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De tous nos mystères, il n’en est pas où l’erreur soit plus aisée et plus dangereuse, ni où le travail soit plus difficile. Mais aussi, plus que tout autre, il est fécond en fruits de salut.[1]

Saint Augustin a fait cette remarque au sujet de la Trinité au début du 5e siècle et elle est tout aussi vraie aujourd’hui.

Le Symbole d’Athanase, qui date également du 5e siècle, a défini la Trinité comme suit: Nous vénérons un Dieu dans la Trinité et la Trinité dans l’Unité, sans confondre les Personnes ni diviser la substance : autre est en effet la Personne du Père, autre celle du Fils, autre celle du Saint-Esprit; mais une est la divinité du Père, du Fils et du Saint-Esprit, égale la gloire, coéternelle la majesté.[2]

Contradictions apparentes

Éditions Clé. 192.

La Bible se contredit-elle? Ne soutient-elle pas des idées apparemment contradictoires? Comment les concilier? Remettent-elles en cause l’autorité et l’infaillibilité de Dieu et de sa Parole?

Citons trois exemples: la Parole de Dieu nous dit que «l’homme est justifié par la foi, sans les œuvres», mais aussi qu’il «est justifié par les œuvres, et non par la foi seulement». Elle affirme que «quiconque est né de Dieu ne pratique pas le péché», mais également que «si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous trompons nous-mêmes». Elle décrit comment «l’Éternel se repentit du mal qu’il avait dit qu’il ferait à son peuple», tout en proclamant que Dieu n’est pas «un fils d’homme pour se repentir». Comment concilier ces propos apparemment contradictoires?

Sous la direction de Samuel Perez, 19 auteurs explorent 19 contradictions apparentes des Écritures et nous donnent des clés pour les comprendre. La conclusion de Florent Varak nous aide à résoudre par nous-mêmes ce type de difficultés.

Ces contradictions apparentes nous poussent à étudier la Bible en profondeur. Cette ressource sera utile pour chaque chrétien désireux de progresser dans sa compréhension de la Bible et dans sa marche avec Dieu.

Éditions Clé. 192.

La doctrine biblique de la Trinité affirme que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont égaux. Alors, comment comprendre cette égalité face à ces propos de Jésus : «Car mon Père est plus grand que moi» (Jn 14.28) d’une part et «Le Père et moi, nous sommes un» (Jn 10.30) d’autre part? Le Père, le Fils et l’Esprit sont-ils donc égaux ou le Père est-il plus grand que le Fils et l’Esprit ? Pour répondre à cette question, nous devons interpréter chaque passage dans son contexte.

Pourquoi la Trinité est essentielle

La Trinité est de la plus haute importance dans deux domaines de la vie chrétienne:

1. Notre compréhension de la nature de Dieu

Enseigner que le Fils et l’Esprit sont inférieurs au Père reviendrait à contredire ce que la Bible enseigne clairement ailleurs, à savoir que le Père, le Fils et l’Esprit sont Un dans leur essence.

Les trois points de ce triangle représentent trois hérésies communes concernant la doctrine de la Trinité[3]:

le subordinatianisme: le Fils et l’Esprit sont inférieurs au Père dans son essence. Il ne s’agit pas d’une subordination de la fonction mais plutôt d’une subordination de l’essence.
le modalisme: Dieu est une seule personne qui adopte trois modes ou formes d’activité distinct à différentes étapes de l’histoire de la rédemption. Selon ce point de vue, le Père est venu sur terre en tant que Fils, et après sa mort, sa résurrection et son ascension, il est revenu sur terre en tant que Saint Esprit à la Pentecôte. L’Écriture témoigne de l’erreur de cette doctrine, le plus clairement lors du baptême de Jésus, où les trois membres de la Trinité apparaissent simultanément (Mt 3.13-17).
le trithéisme: cette croyance affirme qu’il y a trois dieux. Elle s’écarte du monothéisme biblique qui enseigne que Dieu est unique (Dt 6.4).

Les trois côtés du triangle représentent les principes clarificateurs de ce que la Bible enseigne sur la « tri-unité » du Dieu unique.
Unité: un seul Dieu.
Diversité: trois Personnes.
Égalité: chaque Personne est Dieu de manière égale dans son essence, sa puissance et son but.

