Les chapitres 24 à 27 d’Ésaïe, qui marquent l’apogée de la longue section d’Ésaïe 13 à 27, constituent ce que nous appelons parfois « l’apocalypse d’Ésaïe ». Dans ces chapitres, Ésaïe passe des oracles contre certaines nations à une apocalypse (un « dévoilement ») intéressant le monde entier. Il s’agit moins d’une histoire suivie à prendre au pied de la lettre que d’une succession d’images provocatrices qui contiennent toutes leur propre histoire. Ésaïe 24 décrit avant tout la dévastation qui doit frapper la terre entière, et précède trois chapitres de chants et de festivités en l’honneur de l’Éternel pour le triomphe qui est finalement et incontestablement le sien.
La majeure partie du chapitre 24 s’intéresse à la réalité de la dévastation du jugement final, à son étendue et à la terreur qu’elle inspire. Dans une série de tableaux alarmants, le texte présente des villes désolées (v. 10), des vignes dépouillées (v. 13). La terreur augmente partout, ainsi que le nombre de pièges (v. 18) ; la terre est ébranlée et des pluies diluviennes tombent du ciel (v. 18-19). Dans une autre série de métaphores mélangées, la terre souffre d’une sécheresse exceptionnelle. Deux thèmes secondaires captent l’attention du lecteur :
1° « La terre a été profanée par ses habitants ; car ils enfreignaient les lois, altéraient les prescriptions, ils rompaient l’alliance éternelle. C’est pourquoi la malédiction dévore la terre, et ses habitants en portent la culpabilité » (v. 5-6). Il s’agit probablement de l’alliance que Dieu avait établie avec Noé et ses descendants après le déluge (Genèse 9.8-17) ; cette alliance rappelle les obligations liées à la création elle-même. Si tel est le cas, les « lois » et les « prescriptions » qui ont été enfreintes correspondent aux règles fondamentales du juste comportement dans un univers dont Dieu occupe le centre et dans lequel les êtres humains, qui portent l’image de Dieu, sont liés à lui par amour. La triste réalité est que nous avons rompu « l’alliance éternelle » (v. 5), et que notre transgression a attiré la juste malédiction divine (v. 6). La vision apocalyptique du jugement final dans ce chapitre en est la conséquence.
2° À deux reprises dans ce chapitre, la gloire qui accompagne le jugement ou qui le suit pénètre cette ambiance par ailleurs implacablement sinistre. Dans les versets 14 à 16a, Ésaïe dépeint des gens qui viennent de l’est et de l’ouest, acclamant la majesté de l’Éternel, élevant leurs voix en joyeuses clameurs, chantant des extrémités de la terre : « Honneur au juste ! » Ce cri atteste que le jugement est passé et que Dieu a été juste en l’exerçant. Le dernier verset du chapitre sert de prélude à la vision finale de la Bible. La gloire de la nouvelle Jérusalem est si éclatante qu’il n’y a plus besoin de la clarté du soleil : « La gloire de Dieu l’éclaire, et l’Agneau est son flambeau » (Apocalypse 21.23).