Romains 11 a fait l’objet d’interprétations qui se contredisent mutuellement. La place nous manque ici pour les énumérer toutes, et encore moins pour les évaluer. Je me contente donc de faire apparaître la logique de la pensée de Paul telle qu’elle m’apparaît.
1° Le raisonnement que Paul a développé dans Romains 9 et 10 signifie-t-il que Dieu a rejeté « son peuple », à savoir les Israélites ? L’apôtre répond par un « non » indigné : « Certes non ! » (v. 1). Il le prouve d’abord en citant son propre cas (v. 1-6). En effet, il est lui-même Juif, de la tribu de Benjamin (l’une des deux qui n’a pas rejeté la dynastie davidique après la mort de Salomon). On ne peut donc pas dire que Dieu a rejeté les Israélites si certains d’entres eux continuent d’être sauvés. De plus, il est évident que dans l’Histoire, tous les Juifs n’ont pas démontré par leur façon d’être et d’agir qu’ils avaient été transformés par la grâce. Ainsi, quand Élie, qui avait sombré dans une profonde dépression, pensait être le seul fidèle, l’Éternel lui avait révélé qu’il s’était réservé sept mille Israélites loyaux qui n’avaient jamais succombé au culte de Baal (1 Rois 19.4, 10, 18 ; voir la méditation du 16 octobre). Il en était de même du temps de Paul ; et il en est de même aujourd’hui. Dieu a préservé « un reste » de Juifs qui sont restés fidèles à la révélation de Dieu. Dans l’optique de Dieu, il s’agit d’un reste « selon l’élection de la grâce », et par conséquent qui ne dépend pas de moyens aussi faibles que les œuvres (v. 5-6).
2° Mais, conformément aux prophéties bibliques, la nation dans d son ensemble a lamentablement trébuché (v. 7-10). Faudrait-il en conclure qu’il n’y a plus d’espoir pour elle, que tous les Israélites n’ont plus d’espoir d’être relevés ? « Certes non ! » (v. 11). Car dans l’étendue mystérieuse du dessein rédempteur de Dieu, l’endurcissement substantiel des Juifs a été l’occasion de faire connaître l’Évangile aux païens. « Or, si leur chute a été la richesse du monde, et leur défaite la richesse des païens » et « si leur mise à l’écart a été la réconciliation du monde », alors « combien plus en sera-t-il ainsi de leur complet relèvement » et « que sera leur réintégration, sinon une vie d’entre les morts ? » (v. 12, 15). C’est comme si Paul envisageait un puissant mouvement de réveil futur. Dans la providence divine, le rejet d’une grande partie d’Israël a procuré beaucoup de grâce aux païens ; l’acceptation d’une grande partie d’Israël signifiera encore plus de grâce pour le monde. Paul estime que beaucoup de ses compatriotes juifs se tourneront un jour vers Jésus, ce qui s’accompagnera d’une propagation plus importante de l’Évangile dans le monde.
3° Paul tire quelques leçons pratiques pour ses lecteurs chrétiens d’origine païenne en faisant une analogie avec l’arbre dont on a taillé des branches et sur lequel on en a greffé d’autres (v. 17-25). Mais Paul amène son raisonnement à son point culminant en célébrant la sagesse et la connaissance insondables de Dieu qui parvient à ce résultat spectaculaire (v. 33-36).