La fin du mois d’avril est passée, et avec elle les titres apocalyptiques qui annonçaient les soubresauts d’une troisième guerre mondiale. C’est vrai que les tensions entre la Syrie, les États-Unis et la Russie n’ont rien fait pour améliorer la situation internationale. D’autant plus si l’on ajoute une semi-légendaire poursuite de sous-marins britanniques dans notre toute proche Méditerranée.
Ce n’est pas la première fois bien sûr, que nous pensons avoir évité de justesse une autre guerre mondiale. Les fantômes des deux guerres mondiales du 20e siècle nous feront toujours lire les tensions internationales ainsi. Face à ces tensions, qui donnent l’impression d’être toujours grandissantes, quelle attitude avoir ?
Deux réactions
Il me semble que nous pouvons avoir, d’instinct, deux réactions. La première réaction , c’est d’idéaliser l’une des parties en présence. Certains verront la Russie comme le dernier rempart contre un capitalisme intégriste mené par l’Europe et les États-Unis. D’autres verront les pays occidentaux comme les seuls défenseurs de la lumière démocratique. Mais ne jouons-nous pas alors un jeu géopolitique qui, après tout, nous dépasse largement ?
Une deuxième réaction est possible : ne plus même s’intéresser à ce qui se passe dans le monde. Car en fin de compte les choses ne changent pas. Toujours, il y aura guerre civile, famine, violence, guerres et rumeurs de guerre. Je comprends cette réaction. Peut-être après tout vaut-il mieux s’en tenir à vivre notre foi fidèlement en priant pour, et espérant, le retour de Christ ?
Ces deux réactions ne résument à elles seules pas tout ce que nous pouvons penser de la situation politique actuelle. Mais elles reviennent constamment dans mes discussions, chez ceux que je fréquente régulièrement, et sur les réseaux sociaux. Mais ces deux réactions ne me satisfont pas. D’une part, je ne peux idéaliser le monde politique, et je réalise aussi que la politique internationale est beaucoup plus complexe et dépasse ce que j’en comprends. D’autre part, je ne peux fermer les yeux sur le monde dans lequel je vis. Essayer de le comprendre, c’est m’associer à ses tragédies, c’est nourrir mon empathie, et c’est encourager ma prière.
Ces deux réactions sont bien naturelles. Elles peuvent s’accompagner, ou être transformées par, d’autres attitudes.
L’humilité d’abord
La première attitude que nous devrions adopter, c’est celle d’une humilité devant la complexité du monde. Il suffit d’ouvrir un livre de géopolitique pour être frappé de la manière dont toutes les questions s’entremêlent. Les questions religieuses et ethniques nourrissent les tensions culturelles. Les oppositions personnelles entre dirigeants charismatiques nourrissent les tensions internationales. Essayer de résoudre un conflit dans une région du monde risque d’en déstabiliser une autre. De plus, les réalités économiques affectent souvent de manière significative les décisions politiques.
Nous devons prendre conscience, avant d’idéaliser une quelconque partie ,de la complexité politique, sociale, culturelle et religieuse du monde dans lequel nous vivons. Bienheureux celui qui aura saisi tous les enjeux du monde politique dans lequel nous vivons ! Nous devons aussi prendre conscience de la complexité de l’être humain. Nous sommes des êtres à la fois politiques et culturels, sociaux et religieux. Il nous est souvent impossible de distinguer nos motivations culturelles et religieuses. C’est ce qui conduit d’ailleurs à cette incroyable complexité ! Les êtres humains sont complexes. Nous ne sommes pas résumés à une ou deux motivations. Nous ne sommes pas que des êtres sociaux. Notre vue de la politique ne peut donc pas se résumer à une analyse sociale, ni même politique.
Enfin, nous ne devons pas oublier que si le monde ne nous semble parfois être qu’une suite de conflits, ceci est dû à la nature humaine. Nous sommes pécheurs. Tant que nous serons des êtres pécheurs, notre politique ne pourra qu’être un mélange de violence, d’injustice, et de solutions avortées. Normal donc que certains désespèrent. Cependant, par la grâce commune de Dieu, les dirigeants du monde sont aussi capables de décisions sages et justes. Nous l’oublions souvent, démonisant ainsi les dirigeants politiques.
Une citoyenneté spirituelle
Nous sommes des êtres humains, et nous pouvons donc bien sûr favoriser certaines options politiques, y compris dans la résolution de conflits internationaux. Mais nous sommes plus que de seuls êtres humains. Nous avons reçu une citoyenneté qui est premièrement spirituelle, dont les « arguments » sont spirituels. Les bénéfices acquis en Christ incluent entre autre dans le Nouveau Testament le pardon des péchés (Colossiens. 1.13-14), la justice, la paix et la joie (Romains. 14.17), la puissance de la foi et de l’amour (Éphésiens. 3.16), la connaissance de la volonté de Dieu et l’intelligence spirituelle (Colossiens. 1.9), l’adoption filiale (Galates 4.5), ou encore la réconciliation (2 Corinthiens. 5.18).
Si notre citoyenneté première est spirituelle, notre espérance politique l’est aussi. Ce que nous espérons premièrement, c’est l’établissement final et entier d’une plénitude politique dans laquelle Christ régnera en paix et en justice sur une monde restauré. Cette espérance doit soutenir et nourrir notre prière. Cette espérance doit guider la vision que nous avons du monde dans lequel nous vivons. Le seul monde « politique » dans lequel les conflits cesseront.
Bien sûr, cette citoyenneté spirituelle n’efface pas une citoyenneté secondaire qui est celle que nous avons en tant que membres d’un corps civil [1]. N’oublions donc jamais que nous restons « dans le monde » et que, dans la Bible, nous sommes encouragés à prier pour ce monde dans lequel Dieu nous a placés.
Prier, encore prier, toujours prier
Pour conclure, je crois que ce qui nous appartient, en tant que chrétiens, c’est la prière. La situation politique doit nous encourager à prier avec ferveur, et à prier pour plusieurs choses :
- Prions d’abord pour le retour de Christ et l’instauration de ce royaume de paix et de justice.
- Prions ensuite pour que Dieu, dans sa grâce, ou bonté commune, accorde de la sagesse à tous les dirigeants du monde.
- Prions que de notre côté, nous restions humbles dans une situation internationale qui nous échappe.
- Prions aussi que Dieu, par son Esprit, nous garde de tout désespoir, car le royaume premier qui est le nôtre est celui auquel nous appartenons en Christ.
- Prions pour que Dieu nourrisse en nous une compassion qui ne nous fera pas fermer les yeux sur les tragédies de notre monde.
[1] Rappelons-nous toujours que ce qui est premier ou « primaire » n’élimine pas ce qui est « secondaire » !