C'est la période de Noël ! Et du retour de l'intérêt pour les prophéties de la venue du Messie. Ah, les airs familiers de « Douce nuit », « Les anges dans nos campagnes », et le bon vieux « Minuit, chrétiens ». Pour ceux qui vont à l'église, ils apportent un sentiment de chaleur et de douceur.
Et franchement, un peu de confusion.
Soyons honnêtes, la façon dont le Nouveau Testament utilise l'Ancien semble parfois un peu tirée par les cheveux. Ce que je veux dire, il est facile de voir, tout comme les scribes l'ont fait, que Michée 5.2 est une prédiction de la naissance du Messie à Bethléem (Matthieu 2.1-6). Mais, par exemple, Osée prédisait-il vraiment à propos de Christ simplement parce qu'il mentionne l'Égypte (Osée 11.1) et la fuite de famille de Jésus en Égypte (Matthieu 2.15) ? Si nous interprétions les Écritures comme Matthieu, nous serions bien vite chassés de la prédication à l'église et des études bibliques, non ?
L'utilisation de l'Ancien Testament dans le Nouveau est un sujet complexe. Même les érudits évangéliques ne sont pas d'accord sur tous les détails de la meilleure approche (voir par exemple ce livre et le commentaire qu'en fait D. A. Carson). Pourtant, il y a plusieurs principes, éclaircissements et rappels qui peuvent nous aider à comprendre l'utilisation apparemment aléatoire que les Apôtres font de l'Ancien Testament.
(La plupart des points suivants ont été glanés dans le chapitre de Doug Moo « Le problème du sensus plenior » dans « Herméneutique, autorité et canon » (“The Problem of Sensus Plenior”, Hermeneutics, Authority, and Canon) [révisé par D. A. Carson et John Woodbridge]. Une révision de ce chapitre par Moo et Andy Naselli sera incluse dans le volume 1 du « Projet des Écritures » (“The Scripture Project”) de Carson qui sera publié par Eerdmans en 2012. Jared Compton présente un grand nombre des mêmes points dans son excellent article sur Themelios « Intentions partagées ? Réflexions sur l'inspiration et l'interprétation en considérant la dualité des auteurs des Écritures ».)
1. Gardez à l'esprit l'objectif du Nouveau Testament lorsqu'il fait référence à l'Ancien. Nous pensons souvent qu'à chaque fois qu'il y a référence à l'Ancien Testament, cela signifie que l'auteur du Nouveau tente d'en faire l'exégèse. Mais il n'y a pas de règle infaillible qui stipule que l'auteur du Nouveau Testament doive toujours tenter de donner une interprétation correcte d'un passage. Il n'a peut-être même pas l'intention de donner une interprétation. Si quelqu'un me demande : « Comment va ton travail d'édition ? », et que je réponds : « C'est très fastidieux, ligne sur ligne, précepte sur précepte », cela ne veut pas dire que j'interprète le passage d'Ésaïe 28.10. J'utilise tout simplement le langage d'un passage familier.
2. Rappelez-vous que le Nouveau Testament utilise souvent l'Ancien simplement comme un véhicule d'expression. Les auteurs du Nouveau Testament connaissaient extrêmement bien l'Ancien. Il n'est donc pas étonnant qu'ils en emploient le vocabulaire. De la même manière, les Occidentaux pourraient utiliser une ligne de Shakespeare ou de la Bible parce que cela leur est familier, mais sans avoir l'intention d'expliquer son contexte ou son sens d'origine.
3. Le Nouveau Testament peut accentuer l'importance d'un passage sans essayer d'en expliquer la signification originelle. Par exemple, Moo parle de la référence à Deutéronome 25.4 (« Tu n'emmuselleras point le bœuf, quand il foulera le grain ») que Paul utilise dans 1 Corinthiens 9.9. Les critiques affirment que Paul cite la loi de Moïse hors de son contexte en disant que ce passage concerne le salaire des acteurs du ministère. Mais Paul a sûrement raison de tirer une conclusion juste sur ce passage et de l'appliquer à son propre contexte.