2. Notre compréhension de l’Évangile

L’Évangile lui-même est intrinsèquement trinitaire. Nier la Trinité reviendrait à nier l’Évangile (Ep 1.3-14). Si le Fils n’est pas égal au Père, comment peut-il être notre Sauveur et le médiateur entre le Père et nous (1Tm 2.5) ? Si l’Esprit n’est pas égal au Père et au Fils, comment peut-il être le moyen approprié choisi par le Père et le Fils pour faire leur demeure en nous (Jn 14.23) ? La Trinité est liée à la nature même de la manière dont nous sommes sauvés et dont nous vivons en relation avec le seul vrai Dieu.

Le contexte est la clé

Mais Jean, inspiré par l’Esprit, a-t-il pu retranscrire des propos contradictoires de Jésus, et ce dans deux passages de son Évangile aussi proches l’un de l’autre? Comme pour d’autres contradictions apparentes dans les Écritures, la confusion se dissipe lorsque nous examinons chaque verset dans son contexte. Un examen plus attentif de la signification de chacun de ces deux versets dans leur contexte littéraire et théologique nous apportera clarté et conviction sur la remarquable relation qui existe au sein de la Trinité entre le Père, le Fils et l’Esprit.

Commençons par examiner Jean 10.30: «Le Père et moi, nous sommes un».

Contexte: Jésus affirme l’égalité avec le Père devant ses ennemis

Dans Jean 8.12 à 10.42, l’apôtre décrit l’opposition croissante des dirigeants juifs envers Jésus et son message. Jean 10.30 est la conclusion de la section 10.22-30, dans laquelle les chefs juifs demandent à Jésus de dire clairement qu’il est le Christ.

Jésus explique que leur incrédulité n’est pas due à un manque de preuves. Il est le berger; ses brebis l’entendent, le suivent et reçoivent la vie éternelle. Dans cette section, l’accent est mis sur la puissance de Jésus: «Personne ne pourra les arracher à ma main» (v. 28). La sécurité des brebis dépend de la puissance et de la surveillance du bon berger.

Interprétation: Comment le Père et le Fils sont-ils un?

1. Le Père et le Fils sont un dans leur puissance
L’activité du Fils, comme toujours, est en harmonie avec celle du Père (Jn 5.17-30 ; 6.37-40). En effet, poursuivant l’image pastorale, Jésus explique qu’il reçoit les brebis de son Père qui «est plus grand que tous et personne ne peut les arracher à la main de [s]on Père» (v. 29). Ainsi, Jean 10.28 affirme: «personne ne pourra les arracher à ma main» (en référence à la main de Jésus). Et Jean 10.29 répète: «personne ne peut les arracher à la main de mon Père» (cf. 17.10). Le Fils et le Père sont unis dans leur dessein.

2. Le Père et le Fils sont un dans leur essence
Le Père et le Fils, dans une harmonie trinitaire, prennent soin des brebis, de sorte que Jésus conclut en disant : « Le Père et moi, nous sommes un » (Jn 10.30). La grammaire grecque n’induit pas ici qu’ils sont une seule personne, mais plutôt un seul Dieu.

3. Le Père et le Fils sont un dans leur but
Puisqu’ils sont un, le Père et le Fils partagent le même but : assurer la sécurité de la bergerie. Le Père, le Fils et l’Esprit sont unis dans leur puissance, leur essence et leur but. C’est le trinitarisme biblique.

Dans Jean 10.31-39, nous voyons la réponse des chefs juifs : l’incrédulité. Ils reconnaissent les paroles de Jésus pour ce qu’elles sont, une affirmation de sa divinité (10.33), mais ils choisissent de ne pas croire et conspirent pour le tuer.

Examinons maintenant Jean 14.28 : « Vous avez entendu que je vous ai dit : “Je m’en vais, et je reviens vers vous.” Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que j’aille auprès du Père ; car mon Père est plus grand que moi ».

Contexte: Jésus parle à ses disciples de son ascension

Dans Jean 13.1-17.26, Jésus célèbre la dernière Cène avec ses disciples, les préparant à ce qui va se passer dans peu de temps. Le lendemain, il sera crucifié, le troisième jour, il ressuscitera des morts, et 40 jours après, il montera au ciel pour s’asseoir à la droite de son Père.

Interprétation: Comment le Père est-il plus grand que Jésus?

