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La sainteté de Dieu.

Vous pourriez soupirer, et je comprendrais, car, sans la Trinité, la sainteté a l’odeur de la boule à mites et l’aspect d’une matrone victorienne administrant de l’huile de ricin. Une grande partie de ce qui se prétend être de la sainteté a précisément cette impression: épineuse et puritaine. Les gens disent même: «Oui, Dieu est amour, mais il est aussi saint », comme si la sainteté était quelque chose dépourvue d’amour, le côté froid de Dieu l’empêchant d’être trop aimant.

Ce sont des balivernes, du moins si l’on parle de la sainteté du Père, du Fils et de l’Esprit. Non, dit Jonathan Edwards:

«La sainteté est une chose magnifique et adorable. Les hommes ont tendance à s’abreuver dès leur enfance de notions étranges de la sainteté, comme s’il s’agissait d’une chose ennuyeuse, sombre, aigre et déplaisante; mais il n’y a rien d’autre en elle que ce qui est doux et ravissant. C’est la beauté et la bonté suprêmes, bien au-delà de toutes les autres formes de beauté; c’est une beauté divine.» [1]

Qu’est-ce que la sainteté?

Mais qu’est-ce que la sainteté? Les mots utilisés dans la Bible pour désigner la sainteté ont pour signification première d’être «mis à part». Mais ce sont là que commencent les problèmes, car je pense naturellement que je suis adorable. Donc, si Dieu est «mis à part» de moi, je suppose que le problème réside en lui (et je peux faire tout cela de manière subtile et inconsciente). Sa sainteté ressemble à un rejet prétentieux de ma beauté saine et heureuse.

Oserais-je faire éclater ma propre bulle? Je le dois.

En réalité, c’est moi qui suis froid, égoïste, vicieux, plein de noirceur et de souillures. Et Dieu est saint – «mis à part» de moi – précisément parce qu’il n’est pas comme cela. Il ne se distingue pas de nous par son orgueil, mais par le fait qu’il n’y a pas en lui de laideur comme il y en a en nous.

«Dieu est Dieu», écrit Edwards, «il se distingue [c’est-à-dire qu’il est mis à part] de tous les autres êtres, et il les surpasse, notamment par sa beauté divine» (pour le lien entre la sainteté et la beauté, voir des versets tels que le Psaume 96.9).[2]

En quoi la Trinité façonne-t-elle la sainteté?

Or, la sainteté d’un Dieu en une seule personne serait tout à fait différente. Sa sainteté consisterait à se tenir à l’écart des autres. En d’autres termes, sa sainteté serait caractérisée par une distance absolue. Mais la sainteté du Père, du Fils et de l’Esprit est avant tout une question d’amour. Compte tenu de la nature de ce Dieu, il ne peut en être autrement.

Edwards le répète: «La sainteté et la félicité de la Trinité résident toutes deux en cet amour. Comme nous l’avons déjà démontré, la sainteté de tout être humain se résume essentiellement à aimer Dieu et à aimer son prochain; de même, la sainteté de Dieu consiste en son amour, en particulier dans l’amour entre le Père et le Fils et dans leur union parfaite et intime.»[3]

La sainteté du Dieu trinitaire est la perfection, la beauté et la pureté absolue de l’amour entre le Père et le Fils. L’amour de ce Dieu n’a rien de mauvais ou d’abusif – et c’est pourquoi il est saint. Mon amour est naturellement pervers et désaxé, mais le sien se distingue du mien par sa perfection. Ainsi, la sainteté du Dieu trinitaire ne freine ni ne refroidit son amour; sa sainteté est la limpidité et la pureté de son amour débordant.

Appelés à être saints

Tout cela a une incidence considérable sur ce que signifie la sainteté, la piété du croyant – en d’autres termes, ce que signifie ressembler à Dieu. La ressemblance avec un autre dieu serait tout à fait différente. Si Dieu est un être replié sur lui-même, alors, pour lui ressembler, il me faudrait être comme lui. Si le Dieu d’Aristote, en perpétuelle introspection, est Dieu, alors le nombrilisme semble être de mise.

En effet, ce que nous croyons être Dieu doit façonner notre piété et ce que nous croyons être la piété révèle ce que nous pensons de Dieu. Que se passerait-il, par exemple, si l’amour et la relation n’étaient pas au cœur de la nature de Dieu? Alors ils ne le seraient pas non plus pour moi qui cherche à grandir à la ressemblance de Dieu. Oubliez les autres. Si Dieu est seul et solitaire, devenez un ermite. Si Dieu est cruel et orgueilleux, soyez cruels et orgueilleux. Si Dieu est une sorte de dieu de la guerre, hypersexualisé, et un buveur excessif adoré des Vikings, soyez comme lui (ceci dit, abstenez-vous, je vous en prie).

Mais, avec ce Dieu, il n’est pas étonnant que les deux plus grands commandements soient «aime le Seigneur ton Dieu» et «aime ton prochain comme toi-même».

Car c’est cela être comme ce Dieu – partager l’amour que le Père et le Fils ont l’un pour l’autre et ensuite, comme eux, être débordant de cet amour pour le monde. Regardez, par exemple, Lévitique 19, où le Seigneur dit de manière notoire: «Soyez saints parce que moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint» (Lévitique 19.2). À quoi ressemble la sainteté? Elle consiste à ne pas se tourner vers les idoles, mais à venir au Seigneur avec des sacrifices appropriés (Lévitique 19.4-8). En d’autres mots, il s’agit d’être en communion avec le Seigneur. Cela signifie ne pas être hostile aux pauvres, ne pas mentir, ne pas voler, et ainsi de suite (Lévitique 19.10-16). Et encore, cela signifie: «Ne hais pas ton frère dans ton cœur… mais aime ton prochain comme toi-même» (Lévitique 19.17-18). L’amour pour le Seigneur, l’amour pour le prochain, voilà le cœur de la sainteté et la manière dont le peuple du Dieu trinitaire parvient à lui ressembler.

La belle sainteté, pleine d’amour, de ce Dieu, fait de la vraie piété une chose chaleureuse, attrayante et délicieuse. Il ne s’agit pas de devenir plus méchant et plus prétentieux, car ce Dieu n’est ni méchant ni prétentieux. Edwards dit: «Pour Dieu, la sainteté est comme la beauté et la douceur de la nature divine» et ainsi «les chrétiens qui brillent en reflétant la lumière du Soleil de la Justice, brillent avec le même type d’éclat, les mêmes rayons doux, tendres et agréables».[4]

Essentiellement, connaître et jouir du Dieu qui est amour, c’est devenir comme lui, amour. «Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres; car l’amour est de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour.» (1 Jean 4.7-8).

 


1. Jonathan Edwards, Works, 10:478.
2. Jonathan Edwards, Works, 2:298.
3. Jonathan Edwards, Works, 21:186.
4. Jonathan Edwards, Works, 2:201, 347.
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