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Chers missionnaires, n’ignorez pas le compte à rebours qui précède la damnation

Note de l'éditeur : 

« Difficiles mais magnifiques doctrines » est une série d’articles au format plus long qui invitent les lecteurs à porter leur attention sur la gloire et la nécessité des vérités théologiques que les personnes appartenant à un Occident post-chrétien ont plus de mal à accepter.

Cet article renvoie vers d’autres articles en anglais, nous les avons laissés pour nos lecteurs anglophones.

« 31 secondes avant la mort. »

C’est avec ces termes inquiétants que l’auteur Brandon Sanderson préfigure l’inévitable, en nous donnant accès aux pensées et aux sensations de ses personnages juste avant leur décès. Des lecteurs qui recherchent l’attrait immortel d’un roman fantastique pourraient juger cela bien trop morbide. Mais des millions de fans de la série littéraire Stormlight Archive, écrite par Brandon Sanderson, ne seraient pas d’accord. Le fait de ne pas perdre de vue la fin parle profondément à leur âme humaine.

J’imagine que de telles affirmations sur la vie avant la mort pourraient être écrites à propos de n’importe qui d’entre nous. Imaginez qu’à chaque fois que vous rencontrez une nouvelle personne, un narrateur au ton glacial vous murmure à l’oreille la durée de vie restante de cette personne. Ce serait là une information étrange et terrible. Et en même temps, cette information modifierait votre vision de cette personne. Cette simple réalité accentuerait l’urgence. Le temps passe vite. Chaque instant compte.

Mais nous sommes là devant plus que du simple fantastique. Nous sommes tous conscients que la mort est inévitable. Pour ceux qui s’attachent à la foi chrétienne historique, nous croyons que, sans le Salut de Dieu obtenu par Jésus-Christ, l’enfer, lieu bien réel de tourments éternels et conscients pour les méchants, suit impitoyablement les traces de la mort. Le temps passe plus que vite. Il est précieux. C’est un lourd fardeau que de savoir cela.

Le fardeau des missionnaires

Il est probable que les missionnaires portent ce fardeau plus que n’importe qui d’autre. Ce sont des hommes et des femmes qui sortent « pour le nom de Jésus-Christ » (3 Jn. 1.7), « car il n’y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés. » (Ac. 4.12) Leur but est de « sauver les autres en les arrachant au feu » (Jude 23). Beaucoup de missionnaires seraient d’accord pour dire qu’une des raisons principales de leur appel est de s’assurer qu’aucune personne perdue n’aille en enfer sans avoir eu l’occasion d’entendre d’abord parler du message de l’Évangile. La vie, le travail et le fardeau d’un missionnaire sont de garder en vue la réalité de l’enfer, d’entendre cette voix glaciale du narrateur.

La vie, le travail et le fardeau d’un missionnaire sont de garder en vue la réalité de l’enfer.

Je le sais car je l’ai vécu. En tant que missionnaires en Afrique de l’Est, nous avions l’habitude de faire de longues distances en voiture, en priant pour les villages rencontrés sur notre route. Peu importe le nombre d’endroits où nous nous arrêtions, ou le nombre de personnes qui croyaient en Jésus, il y avait des centaines d’endroits et des milliers de personnes à côté desquels nous passions. Oui, je me réjouissais des nouveaux convertis, mais jamais sans avoir amèrement conscience de toutes les personnes que nous n’allions pas voir.

De retour chez moi où je me reposais le soir après ma journée de travail, j’entendais souvent des hurlements dans le voisinage. Cela voulait dire qu’une personne venait de décéder. Était-ce quelqu’un qui n’avait jamais entendu parler de Christ ? Avais-je récemment discuté avec lui au marché ? Est-ce que j’avais saisi l’opportunité de lui parler de la Bonne Nouvelle ? Voilà le genre de questions culpabilisantes que peut se poser un jeune assailli par les cris. Mais ces derniers représentent la conscience éclairée d’une éternité qui attend juste derrière la porte.

