Nous publions une série de 3 articles sur le thème du complémentarisme : l’auteur relève 5 objections courantes soulevées contre le complémentarisme.
Objection 4 : des femmes dans le ministère dans la Bible
« Qu’en est-il de toutes les femmes engagées dans le ministère dans la Bible ? » peuvent nous dire certains. Le fait que des femmes soient dans le ministère n’est pas le problème (cela doit même être encouragé). Le problème réside dans le fait que des femmes sont dans des positions de ministère inappropriées. Certains chrétiens, bien entendu, affirment qu’il n’y a pas de rôle inapproprié pour les femmes.
Pour étayer leurs dires, ils font référence à ce qu’ils considèrent comme une myriade de femmes occupant des postes de direction dans la Bible. Par exemple, on pourrait argumenter que les commandements dans 1 Timothée 2 ne concernent que la situation à Éphèse, parce qu’un bon nombre de femmes dans la Bible enseignèrent et exercèrent l’autorité sur des hommes.
Le fait qu’il existe des interprétations concurrentes n’exclut pas que l’une d’entre elles soit juste ou du moins plus correcte qu’une autre.
Regardons brièvement certains des exemples les plus communs et voyons si ces femmes exercèrent le type d’autorité et furent engagées dans le type d’enseignement qui ne correspondent pas au modèle de la Genèse et aux activités interdites par Paul.
Déborah
Déborah semble être l’exception flagrante à la règle posée en 1 Timothée 2. Elle était prophétesse, et juge, et elle a supervisé une période de victoire et de paix en Israël (Jug. 4–5). Si Déborah remplit ces rôles importants, elle s’en acquitte de manière unique en tant que femme et de façon différente des hommes qui ont servi dans ces fonctions.
Tout d’abord, elle semble être le seul juge à ne pas avoir de fonction militaire. Au lieu de cela, Déborah reçoit l’ordre d’envoyer Barak (un homme) pour conduire les manœuvres militaires (4:5-7). Même lorsque Déborah accompagne Barak au combat, c’est lui qui conduit les 10 000 hommes dans la mêlée (4:10, 14-16).
Deuxièmement, elle reprend Barak qui insistait pour que Déborah aille avec lui comme tête de l’armée. Déborah a volontairement remis le commandement à Barak, puis lui a fait honte pour son hésitation (4:9). En conséquence, la gloire ne reviendrait pas à Barak mais à Jaël, la femme de Héber le Kenien (4:9, 22). Troisièmement, quel que soit le type d’autorité que Déborah partageait avec Barak, il ne s’agissait pas d’une autorité sacerdotale ou d’enseignement.
Des prophétesses
En plus de Déborah, plusieurs autres femmes sont appelées prophétesses dans l’Ancien et le Nouveau Testaments : Marie (Ex. 15:20), Hulda (2 Rois 22:14), Noadia (Néh. 6:14), Anne (Luc 2:36), et les filles de Philippe (Actes 21:8–9). Deux commentaires peuvent aider à replacer le ministère des prophétesses dans son contexte.
Premièrement, rappelons que la prophétie du Nouveau Testament n’était pas identique aux autres formes de ministère de la parole. Les prophètes d’une congrégation du Nouveau Testament recevaient occasionnellement des déclarations poussées par l’Esprit qui devaient être évaluées par rapport à l’enseignement accepté. Les filles de Philippe et les prophètes de Corinthe n’avaient pas le même ministère que les prédicateurs ou les enseignants faisant autorité.
Deuxièmement, dans l’Ancien Testament, où la prophétie est porteuse d’une autorité absolue, nous voyons des femmes prophétesses exercer leur ministère différemment des hommes prophètes. Marie exerçait son ministère auprès des femmes (Ex. 15:20), et Déborah et Hulda prophétisaient plus en privé qu’en public. En contraste avec des prophètes comme Ésaïe ou Jérémie qui proclamaient publiquement la parole du Seigneur qui s’imposait à tous, Déborah jugeait parmi ceux qui venaient vers elle en privé (Jug. 4:5) et elle instruisit Barak individuellement, alors que Hulda prophétisa en privé devant les messagers que Josias avait envoyés vers elle (2 Rois 22:14–20). Noadia, la seule autre prophétesse mentionnée dans l’Ancien Testament, s’est opposée à Néhémie avec le méchant prophète Schemaeja. L’exemple de Noadia, aussi désobéissante qu’elle ait pu être, ne nous apprend rien sur le dessein de Dieu concernant les femmes dans le ministère.
