Une conversation avec la bonne personne au bon moment peut tout changer. L’autre jour, je sortais d’une entrevue qui avait mal tourné. Je chancelais du mal être que je ressentais pour des circonstances totalement hors de mon contrôle quand j’ai décidé de parler à des amis qui avaient prié pour moi. Nous avons parlé, j’ai été entendu, et plus que tout, compris. Mais, pendant la discussion, je me suis rendu compte que mon attitude n’était pas complètement correcte. Chacun de mes amis a décelé les nuances de l’autosatisfaction, de prétention, et cette petite voix rebelle… Ces conversations ont poussé mon cœur à prendre le chemin du repentir et à user de compassion envers ceux qui m’avaient fait du tort. Une conversation sincère peut tout changer, surtout lorsque l’Esprit Saint est impliqué.
J’ai récemment écrit un article intitulé « L’unité différenciée fondée sur l’Évangile », dans lequel j’ai plaidé pour des relations fondées sur l’Alliance dans l’Église, qui reflètent et qui sont renforcées par ce que le Christ a fait pour nous. Nous n’avons pas besoin de nous conformer à l’image des attentes (réelles ou imaginaires) d’autrui, mais d’être libres d’être transformés par « le renouvellement de notre esprit » (Rm 12, 1-2). Nos interactions pourraient alors célébrer notre diversité avec nos frères et sœurs à l’image de celui qui a donné sa vie pour nous racheter. Je veux faire un nouveau pas dans la même direction en parlant des conversations. Plus précisément, je voudrais parler de la façon dont nos échanges pourraient être authentiques et assaisonnés de grâce comme une ancienne conversation que nous trouvons dans Genèse 1.26. C’est donc en suivant ce désir que j’aimerais commencer par le début.
Le théologien Louis Berkhof a trouvé des preuves convaincantes d’un Dieu en plusieurs personnes dans la conversation écrite en Genèse 1.26[1]. Pourrions-nous ainsi parler d’une conception de Dieu pour nos relations ? Dieu, dans le dialogue, révèle son plan pour créer l’homme à son image. Certains y entendent un enseignement sur la communion fraternelle et les relations en arrière-plan tandis que la Genèse expose l’histoire de la Création pour que tous puissent la contempler.
Nous devons nous souvenir de “ la terre sainte ” que nous foulons lorsque nous parlons de qui est Dieu. Il est tout à fait autre que nous. Dans les paroles de John Frame, Dieu est à la fois transcendant et immanent , signifiant qu’Il est avant tout, tenant tout ensemble et pourtant proche, connaissable car Il se révèle dans l’Écriture. Il a choisi de demeurer dans ses enfants adoptés par le Saint-Esprit. Il est un Dieu trinitaire, dans le sens du Crédo de Nicée, comme dit façon claire dans la Confession de la Foi Belge : “ […] Dieu qui est une seule essence, en laquelle il y a trois personnes réellement, et à la verité, et éternellement distinguées selon leurs propriétés incommunicables, savoir: le Père, le Fils, et le Saint-Esprit, […].[2] ” En d’autres termes, Jésus nous a dit que le Père parlait à travers le Fils (Jn 12, 49) qui est la Parole (Jn 1, 1) et révèle la vérité par l’Esprit (Jn 14, 26), comme il est la vérité (Jn 14, 6) comme le montre l’Ecriture (Jn 10, 7).
Dans Genèse 1,26, la version à la Colombe traduit la scène : “ Dieu dit: Faisons l’homme à notre image selon notre ressemblance… ” Si nous allons trop vite, nous risquons de manquer ce qui est de plus évident. Dieu parle. Mais ce n’est pas comme ma grand-mère, qui disait qu’elle se parlerait à elle-même parce qu’elle était la seule femme en qui elle pouvait avoir confiance. Il parle à quelqu’un. Il collabore. Cela ne peut être fait qu’avec quelqu’un et encore mieux avec quelqu’un qu’on aime. Comme l’écrit Vern Poythress : « L’amour caractérise les trois personnes de la Trinité. [… ] Ils existent dans une relation particulière entre eux, dans la communion de l’Esprit Saint ».[3] L’amour est au cœur de la conversation dans la création au moment où Dieu révèle comment il créerait l’homme. Nous voyons cela dans la façon dont Dieu continue à agir avec humanité, en particulier en envoyant son Fils pour les sauver.
Comme la Trinité parle avec amour et honneur à chaque membre ; comme porteurs d’image de Dieu, nous avons un exemple de relations.
Les paroles de la Genèse témoignent d’une relation permanente. Dès le commencement, Dieu a voulu que les hommes portent son image. Et si nous prenons l’exemple de la conversation et des origines de notre communion avec Lui, nous avons une idée de comment communiquer. Comme avec mes amis qui m’ont écouté et aidé même quand, au début je n’étais pas d’accord avec eux, notre conversation a donné lieu un changement de perspective basée sur l’amour. J’aime la façon dont Pierce Taylor Hibbs le dit : « Dieu est la Trinité auto-communicante, un être en trois personnes, dont chacune glorifie et aime éternellement les autres si profondément que nos reflets terrestres de gloire et d’amour pâlissent en comparaison. »[4] Cette langue parlée dans la Trinité devrait devenir la base de notre communion. Comme la Trinité parle avec amour et honneur à chaque membre ; comme porteurs d’image de Dieu, nous avons un exemple de relations. Etant donné qu’elle coule de Dieu, cette relation est alliancielle ; elle est respectueuse des autres dans l’amour que le Christ a répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit (Rm 5, 5).
Bien que nous ne soyons pas toujours d’accord, nous pouvons aller en profondeur. Cela prend du temps, de la patience et de l’humilité pour écouter ce qui pourrait être difficile à entendre.
Pour revenir à la nécessité d’une unité différenciée fondée sur l’Évangile, je crois que nous pourrions commencer par l’art de la conversation : un échange bilatéral d’idées dans le respect mutuel et l’amour fraternel. Cela ne veut pas dire que nous devons être trop gentils et affectueux, mes enfants diraient comme des Bisounours. Nous pouvons être naturels. L’humour est un outil puissant mais peut aussi être un dispositif de camouflage nous protégeant de la transparence. Bien que nous ne soyons pas toujours d’accord, nous pouvons aller en profondeur. Cela prend du temps, de la patience et de l’humilité pour écouter ce qui pourrait être difficile à entendre. Dans l’ensemble, nous avons besoin de l’œuvre de transformation de l’Esprit Saint pour apprendre à aimer davantage comme Jésus. Cela nous permettrait d’apprendre de nos différences sans méfiance. Le temps de la discussion pourrait nous changer nous, tout comme ceux qui nous écoutent. Nos vies pourraient être le témoignage qui correspond à nos paroles, et peut-être que d’autres pourraient vouloir se joindre à nous. « Faisons l’homme à notre image » est une conversation qui nous appelle à un niveau plus élevé de communication et de vie. Peut-être que, par la puissance de l’Esprit en nous, nous pourrions nous sentir en sécurité pour nous joindre les uns aux autres. Et peut-être alors, à travers notre conversation, pourrions-nous manifester l’amour de Jésus à ceux qui ne le connaissent pas encore.