La tentation du missionnaire

Ce fardeau est accompagné d’une tentation : pourquoi ne pas mettre la doctrine de l’enfer de côté ? Il existe certainement des moyens pratiques pour le faire.

On pourrait prendre la voie universaliste, qui dit que le Salut de Dieu s’étendra finalement à tout le monde. Que le jugement éternel n’est plus nécessaire et rien de plus qu’une métaphore dans les Écritures.On pourrait également choisir l’annihilationisme, la conviction selon laquelle, au travers de la mort ou d’une punition temporaire dans l’au-delà, Dieu finira par anéantir toutes les personnes qui ne seront pas sauvées. Et parce que, selon cette perspective, les incroyants n’existeront plus, l’enfer en tant qu’endroit de jugement éternel arrêtera également d’exister.

Peut-être que le choix le plus simple à faire pour mettre l’enfer de côté serait de ne pas trop y penser. La croyance demeurerait, mais pas le fardeau. L’urgence pour les âmes diminuerait. Les paroles de Jésus à propos de l’enfer, celles qui ont autrefois ému les missionnaires, sont maintenant accueillies avec indifférence. Qu’il s’agisse d’une fatigue causée par la compassion continuelle ou d’un choc culturel dû à trop d’hurlements pendant la nuit, à trop de crémations funéraires, à trop de voisins qui sont à 31 secondes de la mort, au fil du temps, l’enfer devient de moins en moins une inquiétude.

Cet abandon est ce que certains appellent « l’amour triomphe toujours ». Comme le constate Millard Erickson, « La doctrine d’une punition éternelle parait pour certains démodée, ou faussement chrétienne [et] est souvent l’un des premiers sujets de la foi chrétienne à être démythifié. » Pourquoi le missionnaire devrait-il alors s’accrocher à cela et à son angoisse incessante ? Parce que « nous considérons cependant la doctrine…telle qu’elle est clairement enseignée dans les Écritures » poursuit Erickson.

Le missionnaire qui abandonne la doctrine de l’enfer, que ce soit intellectuellement ou émotionnellement, n’est pas soudainement devenu plus libre ou plus vertueux. L’abandon de cette doctrine n’a pour conséquence que l’inverse : une foi restreinte et un ministère limité.

La certitude du missionnaire

La parole la plus claire concernant l’enfer vient directement de Jésus. Dans Matthieu 25, Jésus est en plein discours à propos de la fin des temps. La majeure partie de son enseignement a concerné le salut des justes et la condamnation des méchants. Mais, dans ce chapitre, il devient plus spécifique.

Après avoir répété l’expression « il y aura des pleurs et des grincements de dents » (Mat 24.51 ; 25.30), Jésus décrit le jugement final où une telle souffrance arrivera. Les « brebis » justes seront reçues dans le royaume que Dieu a préparé pour elles, et les « boucs » maudits entreront « dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges » (Mat 25.33,41). Après avoir répété la portée de ce jugement, Jésus conclut, « et ils iront à la peine éternelle, tandis que les justes iront à la vie éternelle. » (v.46)

Le missionnaire qui abandonne le message de l’enfer, que ce soit intellectuellement ou émotionnellement, n’est pas soudainement devenu plus libre ou plus vertueux. L’abandon de cette doctrine n’a pour conséquence que l’inverse.

L’exemple de l’enfer dans Matthieu 25 est clair, mais une doctrine digne de confiance n’est pas construite sur un seul chapitre des Écritures. L’enfer est également décrit dans l’évangile de Marc comme « le feu qui ne s’éteint pas » (Marc 9.43) et comme l’endroit « où le ver ne meurt pas » (v.48).

L’évangile de Luc présente la parabole de l’homme riche et de Lazare, racontée par Jésus, dans laquelle ce dernier affirme qu’au moment de sa mort le riche fut « en proie à une grande souffrance » et s’écria « je souffre cruellement dans cette flamme. » (Luc 16.23-24). Le livre de l’Apocalypse fait référence à plusieurs reprises à un trou sans fond, fumant et sulfureux de tourment éternel. (Apoc 9.1-2; 11; 14.9-11; 19.3; 21.8).

