Mike Evans présente son commentaire sur l’Épître aux Galates, lettre fondatrice du christianisme pour les non-Juifs. Il y explique la doctrine centrale de la justification par la foi seule, montrant que les œuvres de la loi ne peuvent sauver.
Il insiste sur le fait que le salut est une union intime et profonde avec Christ, bien plus qu’un simple « bénéfice ».
Cette foi mène à une liberté vécue non dans la débauche, mais dans l’obéissance à Dieu par amour.
Le commentaire de Mike Evans est disponible aux Éditions Clé.
Transcription
Matt : Bonjour, pouvez-vous vous présenter ?
Mike : Oui, bonjour. Je suis d’origine britannique, comme mon accent peut vous le faire comprendre. Je suis venu en France en 1963 avec Opération Mobilisation, quand j’étais un jeune étudiant et, par la suite, ça a changé toute ma carrière. Je suis revenu après mes études en 1967 et j’ai travaillé pendant 20 ans avec OM (Opération Mobilisation). Ensuite, il y a eu la campagne de Billy Graham à Paris-Bercy, dont j’étais le secrétaire général. J’ai enseigné à l’Institut Biblique de Nogent avant de devenir directeur à l’Institut Biblique de Genève. Je suis marié avec Sylvia, père de cinq enfants, grand-père de 18 petits-enfants. Voilà, en quelques mots.
Matt : Pourquoi avoir écrit un commentaire sur ce livre biblique spécifique, à savoir l’Épître aux Galates ?
Mike : Vraisemblablement, c’était la toute première lettre que Paul a écrite, après son premier voyage missionnaire en Galatie, où pour la première fois l’Évangile a pénétré, je dirais, intentionnellement chez les non-Juifs. C’est donc une lettre qui marque une transition entre le judaïsme et le christianisme, une transition douloureuse pour plusieurs. Et en ce qui nous concerne, c’est la lettre qui marque le début spécifique de la théologie chrétienne. Certes, elle est amplifiée dans l’Épître aux Romains, mais nous avons finalement toutes les indications de cette théologie dans cette lettre aux Galates.
Matt : L’Épître aux Galates est la seule épître de Paul qui débute de façon abrupte, sans action de grâce, mais par une réprimande. Quelle situation justifie un tel traitement ? En quoi l’Évangile était-il menacé ?
Mike : Après que Paul a créé ces quatre églises en Galatie, très rapidement, des judaïsants, comme on les appelle — probablement des chrétiens d’origine juive, originaires de Jérusalem — sont également venus et ont visité ces églises. Et à mon sens, ils ont fait deux choses. Ils ont d’abord essayé de discréditer le ministère et le statut de l’apôtre Paul, en disant qu’il était moins important que les autres apôtres à Jérusalem, que son message était insuffisant. Donc ils ont essayé de discréditer sa personne. C’est pour ça que Paul est assez audacieux : « Moi, Paul, apôtre […] j’ai reçu l’Évangile par révélation », et ainsi de suite.
Et puis d’autre part, ils ont essayé de discréditer son message en disant que le message de la justification par la foi seule est insuffisant et qu’il fallait y rajouter les rites alimentaires, la circoncision, bref, devenir Juif. Et donc Paul, devant cette infiltration dans l’Église, est assez agressif : « Ô Galates dépourvus de sens ! Qui vous a fascinés ? ». C’est pourquoi il est assez abrupt. Tu as raison, ça manque un petit peu de l’élégance et de la courtoisie des autres lettres.
Matt : Qu’est-ce que la justification ? Pourquoi les œuvres de la loi sont-elles incapables de justifier ? Pourquoi seule la foi en Christ le peut ?
Mike : La justification, en un mot, c’est un acte juridique, légal, de la part de Dieu où il nous déclare justes. Nous ne devenons pas justes au fur et à mesure de notre vie chrétienne, comme Augustin le croyait, mais nous sommes déclarés justes. Et les œuvres de la loi sont incapables de sauver qui que ce soit, parce que personne ne peut observer ni garder la loi. Et comme dit Paul dans cette Épître aux Galates, ne pas observer une seule loi, c’est désobéir à l’ensemble de la loi. Donc, notre salut ne peut dépendre d’une obéissance à la loi.
Christ, par contre, a satisfait parfaitement la loi de Dieu, il a satisfait la justice de Dieu, et Dieu lui a imputé notre sanction. Il est devenu, comme Paul le dit aux Corinthiens, péché pour que nous, nous devenions justes. Et depuis lors, la colère de Dieu à notre égard est apaisée, Dieu est rendu propice à notre égard.
Peut-être une petite précision qui est importante pour moi : Paul ne se sert pas souvent du mot « chrétien ». Par contre, lorsqu’il veut décrire ce qu’est un chrétien, il utilise l’expression « en Christ ». Plus de 160 fois dans les écrits de Paul, nous avons cette expression, qui nous rappelle que cela dépend d’un choix de Dieu avant la création du monde. Paul dit aux Éphésiens : « En lui, Dieu nous a élus en Christ avant la fondation du monde ». Et parfois, nous avons tendance à nous attacher aux bénéfices du salut comme la justification, le pardon, l’adoption, sans nous rendre compte que l’essentiel est d’être « en Christ », d’être uni à Christ. Christ est en nous, et notre salut n’est pas un produit de supermarché, mais c’est une union profonde, intime à Christ, illustrée par le mariage, où deux personnes deviennent une seule chair.
Matt : En quoi Abraham est-il le père des croyants et quel est le lien avec la mort de Christ ?
