Ésaïe 59 se divise en trois parties. Sorti de son contexte dans le livre, ce chapitre pourrait décrire le glissement progressif dans le péché et la déchéance qui a caractérisé de nombreuses périodes de l’histoire d’Israël et qui continue de caractériser de nombreuses périodes de l’Église. Sa place dans le livre, ainsi que les deux derniers versets, laissent plutôt penser que le prophète vise la communauté du peuple de Dieu après son retour d’exil. Elle est toujours caractérisée par le péché et n’a qu’un seul espoir, que le texte laissera progressivement apparaître.
La première section (v. 1-8) décrit le désespoir du peuple. Pour le prophète, la raison de cette détresse n’est pas l’incompétence de Dieu : « Non, la main de l’Éternel n’est pas devenue trop courte pour sauver » (v. 1). La situation dans laquelle se trouve la nation est due à son propre péché : « Mais ce sont vos fautes qui mettaient une séparation entre vous et votre Dieu ; ce sont vos péchés qui vous cachaient (sa) face et l’empêchaient de vous écouter » (v. 2). La triste liste s’allonge : injustice, manque d’intégrité, violence, conspirations. Tout cela reflète la nature humaine : le mal vient de l’intérieur. « Leurs pensées sont des pensées d’injustice, le ravage et la ruine sont sur leurs routes. Ils ne connaissent pas le chemin de la paix, et il n’y a point de droit sur leurs traces ; ils se font des sentiers tortueux : quiconque y marche ne connaît pas la paix » (v. 7b-8). Il n’est pas étonnant que l’apôtre Paul cite plusieurs passages de ce chapitre dans son jugement de la race humaine (Romains 3.15-17). Que faire d’une engeance aussi durablement pécheresse ? Même l’énorme traumatisme de l’exil n’a pas suffi à transformer les Israélites.
Dans la deuxième section (v. 9-15a), les verbes sont à la première personne du pluriel. Le langage est celui d’une lamentation collective. Les pleureurs (cf. 57.18) se lamentent sur leurs péchés. Le langage est direct et honnête. Comme Ésaïe, Daniel ou Esdras avant eux, ils confessent non seulement leurs propres péchés mais également ceux du peuple (6.5 ; Daniel 9.4-19 ; Esdras 9.6-15). Ils reconnaissent que leur situation est sans espoir. Cette prise de conscience est en soi une œuvre de la grâce. C’est quand les enfants de Dieu sont béatement contents d’eux-mêmes qu’ils sont le plus éloignés de la réformation et du réveil spirituel, comme l’Église de Laodicée (Apocalypse 3.14-22). L’espoir renaît quand, par la grâce de Dieu, ils passent par l’agonie d’une confession honnête, pleinement conscients du pouvoir insidieux et infiltrant du péché dans leur vie et dans leur culture.
La troisième section (v. 15b-21) procure le soulagement. Seul Dieu peut faire face à cette situation. Il est même plus que suffisant. Il avait vu que personne d’autre ne pouvait sauver le peuple ; « alors son bras lui vient en aide » (v. 16). Une fois encore, cette vision d’espérance et de promesse s’achève en prenant des dimensions apocalyptiques et dans le langage de la nouvelle alliance (v. 20-21).