Nous pouvons être certains de ceci : lorsqu’il s’agit de parler de l’enfer, quoiqu’avec bienveillance, la Bible n’y va pas de main morte.

De la consolation avec ce compte à rebours

Puisque les Écritures sont si claires, le missionnaire peut être certain non seulement de la vérité de cette doctrine mais aussi de sa bonté. Que pourrait-il y avoir de bon à propos de cette doctrine sur un tourment conscient et éternel ? Est-ce qu’elle apporte une édification pour l’âme ? Quel fruit cela induit-il dans un ministère ?

La prochaine fois que vous entendrez des hurlements pendant la nuit ou ce murmure glacial du narrateur, souvenez-vous des magnifiques bienfaits de cette doctrine. Je vais les citer :

30 secondes… L’enfer nous montre que la Parole de Dieu est digne de confiance.

Sans doute Paul avait-il l’enfer en tête lorsqu’il écrivit à propos de ses semblables qui étaient perdus parmi le peuple Juif, « j’éprouve une grande tristesse et j’ai dans le cœur un chagrin continuel. » (Rm 9.2). Mais si l’enfer est réel et la Parole de Dieu digne de confiance lorsqu’elle parle d’un jugement éternel, elle l’est également lorsqu’elle nous parle de Sa compassion.

Qu’est-ce qui pourrait être plus bénéfique au ministère d’un missionnaire que la confiance en la fiabilité de la Bible ? « Nous ne nous prêchons pas nous-mêmes ; c’est Jésus-Christ le Seigneur que nous prêchons » (2 Co. 4.5), parole vivante au travers des textes écrits. Lorsque la charge de l’enfer l’assaillit, le missionnaire peut se confier dans la Parole de Dieu à la fois sur le fait que l’enfer existe et sur le fait que Dieu ne veut « qu’aucun périsse, mais (veut) que tous arrivent à la repentance. » (2 Pi. 3.9).

25 secondes… L’enfer proclame la gloire de Dieu

L’un des arguments les plus forts contre la doctrine de l’enfer et qu’elle éloigne de l’amour de Dieu. Comment un Dieu d’amour peut-il exercer un jugement éternel contre ce qui a été mauvais temporairement ?

Le missionnaire doit se rappeler que, comme Wayne Grudem l’a écrit, « Le mal qui demeure impuni nuit effectivement à la gloire de Dieu dans l’univers. (p1280 de l’édition française)»

En d’autres termes, lorsque « Dieu punit le mal et triomphe de lui, la gloire de sa justice, et sa victoire sur ses adversaires sont manifestées ».

Lorsqu’une missionnaire présente le message de l’Évangile et prévient humblement de l’enfer, elle déclare que Dieu est glorieusement juste et tout-puissant. Tout ce qui n’est pas la démonstration de la gloire suprême de Dieu ne rend pas service à l’auditeur perdu. Il n’y a en cela pas de pitié pour celui qui risque les flammes de l’enfer.

20 secondes… L’enfer cultive la confiance en la souveraineté de Dieu.

Ma conviction en ce qui concerne la souveraineté de Dieu partagée par les Réformés est née lorsque j’étais sur le champ missionnaire. Un jour, le responsable de mon équipe m’amena en haut d’une montagne à un point de vue panoramique. Des milliers de toits de tôle scintillaient sur des kilomètres de villages inaccessibles. Plus tard ce même soir, j’étais prêt à acheter un billet d’avion pour rentrer chez moi. Si la tâche qui incombe au missionnaire -à savoir atteindre les personnes habitant des endroits si reculés- dépendait entièrement de moi, j’aurais abandonné en désespoir de cause. Heureusement, à l’époque, ma lecture quotidienne était l’épître aux Romains, et je suis tombé sur une déclaration de l’apôtre Paul disant que Dieu « fait grâce à qui il veut et il endurcit qui il veut » (9.18). Le choix souverain de Dieu sur les âmes fut le réconfort qui me permit de rester. Je participais à son œuvre, et non l’inverse. Cette liberté m’apporte le repos encore aujourd’hui.

