Yannick Ethier, lors de la conférence Inébranlable Évangile 21, a discuté de la formation des anciens et de la création d’un climat de travail équilibré entre leadership fort et doux. Il a expliqué comment les anciens dirigent l’Église tout en consultant la congrégation. Yannick a également abordé la répartition des rôles spécifiques parmi les pasteurs et l’importance de la prière et des soins pastoraux dans leur ministère.
Transcription
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Bonjour Yannick, ça fait super plaisir de te voir, ça fait super plaisir que tu sois avec nous encore une fois pour la conférence Inébranlable Évangile 21.
Dis-moi, tu as parlé un peu de l’anciennat, du leadership de l’Église, etc.
Peut-être en deux mots, quels sont les grands concepts clés que tu as abordés?
On a parlé de comment est-ce qu’on forme des anciens, mais surtout comment on crée une atmosphère, un climat de travail où il y a à la fois un leadership fort, donc une direction, on assume notre rôle de diriger l’Église, et en même temps, il y a une vulnérabilité entre nous pour protéger l’Église en ayant de l’intégrité, donc c’est ouvert.
Comment on établit le rapport ensuite entre ce collège d’anciens-là et une Église qui doit apprendre à faire confiance et en même temps qui sera consultée puisqu’on demeure congrégationaliste ?
Donc dans notre vision des choses, les anciens sont appelés à donner la direction, mais cette direction, ils ne sont pas seuls à la discerner.
Ils vont aller aspirer par l’Église.
Oui, ils vont aller vers l’Église, ils vont valider, ils vont discuter avec l’Église pour dire « voici, on pense aller là, qu’est-ce que vous voyez?
Est-ce que ça va ?
Est-ce qu’on loupe des trucs ?
Comment vous le voyez sur le terrain ?
Comment vous l’expérimentez ? »
Alors tu es toi-même pasteur, avec un titre qui peut être un peu surprenant des fois pour nous français, on n’a pas beaucoup l’habitude de mettre des titres derrière « pasteur ».
Oui, oui.
« Enseignement, vision » et ça dit aussi quelque chose de votre façon de fonctionner dans l’ancien-là.
Vous avez des pasteurs avec des fonctions très particulières.
Vous ne faites pas tous la même chose ?
On ne fait pas tous la même chose à un certain niveau, puis en même temps on fait tous la même chose dans le sens qu’on est tous des pasteurs.
Alors lorsqu’on travaille ensemble, lorsqu’on s’assoit ensemble en réunion, tous ont la même voix au chapitre, personne n’est au-dessus d’un autre.
Mais en même temps, lorsqu’on exerce notre ministère au quotidien ou sur une base hebdomadaire, bien certains d’entre nous vont, par exemple, jamais voudraient me confier la louange, tu vois ?
Ce serait catastrophique.
Donc je ne suis pas pasteur de louange.
Donc tu es en train de dire que, grosso modo, vous partagez la même charge avec des dons différents ?
Oui, oui, avec des dons différents.
Et j’oserais dire parfois avec des niveaux de dons différents.
Donc tous les anciens sont appelés à l’enseignement.
Tous ne sont peut-être pas appelés à prêcher dimanche après dimanche devant une congrégation croissante.
Donc on y va aussi à la fois avec les dons, mais peut-être l’ampleur des dons qui vont aider à définir l’appel.
Mais cet appel-là est confirmé par le Collège des anciens.
C’est un discernement qu’on opère ensemble.
Et en tentant de dire cela, je suis en train de me poser une question.
Vous avez beaucoup d’anciens qui sont à plein temps.
Est-ce qu’il y a aussi des anciens qui sont salariés par ailleurs et qui sont anciens dans l’Église ?
Absolument.
Absolument.
Donc actuellement, on a à peu près 50-50.
