Le texte de Juges 11. 29 à 40 raconte que Jephté a fait un vœu et que sa fille en a fait les frais en étant « sacrifiée ». Cette histoire qui ne laisse indifférent personne suscite bien des questions :
Comment se peut-il qu’un homme, chef militaire connu et respecté puisse proclamer qu’il consacrera et offrira en holocauste – en cas de victoire – quiconque sortira de sa maison lors de son heureux retour (Juges 11.31) ? Comment un homme, sur lequel l’Esprit de l’Éternel repose (Juges 11.29), peut-il prononcer une telle chose contraire à la Loi, ce qui devait le conduire à la lapidation ? (Nombres 35. 30). Pourquoi les prêtres d’Israël, les anciens et le peuple l’auraient-t-ils laissé accomplir son vœu sans qu’aucune opposition ne se soit manifestée ? Tout le monde en Israël savait qu’il était strictement interdit d’offrir en sacrifice un être humain (Lévitique 18.21; 20.2 ; Deutéronome 12.31), alors pourquoi n’y a-t-il pas eu de réaction, à l’instar des Israélites qui sauvèrent Jonathan de la main de Saül qui avait fait vœu de le tuer, alors que le sort l’avait désigné (1 Samuel 14.42-45 )? Le sacrifice humain commis par le roi de Moab Mésha indigna tellement Israël que le peuple cessa de le poursuivre et qu’il rentra chez lui (2 Rois 3.27). Si la réaction est aussi vive face au péché d’un païen de Moab, une apathie générale du peuple devant une abomination identique – et de surcroît effectuée de sang-froid après deux mois d’attente – est impensable.
Si Jephté avait sacrifié sa fille, comment le peuple aurait-il pu commémorer cet acte (Juges 11.40) ? Pourquoi la Parole de Dieu le présente-t-il comme l’instrument de Dieu pour conduire Son peuple dans la voie de l’obéissance ? Samuel lui a accordé une place d’honneur dans son discours à Israël (1 Samuel 12.11) et Hébreux 11.32 le cite parmi les héros de la foi !
Ces paradoxes, ces illogismes, comment les expliquer ?
Tout d’abord, Jephté fait un vœu que Dieu ne lui avait pas demandé. Puis il fait un « troc » avec Dieu : « Seigneur, donne-moi la victoire et je ferai cela… » état d’esprit connu de tous, aujourd’hui encore, parmi les non chrétiens comme parmi les chrétiens.
Jephté qualifie donc son vœu, son offrande, d’holocauste. Le mot hébreu traduit par holocauste (du grec holos et kaustos : brûler entièrement) est ‘ôlâ. Il provient de la racine ‘âlâ qui exprime l’idée de : quelque chose qui monte (Lévitique 1.9, 13, 17).
Pour exemple, David écrivit : « Que ma prière soit devant ta face comme l’encens, et l’élévation de mes mains comme l’offrande du soir » (Psaume 141.2). Sa prière qui n’est absolument pas sanglante est comparée à un sacrifice dont la fumée monte (vers Dieu). Paul dit aux chrétiens de Rome d’« offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu ». (Romains 12.1). Est-ce que ces chrétiens se sont sacrifiés sur un autel suite à cette exhortation ? Est-ce que Jephté a égorgé sa fille et l’a brûlée ? C’est impensable. L’unité et la cohérence des Saintes Écritures, autant dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau, va dans le sens d’une consécration au service de l’Éternel, de même que l’idée de Paul était d’encourager les chrétiens à se consacrer au service de Dieu par Jésus-Christ.
Jephté a ainsi fait vœu de consacrer à Dieu la première personne qui sortirait de sa maison après sa victoire. C’est donc sa fille. Cette situation le met dans le désarroi car en la consacrant au service de l’Éternel, elle devra rester vierge pour servir à la porte du tabernacle le restant de sa vie, à l’instar des vierges de Silo (Juges 21.19-23). Le texte précise que Jephté avait un seul enfant (v 34). En réalisant ce vœu, il perdait toute possibilité d’avoir une postérité.
La douleur de Jephté ne provient ni d’une séparation, ni de la mort de sa fille comme on pourrait le penser, mais elle est la conséquence d’un engagement présomptueux qui le privera de descendance. C’est l’absence d’héritier qui l’attriste (v 35). Il a engagé et consacré sa fille, sans tenir compte qu’elle avait des droits, et son nom s’éteindra après sa propre mort. La fille de Jephté s’absentera deux mois pour « pleurer sa virginité » car elle ne pourra pas devenir mère, ni prolonger ainsi le nom de Jephté le Galaadite.
Ainsi, la Parole de Dieu nous enseigne d’une part, que Jephté a fait un vœu irréfléchi et d’autre part que l’obéissance à toute épreuve de cette jeune fille est célébrée (et non pleurée), quatre jours par année (v 40).
La Bible nous enseigne également qu’un SEUL être a accepté d’être sacrifié avec l’approbation de Dieu : Jésus-Christ, qui s’est livré lui-même pour nous, une fois pour toutes (Hébreux 9.12), afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais qu’il ait la vie éternelle (Jean 3. 16).