Mike : Nous constatons, dès le livre de la Genèse, que Dieu a fait à Abraham des promesses : la promesse d’une descendance, d’un héritage, et que toutes les nations de la terre seraient bénies en lui. Cette question de descendance a à la fois une réalisation imminente, avec la naissance d’Isaac, et une réalisation plus lointaine dans le temps avec la naissance de Christ. Et c’est ce que dit Paul aux Galates au chapitre 3 : « or, cette descendance est une, et c’est Christ ». En d’autres termes, Abraham est devenu le père des croyants, premièrement parce que c’est par sa descendance ultime, le Christ, que Dieu va sauver le monde. Et d’autre part, il est devenu le père des croyants parce que dans cette promesse de Genèse 12, il est question de « toutes les nations de la terre » qui seront bénies en lui. Donc, le lien entre Abraham et Christ est établi par Paul dans cette lettre aux Galates, et toutes les nations sont associées à cette promesse également.
Matt : Quel est le rôle de la loi dans le plan de Dieu ?
Mike : Alors, je vais me restreindre à ce que dit Paul ici, dans l’Épître aux Galates. Paul dit autre chose dans d’autres lettres, et tout n’est pas dit ici. Mais ce que dit Paul ici, c’est que la loi définit le péché comme étant une transgression. Donc, c’est aller à l’encontre d’une volonté divinement révélée de Dieu. Mais il va plus loin, au chapitre 3, en démontrant que la loi peut être comparée à un geôlier ou un précepteur qui, finalement, donne envie d’en être libéré. Autrement dit, la loi nous révèle que nous sommes dans un statut d’esclave, et la seule envie d’un esclave, c’est d’en être libéré. Donc, ça crée cette envie de libération. C’est ce que dit Paul, entre autres, dans ce chapitre 3.
Matt : Comment ne pas vivre une vie de débauche si le salut est par la foi, sans la loi ?
Mike : Toute la fin de cette Épître aux Galates met l’accent sur la liberté que nous avons en Christ. Mais en même temps, Paul nous exhorte à ne pas faire de cette liberté un prétexte, une excuse pour vivre selon la chair. Même si la loi du Sinaï, de Moïse, est désormais obsolète, Paul nous exhorte à voir que nous sommes désormais sous « la loi de Christ ». Il existe dans cette loi une continuité — pas toujours, mais souvent — avec la loi de l’Ancien Testament. Et nous voyons cette continuité dans le Sermon sur la montagne, dans l’Évangile de Matthieu, à partir du chapitre 5.
Alors nous sommes désormais sous la loi de Christ, et cette loi de Christ parfois explique et amplifie même la loi que l’on trouve dans l’Ancien Testament. Je cite par exemple la question de l’adultère : ce n’est pas uniquement l’acte physique. Ou la question du meurtre : ce n’est pas uniquement tuer quelqu’un. Christ va beaucoup plus loin, la loi de Christ est beaucoup plus spécifique, plus explicite que ce que nous trouvons sous l’Ancienne Alliance. Nous avons donc une liberté de nous soumettre à cette loi de Christ. La motivation pour suivre cette loi est de plaire au Père. La conversion étant un changement de propriétaire, nous ne sommes plus sous la tutelle de Satan, nous sommes la propriété de Dieu. Et en tant que tel, nous voulons lui être agréables, lui plaire. J’obéis à la loi de Christ parce que je l’aime, parce que je veux lui être agréable. Donc ce n’est pas une loi à tout-va, c’est une loi qui peut être contraignante, mais à laquelle on s’engage avec plaisir.
Matt : Comment pouvons-nous prier pour toi ?
Mike : La réponse va être la plus courte, même si je l’estime la plus importante. Je pense qu’à l’âge que nous avons, mon épouse et moi-même, nous nous rendons compte que la vie chrétienne n’est pas un long fleuve tranquille. On ne surfe pas sur les difficultés. Nous avons notre lot de questions, parfois sans réponse, d’interrogations. Mais notre souhait, notre sujet de prière, c’est de rester fidèles jusqu’au bout, c’est de continuer à combattre le bon combat. Et comme je l’ai dit en amont, nous avons cinq enfants, dix-huit petits-enfants. Je crois qu’avant de réfléchir trop loin à notre témoignage dans le monde, notre souci principal, c’est d’être un modèle pour nos enfants et nos petits-enfants, de telle sorte qu’ils voient l’efficacité de l’Évangile.
Matt Moury est diplômé de la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine. Il a oeuvré pour une organisation étudiante missionnaire, Friends International, en Angleterre. Missionnaire soutenu par une Église anglicane évangélique, Christ Church Cambridge, il est pasteur de l’Église protestante baptiste d’Argenteuil.
D’origine britannique, Mike Evans a passé plus de 50 ans en France. À tour de rôle, il était directeur d’Opération Mobilisation France (1967 à 1987), secrétaire général de la campagne d’évangélisation, Mission France avec Billy Graham en 1986, professeur à l’Institut Biblique de Nogent-sur-Marne et jusqu’à sa retraite en 2009, directeur de l’Institut Biblique de Genève. Marié avec Sylvia, une suissesse, ils ont 5 enfants, tous mariés et ils sont les heureux grands-parents de 18 petits enfants ! Titulaire d’un doctorat (Ph.D) sur la structure littéraire des Juges, Mike a d’abord fait des études en informatique et en management avant d’entamer ses études en théologie. Il a présidé au développement d’Évangile 21 en francophonie.