Donc puisqu’on a une implantation et une réimplantation qui font partie, qui relèvent du même Collège d’anciens, on a, je crois, cinq pasteurs rémunérés par l’Église et cinq pasteurs, puisqu’on les présente aussi comme des pasteurs, des anciens, rarement des évêques, mais pour nous c’est la même chose.
Et donc au moins cinq qui ne sont pas rémunérés par l’Église du tout, qui ont un emploi à l’extérieur.
Écoute, nous on a un petit peu la même chose.
On est deux à être rémunérés et les autres ont un travail extérieur.
Mais des fois, il y a un petit truc, c’est qu’on a un peu plus de temps, on discute plus souvent ensemble, il y a besoin de réaligner, etc.
Est-ce que vous vivez un peu ces choses-là ?
Comment vous l’anticipez ?
On le vit et on le vit, je dirais, avec de plus en plus d’ampleur avec l’Église qui grandit.
Il y a une espèce de spécialisation qui vient avec le fait qu’on est là à temps plein.
Les gars le comprennent, mais il y a des conversations à avoir.
On doit chercher la face de Dieu pour dire bon, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas rémunérés par l’Église, il y a un moment où ils doivent dire les gars, on vous fait confiance.
Voici le champ de vos responsabilités, on tentera de ne pas s’ingérer.
Donc, on est en plein ajustement actuellement, puisqu’on sentait qu’il y avait des trucs qui ne roulaient pas rondement.
Il y avait peut-être trop d’approbation à aller chercher sur des trucs qui nous semblaient plutôt mineurs.
Alors là, on est en train de préciser l’ensemble du Collège des Anciens, rémunérés ou non par l’Église, soit responsable de confirmer, d’étudier la vision, les grandes questions doctrinales, les questions éthiques.
Et c’est tout.
C’est tout ce qu’on fait ensemble.
Mais les politiques, les développements de ministères, les approbations de projets, tous ces trucs-là relèveront plutôt du staff pastoral.
Donc, vous avez un Collège des Anciens, est-ce que vous avez aussi des diacres ?
Est-ce que vous avez un conseil qui est réuni, diacres et anciens ?
Comment le travail qui est fait par les anciens, qui est pensé, se diffuse ensuite dans l’Église ?
Alors, on a eu par le passé ce qu’on appelait un conseil d’Église.
Ça créait un souci chez nous, puisque ce conseil-là devait voter, devait prendre des décisions.
Et on se retrouvait avec une espèce de sénat, je ne sais pas si ça fait sens ici, une espèce de sénat qui pouvait finalement bloquer des projets.
Voilà.
Et donc, les diacres en venaient un peu par des fois à se positionner un peu comme des surveillants, tu vois, plutôt que de faire partie du processus de discernement.
On a dissous ça il y a plus de 15 ans.
Maintenant, les diacres se réunissent avec les anciens, avec même des leaders non-diacres, aux diaconesses dans l’Église, qui ont d’autres charges, plusieurs fois par année, 3-4 fois par année.
C’est plutôt une conversation qu’on a.
On partage les projets, on les écoute, on leur demande si c’est des trucs qu’on est en train de louper complètement.
Et un des pasteurs rémunérés est le pasteur des diacres.
Alors lui va plutôt s’assurer qu’on a toujours des diacres en formation, des diaconesses en formation, pour les qualifier sur le plan du caractère, mais voir aussi qu’ils sont généralement heureux, qu’ils sentent que la collaboration se fait bien avec les anciens, parce qu’un diacre ou une diaconesse pourrait relever d’un ancien selon le ministère où ils sont impliqués, mais en même temps, est-ce que ça se passe bien ?
Alors on a un pasteur qui supervise, disons, le service, les relations, tout ça, de l’ensemble des diacres-diaconesses.
Et ça, ça me fait penser à un autre sujet, qui est le sujet de l’autorité des anciens.
Jonathan Lehman essaye de discerner différents types d’autorités, notamment l’autorité de commandement, l’autorité de conseil.
