension relationnelle s’étend à toute la société humaine. Dans 1 Corinthiens 12.12-27, Paul décrit l’Église comme un corps où chaque membre a une fonction unique, mais interdépendante. Cette image souligne l’importance de l’unité dans la diversité, un reflet de la création originelle.

Conclusion: Un modèle pour la vie chrétienne

Le récit de Genèse 2 n’est pas simplement une description historique; il est une invitation à contempler le dessein de Dieu pour l’humanité. Le travail, l’obéissance et les relations ne sont pas des réalités isolées, mais des facettes interdépendantes de notre vocation. Ensemble, elles offrent une vision holistique de la vie chrétienne.

En réfléchissant à ces thèmes, nous sommes appelés à renouveler notre compréhension de ces domaines. Comment voyons-nous notre travail quotidien comme une forme d’adoration? Dans quelle mesure notre obéissance reflète-t-elle notre confiance en Dieu? Et enfin, comment cultivons-nous des relations qui reflètent l’amour divin?

Que ces questions nous poussent à chercher à vivre en accord avec le plan initial de Dieu, révélé dès les premiers chapitres de la Genèse.

C’est une invitation à considérer l’année qui est devant à la lumière de notre vocation humaine dans ces trois choix fondamentaux que sont le travail, l’obéissance et les relations. C’est là notre vocation, elle est divine.

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