4. Nous devons admettre une vision plus large de l'idée « d'accomplissement ». Beaucoup de problèmes pourraient être évités si nous comprenions que l'utilisation du mot plēroō (accompli) ne signifie pas : « ce verset prédit que Jésus ferait ou dirait telle chose, ce qui vient juste de se passer ». Comme le dit Moo, « les citations sont utilisées dans le Nouveau Testament pour indiquer la relation rédemptrice et historique entre la nouvelle révélation paroxystique que Dieu donne par le Christ, et la révélation incomplète, préparatoire donnée à et par Israël » (191). En d'autres termes, « accompli » ne signifie pas que le texte de l'Ancien Testament en question est une prophétie directe. Par conséquent, la fuite de Jésus en Égypte accomplit Osée 11:1, non pas parce que Osée avait l'intention de prédire un voyage messianique vers le sud, mais parce que Jésus est le plus grand des Fils de Dieu et l'incarnation d'un nouvel Israël. Jésus fait son propre exode (comme j'en parlerai dans un autre article la semaine prochaine). Osée n'a pas prédit la fuite de la sainte famille vers l'Égypte, et Matthieu ne suggère pas que le prophète voulait le faire. Mais Matthieu voit bien que l'histoire de l'exode d'Israël, dont il est fait allusion dans Osée, est amenée à sa pleine révélation rédemptrice et historique par le Christ.
5. De même, certains passages de l'Ancien Testament sont accomplis de manière typologique. Ce qui est différent de l'allégorie. L'allégorie cherche un sens derrière le texte alors que la typologie trouve un sens développé enraciné dans le texte (voir Moo, 195). La passion de Jésus peut être considérée comme un accomplissement du cri du cœur de David dans le Psaume 22, non pas parce que David pensait qu'il prédisait la mort du Messie, mais parce que David, en tant que roi et ancêtre du Messie, était une image de Christ dont les prières ont anticipé l'abandon final de son plus grand fils.
6. Les prophéties de l'Ancien Testament sont pleines d'exemples d'accomplissement proche et lointain. Ésaïe 40, par exemple, était un mot de réconfort sur le retour de Babylone, mais plus tard, nous voyons qu'il concerne aussi Jean-Baptiste qui prépare le chemin du Messie (Marc 1:2-3). Une grande partie du témoignage prophétique prédit implicitement un avenir, voire un accomplissement souvent eschatologique. Ésaïe ne savait peut-être pas que ses mots au sujet de la vierge avaient une portée messianique, mais cela ne signifie pas qu'il serait surpris de l'apprendre. Israël attendait toujours le royaume éternel et le grand libérateur. Je pense que les prophètes avaient compris que ce qu'ils prédisaient concernait leur époque, mais que cela pouvait s'appliquer au futur aussi.
Deux autres questions
Les principes ci-dessus soulèvent deux questions épineuses :
1) Les auteurs de l'Ancien Testament en disaient-ils plus qu'ils n'en savaient ? C'est-à-dire, y a-t-il une signification dans certains textes de l'Ancien Testament que nous connaissons grâce au Nouveau, mais qui aurait été ignorée des auteurs ? D'excellents chercheurs tels que Walter Kaiser ont soutenu vigoureusement qu'il ne peut y avoir aucun double sens ou signification plus complète dans le texte de l'Ancien Testament. Kaiser a certainement raison d'insister sur le fait que de nombreux passages problématiques peuvent être « résolus » en accordant plus d'attention au contexte original et l'arrière-plan théologique, mais je suis d'accord avec Moo et d'autres qui affirment : « Dans certains passages, le Nouveau Testament attribue au texte de l'Ancien plus de sens que ce dont on peut légitimement penser que l'auteur humain avait conscience » (201).