Comment est-ce que ça joue ?
Comment tu vois ça dans le conseil d’anciens ?
Est-ce que c’est un sujet abordé où tout est uniforme ?
Donc ta question, c’est au sein du conseil ou dans le rapport entre le conseil et l’Église ?
Alors dans le rapport plutôt entre le conseil et l’Église.
On est congrégationaliste, donc à la fin de la journée, pour nous, la congrégation doit absolument donner son « Amen ».
En même temps, la congrégation n’est pas appelée à diriger, à donner la direction.
Et ça, je crois que c’est un sujet où on doit enseigner assez régulièrement à l’Église.
Une des belles qualités de l’Église, qui est aussi une de ses vulnérabilités, c’est que bien des gens qui n’ont trouvé aucun respect dans la société, aucune écoute, aucune validation, se retrouvent dans l’Église locale, appréciés, aimés.
Et donc parfois, il y a certains défauts qui viennent avec ça, certaines ambitions qui sont peut-être mal placées, manque de maturité.
Et donc, il faut enseigner à l’Église.
Selon nous, c’est comme ça qu’on l’expérimente.
Régulièrement, dire « Ce sont les anciens qui donnent la direction ».
Maintenant, si tu as l’impression que Dieu nous appelle quelque part, tu n’es pas sur le collège des anciens, nous voulons absolument t’écouter, t’entendre, parce que Dieu peut nous parler à travers toi, comme entre nous.
Mais après, on discutera ensemble les anciens, on priera, on étudiera les Écritures, puis on arrivera avec une direction.
Proposer à l’Église, c’est bien dit.
On annonce cette direction, mais on la validera dans le dialogue avec, premièrement, les diacres, les diaconesses, les leaders.
Ensuite, avec l’Assemblée.
Plus les décisions sont grandes, plus on se donne du temps pour dialoguer avec l’Assemblée.
Donc, interagir.
Généralement, lorsqu’on se présente pour un vote, ça sera quasi unanime, parce que s’il y avait quelque chose qui accrochait, les anciens en ont manqué de discernement, en écoutant l’Assemblée, on aura pu ajuster le projet, revoir.
Une question qui peut paraître un peu technique.
Quand on a une réunion d’anciens, on aborde plein de sujets.
Quelle est la part de temps que vous accordez à la prière, pour les membres, aux soins les uns des autres, à la formation, à la vision, à la décision ?
Est-ce que vous avez des règles ?
Est-ce que vous voyez souvent ?
Je souris parce que c’est un ajustement constant.
Une réflexion que j’ai eue dans les dernières semaines, c’est qu’on a un collège d’anciens qui, en 27 ans de ministère, je n’ai jamais eu un collège d’anciens aussi sage.
Et ce que je réalise, c’est que ça comporte de grands dangers pour nous.
La tentation de s’appuyer sur la sagesse du conseil, plutôt que sur la recherche de la face de Dieu dans la prière.
Et donc, la pensée qui me trotte dans la tête depuis quelques temps, je me dis que je pense que les anciens, on prend plus plaisir à discuter, à s’écouter, à prendre des décisions, qu’à crier à Dieu dans la prière, et à lui supplier de venir à notre secours, et de venir bénir tout ce qu’on entreprend.
Donc c’est un défi.
C’est un réel défi.
Maintenant, ce qu’on fait chez nous, c’est qu’on se réunit deux fois par mois l’ensemble du collège des anciens.
Une fois, c’est plutôt administratif, et probablement que c’est ça qu’on va diminuer, puisqu’on va déléguer davantage aux staffs pastoraux rémunérés.
Et l’autre fois, c’est de la prière et des soins pastoraux.
Chez nous, depuis quelques années maintenant, l’ensemble des membres de l’Église sont subdivisés en familles Espoir.
Et donc chaque ancien aura entre 25 et 30 membres, généralement des couples, donc peut-être 10-12 couples.