Tout d’abord, il faut écarter les interprétations incorrectes de ce verset. Ce verset ne peut pas affirmer que le Fils ne partage pas la même essence que le Père. En effet, une telle interprétation contredirait d’autres versets qui disent clairement que le Fils est un avec le Père dans la création (Jn 1.1-2) et dans la rédemption (Jn 1.14). Jean 14.28 peut être interprété de deux manières principales:

1. Le Père est plus grand parce que le Fils est engendré éternellement
du Père
La première option consiste à comprendre que le Père est plus grand que le Fils en ce que le Père donne éternellement la vie au Fils. Il n’existe aucune différence d’essence entre le Père et le Fils. Il n’y a jamais eu de temps où le Fils n’existait pas, et pourtant le Fils reçoit la vie du Père.

Le Père est fons divinitatis [«source de la divinité»] dans laquelle l’être du Fils prend sa source; le Père est Dieu qui envoie et commande, le Fils est Dieu envoyé et obéissant.[4]

Ce concept est fondé sur le langage biblique selon lequel le Fils est «engendré» par le Père (Jn 1.14, 18 ; 3.16, 18). C’est une autre façon de dire que le Père est éternellement le Père du Fils et le Fils éternellement le Fils du Père.

Jean 5.26 est un passage clé pour décrire cette relation éternelle Père-Fils dans le langage de l’engendrement éternel : « En effet, tout comme le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d’avoir la vie en lui-même ». Le verbe « donné » est compris comme décrivant cette relation d’engendrement éternel du Fils par le Père.

Le Fils n’est pas subordonné dans son essence et il n’est pas moins « divin ». Le fait qu’il ait la vie en lui-même dépend du don éternel de la vie du Père au Fils. Cette interprétation de Jean 14.28 a été adoptée par Origène, Tertullien et Athanase, entre autres.

2. Le Père est plus grand que le Fils pendant l’incarnation de ce dernier
La deuxième interprétation possible de Jean 14.28 consiste à dire que le Père est plus grand que le Fils pendant l’incarnation de ce dernier. Par son incarnation, le Fils est devenu un homme, et donc subordonné au Père. Par conséquent, après sa mort, sa résurrection et son ascension à la droite du Père, le Fils est retourné à la gloire qu’il avait avec le Père avant la création du monde (Jn 17.5). C’est l’interprétation de Jean 14.28 adoptée par Cyrille d’Alexandrie, Ambroise et Augustin, entre autres.

Les deux interprétations sont orthodoxes et acceptables. Elles défendent toutes deux la conception trinitaire biblique selon laquelle le Père, le Fils et l’Esprit sont unis en essence, égaux en puissance, distincts dans leurs relations mais unis dans leurs buts.

Pourquoi Jésus dit-il que ses disciples doivent se réjouir parce qu’il va vers le Père? Parce qu’il a accompli la mission pour laquelle il est venu, à savoir nous sauver et nous réconcilier avec Dieu. Une autre raison de se réjouir est l’envoi de l’Esprit, un thème clé de cette section. Cela ne se produira que lorsque le Fils sera glorifié à la droite du Père. Le Fils et le Père feront ensuite leur «demeure» dans le croyant individuel par le ministère de l’Esprit qui l’habite (Jn 14.23, 25 ; 15.12-15).

Conclusion

Ainsi, tout indice de contradiction apparente se dissipe lorsque chacun de ces deux versets est interprété dans son contexte.

Le Père, le Fils et l’Esprit sont un, co-éternels et co-égaux, avec des fonctions distinctes manifestées dans la vie, la mort, la résurrection et l’ascension du Fils à la droite du Père.

L’étude de ces deux versets est, selon les mots d’Augustin, «fécond[e] en fruits de salut» parce que nous y voyons comment le Dieu trinitaire sauve, protège et dirige son peuple.

Dans sa conclusion, Jean explique clairement le but de son Évangile: «Mais ceux-ci ont été décrits afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de Dieu, et qu’en croyant vous ayez la vie en son nom» (Jn 20.31). Le croyez-vous?

 

1. Augustin, « De la Trinité », 1.3.5, Œuvres complètes de Saint Augustin, éd. Raulx, Paris : Guérin & Cie, 1868, p. 346.

2. Disponible sur <http://www.erq.qc.ca/francais/symbole_athanase.html>,consulté le 18.09.2023.

3. John Hannah, History of Doctrine Class Notes, Dallas Seminary, 1999, section 5.16.

4. C.K. Barrett, The Gospel According to St John, Louisville (KY): Westminster John Knox Press, 1978, p. 468, cité par Donald Carson, Évangile selon Jean. Commentaire, op. cit., p. 668.

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