Cela signifie-t-il que nous sommes condamnés à un « nihilisme herméneutique » ? Je ne le crois pas. Premièrement, toute interprétation des Écritures doit être limitée par les Écritures. De nombreux chercheurs défendent maintenant « une approche canonique » pour comprendre l'utilisation de l'Ancien Testament dans le Nouveau. La Bible est un ensemble littéraire. Dans un certain sens, l'Ancien Testament est un livre inachevé, incomplet. Mais une fois que l'ensemble est entier, nous sommes en mesure de mieux comprendre la signification des premières parties et de voir des choses que les auteurs du temps de l'« inachevé » avaient peut-être manquées. Deuxièmement, nous devons nous rappeler que rien de tout cela ne porte atteinte à l'intention d'auteur. Les auteurs du Nouveau Testament n'ont pas trouvé des significations dans l'Ancien que les auteurs originaux n'avaient jamais eu l'intention d'exprimer. Les auteurs humains n'avaient peut-être pas conscience de la plénitude de leurs paroles, mais n'oublions pas qu'il y a aussi un auteur divin. Sous l'inspiration de l'Esprit, les auteurs du Nouveau Testament ont pu comprendre l'intention qui peut ne pas avoir été pleinement connue par les auteurs humains de l'Ancien Testament. Le Nouveau Testament n'ajoute pas une signification qui n'est pas, mais seulement (et occasionnellement) une signification qui n'était pas flagrante pour la moitié de l'équipe de rédaction.
2) La deuxième question soulevée par cette discussion est de savoir si nous pouvons imiter l'herméneutique parfois employée par les auteurs du Nouveau Testament. Avec Moo, je répondrais un bon « ça dépend ». D'une part, nous ne disposons pas de l'inspiration du Saint Esprit pour connaître la pensée de Dieu de la même manière. Nous devrions donc être extrêmement prudent lorsqu'il s'agit de trouver des significations « plus complètes » dans le texte. D'autre part, nous devrions lire la Bible avec la même approche que nous voyons utilisée dans l'utilisation que le Nouveau Testament fait de l'Ancien : approche théologiquement informée, centrée sur le salut et l'histoire, avec une vue globale du canon (Moo 206, 210).
Leçons apprises
Une des leçons que l'on peut tirer de tout cela est que nous devrions éviter une approche simpliste de l'accomplissement Ancien-Nouveau Testament. Parfois, avec de bonnes motivations apologétiques et d'évangélisation, nous soulignons toutes les prophéties de l'Ancien Testament sur le Christ, puis les relions à une liste de tous les accomplissements dans le Nouveau. Il y a de la vérité dans cette démarche, mais si nous présentons les choses comme « voici la prédiction ; voici son accomplissement », nous risquons de semer la confusion. On peut même amener les gens à douter des témoignages prophétiques plutôt que de leur faire confiance. Toutes les prophéties citées dans le Nouveau Testament sont vraies et bien accomplies, mais tout cela est un peu plus compliqué (et en fait plus glorieux) que nous le laissons être parfois.
L'autre leçon est que nous ne devrions pas être gênés d'utiliser un zoom théologique en plus de notre bon objectif grammatical historique. Ce n'est pas une invitation à l'allégorie ou une raison pour chercher des significations spirituelles cachées comme Super Mario trouve ses champignons. Mais cela signifie que nous devrions, comme les auteurs du Nouveau Testament l'ont fait, lire la Bible à la lumière de toute la Bible. Nous devrions voir Jésus dans toutes les Écritures. Nous devons lire la fin, à la lumière du début et le début avec la vision de la fin. Par-dessus tout, nous pouvons nous réjouir de ce que Jésus est l'accomplissement parfait de tout ce qui a été imparfaitement préfiguré dans l'Ancien Testament. Rien qu'avec cela, l'histoire de Noël devient plus complète, plus profonde et plus riche.
Traduction : Myriam Legrand