Et il a leur charge, non pas dans des groupes maison ou des trucs comme ça, mais plutôt comme évêque, de prendre soin, contact, prier pour eux tous les mois, c’est leur point de contact avec le conseil, s’il y a un souci, ça ne va pas.
Et donc lorsqu’on se réunit pour prier, on pose plutôt des questions.
Est-ce qu’il y a des inquiétudes, est-ce qu’il y a des situations dans ta famille Espoir que tu voudrais apporter à l’ensemble du collège des anciens, soit pour avoir de la sagesse, soit pour qu’on prie, soit parce qu’il y a une mesure disciplinaire qui est entreprise envers quelqu’un.
Est-ce que les membres sont conscients de dans quelle famille ils font partie, à quel ancien ils réfèrent, ou est-ce que c’est quelque chose de…
Non, non, ils le savent, dans le sens qu’on demande aux anciens de contacter les gens pour qui ils prient.
Lorsque je prie pour les gens dans ma famille Espoir, généralement je vais leur texter, je leur dis « je prie pour toi aujourd’hui, il y a du nouveau, il y a du développement, est-ce qu’il y a d’autres requêtes, il y a quelque chose qui se passe ?
» Et en même temps, tout ça n’est pas figé.
Donc si on se rend compte qu’un membre de l’église serait plutôt confortable avec toi, on fait des petits échanges de joie.
Ça marche.
Est-ce qu’il y a un sujet, quelque chose qu’on n’a pas abordé justement, c’est dommage, on aurait dû parler de ça.
C’est la question piège de la fois.
Oui, c’est la question piège.
Je pense que ce serait plutôt un encouragement.
Un encouragement à persévérer dans le temps.
Tu vois, on parlait de votre organisation ici.
Pour la conférence, je disais que l’organisation est extraordinaire, puis ta réponse a été quoi ?
La stabilité.
Une équipe qui est là, qui est stable.
Je crois que c’est le secret aussi pour le collège d’anciens.
Il y a beaucoup de chaos sur la route.
Il y a beaucoup de difficultés.
Il faut établir un climat de confiance.
Ça prend du temps.
Donc je ne crois pas nécessairement au ministère très prolongé comme le mien, 27 ans.
Je crois que ça dépend de l’appel de chacun.
Mais il faut être conscient que ça prend du temps pour développer ces climats de confiance qui vont faire que non seulement au collège des anciens, il va y avoir une belle confiance, un bel échange, de la transparence, mais avec la congrégation aussi.
Donc un minimum de stabilité, je crois, est garant d’arriver à un moment où vraiment il y a une synergie.
L’Église et le collège sont excités d’explorer les prochains projets que Dieu a pour nous.
Puis on veut ensemble se lancer là-dedans, plutôt qu’être dans un rapport où est-ce que vraiment nos anciens sont sages ?
Est-ce que vraiment on peut avancer avec eux ?
Ça, ça prend du temps.
Ça prend de la stabilité.
Merci beaucoup.
Et puis on espère que tu seras à nouveau avec nous dans deux ans à l’université de Dieu nous veut. – Ça serait une joie. – Merci.
Yanick Ethier (B.th, SEMBEQ) est marié à Esther depuis 24 ans et père de 2 jeunes adultes, Yanick exerce depuis 20 ans le ministère pastoral à l’Église l’Espoir, à Longueuil, où il est pasteur de l’enseignement et de la vision. Sa passion dans le ministère consiste à prêcher la Parole et à former des pasteurs. En 2011, avec un groupe de chers frères pasteurs, Yanick a eu le privilège de lancer SOLA. Il en est donc un membre fondateur. Yanick est aussi membre fondateur du Concile de Gospel Coalition Canada.
Jean-Jacques Riou est directeur des sites Évangile 21 et La Rébellution. Il sert en tant que pasteur à l’Eglise de l’Action Biblique à Étupes. Il est marié à Aude et père de deux garçons.