Priscille
Mentionnée trois fois dans le livre des Actes et trois fois dans les Épîtres, Priscille/Prisca était manifestement bien connue dans l’église primitive (Actes 18:2, 18, 26; Rom. 16:3; 1 Cor. 16:19; 2 Tim. 4:19). Elle est le plus souvent citée avant son mari, Aquilas, ce qui peut être significatif ou non.
Peut-être était-elle la plus importante des deux, ou peut-être s’est-elle convertie avant son mari, ou peut-être les disciples l’ont-ils simplement connue en premier (comme lorsque vous êtes amis avec Sally depuis longtemps et qu’elle épouse Joe, vous les appelez « Sally et Joe »). Quoi qu’il en soit, ils ont enseigné ensemble Apollos, un enseignant influent. Mais là encore, cet enseignement se faisait en privé (Actes 18:26). Priscille peut très bien avoir été instruite, sage et influente, mais il n’existe aucune indication du fait qu’elle exerçait une autorité d’enseignante sur des hommes.
Phoebé
Paul recommande Phoebé aux Romains en tant que diakonos de l’église de Cenchrées (Rom. 16:1). Cela peut signifier que Phoebé était une diaconesse ou qu’elle était plus généralement une servante. Le mot lui-même est ambigu. Dans un cas comme dans l’autre, rien n’indique que Phoebé la servante était une enseignante ou une dirigeante d’hommes.
Junias[1]
Paul envoie ses salutations à Andronicus et Junias et les salue comme « remarquables parmi les apôtres » (Rom. 16:7). Certains chrétiens se servent de ce verset pour affirmer qu’une femme peut exercer l’autorité sur des hommes parce que Junias (une femme) était un apôtre. Cet argument est mince pour plusieurs raisons.
Premièrement, il est vraisemblable que Junias (iounian en grec) est un homme et non une femme. Deuxièmement, « remarquable parmi les apôtres » suggère que Junias était tenue en haute estime par les apôtres, et non qu’elle était un apôtre. Troisièmement, même si Junias était une femme et était un apôtre, il n’est pas clair qu’elle ait été un apôtre comme les Douze. « Apôtre » peut être utilisé dans un sens moins technique pour dire un messager ou un représentant (2 Cor. 8:23; Phil. 2:25).
Évodie et Syntyche
Évodie et Syntyche (deux femmes) étaient des collaboratrices de Paul, qui avaient combattu à ses côtés pour la cause de l’évangile (Phil. 4:3). Rien ici n’implique l’enseignement ou l’autorité sur les hommes. Il y a des centaines de façons de travailler pour la cause de cet évangile sans violer les normes établies dans 1 Timothée et les modèles trouvés dans le reste de l’Écriture.
Sans nous en excuser, nous devrions pleinement affirmer le travail important qu’Évodie et Syntyche ont accompli, et que des millions de femmes continuent d’accomplir, pour la cause de l’évangile, sans penser que leur présence dans le ministère renverse d’une manière ou d’une autre l’enseignement biblique sur les hommes et les femmes dans l’église.
La dame élue
Certains soutiennent que la « dame élue » dans 2 Jean est le pasteur/ancien de l’église. La dame élue, cependant, n’est pas le pasteur de l’église ; elle est l’église. L’épître est non seulement bien trop générale pour être adressée à une personne spécifique (cf. 3 Jean), et l’imagerie féminine est non seulement souvent utilisée pour désigner l’église (cf. Eph. 5; Apo. 12), mais, de façon plus décisive, Jean utilise la seconde personne du pluriel tout au long de 2 Jean, ce qui indique qu’il n’a pas à la pensée un individu, mais un corps de croyants (vv. 6, 8, 10, 12).