Si la Parole de Dieu est digne de confiance lorsqu’elle parle de jugement éternel, elle l’est également lorsqu’elle nous parle de compassion.

15 secondes… l’enfer encourage l’évangélisation.

Lorsque je parle du repos, je parle du repos pour mon âme, non pas du repos du travail d’évangélisation. Le repos que nous procure la souveraineté de Dieu nous permet encore plus de faire tout notre possible (He 4.11). Il s’agit là probablement du fruit le plus évident de la doctrine de l’enfer. Si l’enfer est bien réel et que chaque personne que l’on rencontre n’est qu’à un certain nombre de secondes de la mort, alors le missionnaire doit aller apporter l’Évangile.

Ecoutez l’urgence évoquée par l’apôtre Paul :

« Mais comment donc feront ils appel à celui en qui ils n’ont pas cru ? Et comment croiront-ils en celui dont ils n’ont pas entendu parler ? Et comment entendront-ils parler de lui, si personne ne l’annonce ? Et comment l’annoncera-t-on, si personne n’est envoyé ? Comme il est écrit : Qu’ils sont beaux les pieds [de ceux qui annoncent la paix,] de ceux qui annoncent de bonnes nouvelles ! » (Rm 10.14-15)

Quel encouragement !

10 secondes… L’enfer nous pousse à avoir le souffle coupé devant la sainteté de Dieu.

En tant que pasteur, je n’ai jamais encouragé qui que ce soit à méditer sur la doctrine de l’enfer. Par contre, j’ai toujours encouragé à méditer sur la doctrine de la sainteté de Dieu, qui, de toute évidence, coïncide avec l’importance de l’enfer. Lorsque l’Ancien et le Nouveau Testament lèvent le rideau sur le paradis, on observe des créatures criant, « Saint, saint, saint est l’Eternel » (Es. 6.3 ; Ap 4.8). Ce qui signifie que Dieu est entièrement étranger à toute forme de mal. Il a le droit de chercher son propre honneur et de s’opposer à l’opprobre.

Lorsqu’un missionnaire laisse sa pensée s’attarder sur l’enfer en tant que tourment conscient et éternel, il s’agit là évidemment d’une pensée épouvantable. Est-il vraiment nécessaire pour une âme de pleurer éternellement l’absence de la grâce de Dieu (2 Th. 1.9) ainsi que la présence de Sa colère (Ap 14.10) ? Face à la sainteté de Dieu, oui. Avec le psalmiste, le missionnaire peut s’exclamer et dire, « Il est saint, l’Eternel, notre Dieu ! » (Ps. 99.9)

5 secondes… L’enfer est un monument à la grâce de Dieu.

Servir en tant que missionnaire peut être une vocation épuisante. Vivre comme l’un des rares chrétiens parmi des millions de personnes perdues est un privilège, mais c’est également une recette pour le combat spirituel. Ce dont les missionnaires ont besoin pour persévérer, c’est de se baigner dans la grâce de Dieu. Si l’enfer nous révèle la grandeur de la sainteté de Dieu, il s’élève aussi comme un monument devant les profondeurs de sa miséricorde.

La gratitude est un baume dans les temps difficiles. Et Jésus veut que nous possédions une joie complète (Jn. 15.11). Quelle gratitude et quelle joie Dieu nous procure lorsque nous nous rappelons que nous avons été choisis par amour pour échapper à l’enfer (la miséricorde) et pour hériter de la vie éternelle (la grâce) !

Après tout, le missionnaire lui-même ne se trouve qu’à un certain nombre de secondes de la mort. Laissez le narrateur au ton glacial dire ce qu’il a à dire. Mais, par la grâce de Dieu, l’enfer ne fait pas partie du futur du missionnaire. Son futur, c’est le paradis puis une nouvelle création. Voilà la volonté du Roi. Dieu soit loué.

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