Objection 5 : les dons et l’appel
Les femmes ont des dons spirituels essentiels, notamment des dons d’enseignement et de direction. Nous connaissons tous des femmes qui sont de grandes organisatrices, administratrices, communicatrices et dirigeantes. Personne ne veut gaspiller ces dons. Mais la Bible stipule certaines façons d’utiliser ces dons. Les femmes peuvent, et doivent, exercer de puissants dons d’enseignement, à condition que ce ne soit pas sur des hommes. Enseigner à des enfants et à d’autres femmes ne constitue-t-il pas un gaspillage des dons d’une femme ?
De plus, le fait que des personnes aient bénéficié de dons féminins mal utilisés (comme le fait d’avoir une autorité d’enseignement sur les hommes) est un argument basé sur les effets plus que sur l’obéissance. Le fait que Dieu nous utilise, alors que nous, en tant qu’église, semblons nous éloigner si fréquemment de sa parole, est un témoignage de la grâce de Dieu et non un modèle de ministère.
Dieu a béni l’enseignement public des femmes sur les hommes malgré elles, tout comme Dieu s’est servi de moi pour bénir les autres malgré moi. Dans les deux cas, le but est de connaître la vérité plus clairement et de s’en approcher davantage. « Mais ça marche » n’est pas la bonne mesure de notre fidélité.
Le fait que Dieu nous utilise, alors que nous, en tant qu’église, semblons nous éloigner si fréquemment de sa parole, est un témoignage de la grâce de Dieu et non un modèle de ministère.
De même, nous ne pouvons pas prendre de décisions concernant la direction de l’église en faisant appel au sacerdoce de tous les croyants. J’ai entendu dire : « Oui, oui, les prêtres de l’Ancien Testament étaient tous des hommes, mais cela n’a aucune incidence sur les modèles de direction du Nouveau Testament, car maintenant nous sommes tous ‘un sacerdoce royal’ et ‘une nation sainte’. » (voyez 1 Pi. 2:9) Il est vrai que nous – les femmes comme les hommes – sommes un sacerdoce royal.
Mais la description de l’église donnée par Pierre dans le Nouveau Testament n’était qu’une réitération de la parole de Dieu donnée au peuple au Sinaï quand il lui déclarait : « Vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte. » (Ex. 19:6) Le sacerdoce de tous les croyants est une idée de l’Ancien Testament (et il s’agit de notre sainteté collective, pas de nos dons collectifs). Si, dans l’Ancien Testament, un sacerdoce exclusivement masculin était compatible avec un royaume de prêtres pour chaque personne, il n’y a aucune raison de penser qu’une autorité exclusivement masculine est incompatible avec le sacerdoce des croyants dans le Nouveau Testament.
De même, l’appel à la vocation n’est pas très convaincant. Il y a quelques années, le périodique catholique romain First Things a publié deux essais sur l’ordination des femmes (pour et contre). La femme qui écrivait en faveur de l’ordination des femmes concluait son article en faisant appel au sens de la vocation :
« Beaucoup a été dit ici sur les raisons pour lesquelles il n’y a aucune raison de ne pas ordonner les femmes. Il faut encore dire un mot ou deux sur les raisons pour lesquelles il faut le faire . . . Comme l’a dit un jour Sœur Thekla : ‘La seule justification de la vie monastique réside simplement dans le fait que Dieu y appelle certaines personnes.’ De même, la seule justification de l’ordination des femmes réside dans le fait que Dieu y appelle certaines femmes. »
Bien qu’un appel puisse être honnêtement ressenti, faire d’un tel appel le facteur décisif est dangereusement subjectif. Je n’ai aucun problème avec le fait que des personnes qualifient leur vocation, pastorale ou autre, d’« appel », si elles entendent par-là simplement reconnaître un but spirituel dans leur travail. Mais en tant qu’outil de décision, essayer de discerner sa vocation à partir de sentiments et d’impressions internes est un guide incertain. La révélation objective de Dieu dans l’Écriture doit avoir la priorité sur notre compréhension subjective de la volonté de Dieu pour notre vie.
Contenu adapté de Men and Women in the Church (Hommes et femmes dans l’église) par Kevin DeYoung, ©2021. Utilisé avec la permission de Crossway.