Au sein de notre société égocentrique où toute notion de « redevabilité » est détruite au profit du « droit » à la liberté, certains de nos contemporains qui posséderaient une certaine forme de théisme pourraient nous poser la question suivante : « En tant qu’être humain autonome et libre, pourquoi dois-je rendre des comptes à Dieu ? Je vis ma vie, je ne fais rien de mal, je suis libre de mes choix, et ceux-ci ne concernent que moi ! ». Dit autrement et de façon abrupte: « Pourquoi Dieu aurait-il le droit de me juger et d’exiger quoi que ce soit de ma part ? ». Cette question est loin d’être sans importance, et en tant que chrétiens, nous devrions nous la poser (certes avec un peu plus d’humilité !) pour essayer de comprendre comment notre liberté d’homme s’articule avec notre redevabilité éthique face à notre Créateur.
Pour répondre à cette question, nous aborderons 5 pistes de réflexion primordiales.
L’homme vit au sein d’une alliance
L’image que nous offrons par le biais de notre vie devrait correspondre à la réalité de ce que signifie d’avoir été créé « à l’image de Dieu », avec les implications éthiques et morales que cela contient.
Chaque être humain est une créature de Dieu. Nous sommes tous issus d’Adam et Ève, et de ce fait, comme le souligne Paul en 1 Corinthiens 15, chaque être humain est « en Adam ». Ceci veut dire entre autre que le rapport qui existait entre Dieu et Adam, entre le Créateur et sa créature, définit encore aujourd’hui notre humanité. Nous sommes des êtres créés à l’image de notre Créateur, et nous sommes inscrits dans une relation personnelle avec lui. C’est-à-dire que la création de l’homme en Éden ne doit pas être seulement comprise dans ses implications matérielles, mais nous devons aussi en tirer les implications personnelles. Au-delà du fait même que l’acte de création devrait nous inspirer une gratitude et une admiration profondes envers notre Créateur, être créés à l’« image de Dieu » implique un devoir éthique profond. En effet, l’image que nous offrons par le biais de notre vie devrait correspondre à la réalité de ce que signifie d’avoir été créé « à l’image de Dieu », avec les implications éthiques et morales que cela contient. C’est ainsi que notre vie s’insérera dans la réalité même d’un être personnel créés à l’image de Dieu. En effet, lorsqu’Adam transgressa le commandement que Dieu lui avait donné et qui lui permettait – par le biais de son obéissance – de manifester librement une attitude d’adorateur devant le Seigneur, il exprima une image mensongère de sa nature d’être humain créé à l’image de Dieu. En désobéissant, il n’exprima plus la seigneurie de Dieu au sein de sa vie, mais, de manière mensongère, le fait qu’il était sa propre norme, son propre juge de ce qui est bon ou mauvais, détournant ainsi l’honneur dû à son Créateur. Ainsi, par nature, l’homme est redevable de la manière dont il vit, car il a reçu cette vie de Dieu et celle-ci ne pourra être complète et vraie (en accord avec la réalité) que si elle est un reflet glorieux du Dieu créateur, maître et souverain de l’univers entier. Lorsque l’homme désobéit, ce n’est pas simplement une dérive éthique, c’est un acte qui se réclame d’une autonomie illusoire et qui est un mensonge face à la réalité de la seigneurie de Dieu sur sa création. C’est une rupture manifeste de l’alliance créationnelle qui le lie à son créateur.
L’homme respire grâce à Dieu
L’homme est constamment débiteur du Seigneur pour sa vie. Il n’est pas un être autonome.
La Bible ne nous permet pas de comprendre l’univers créé de telle sorte qu’il serait semblable à une « horloge » capable de fonctionner seule et dont Dieu en serait l’horloger. Cette vision d’un Dieu lointain qui ne serait plus impliqué de façon constante au sein de sa création est fausse. Comme nous pouvons le lire en Hébreux 1 :3, Dieu soutient toutes choses par sa Parole puissante. C’est ce que veut dire « la providence de Dieu ». Dieu est impliqué de façon active dans chacun des événements qui ont lieu dans l’univers. C’est lui qui est la cause première de toutes choses. L’observation et l’analyse empirique de ce qui nous entoure est avant tout une démarche qui explore les causes secondes (cf. Ps 104 :19-30, Ps 135 :7). Nous sommes au bénéfice de sa constante providence pour chacun des battements de notre cœur, chacune de nos respirations. Car qu’avons-nous que nous n’ayons reçu ? Cette providence s’inscrit ultimement dans le projet divin que toutes choses concourent à Sa gloire (Ésaïe 43 :6-7). Ainsi, l’homme est constamment débiteur du Seigneur pour sa vie. Il n’est pas un être autonome. Et lorsqu’il rejette la seigneurie de son Créateur, c’est un acte de pure folie : il rejette la réalité, et refuse de rendre à son Créateur la gloire qui lui est due et qui constitue pourtant à la fois le fondement et la raison même de sa propre existence.
Dieu est LE Seigneur
Cette vérité est simple mais demeure fondamentale. Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit était, est et sera toujours LE Seigneur de toutes choses. Nous sommes ses créatures, et nous n’entretenons pas avec lui un rapport d’égal à égal. Nous lui devons révérence, gloire et honneur. De plus, en tant que Seigneur et Roi de sa création, serait-il juste et cohérent qu’Il ne se soucie nullement de la façon dont le reconnaissent les créatures qu’il a créées pour sa gloire ? Si Dieu ne s’intéressait pas à la manière dont ses créatures vivent, est-ce que ceci n’introduirait pas un certain relativisme dans la façon dont il conçoit sa propre gloire, sa sainteté, sa justice ?
Tous les hommes connaissent Dieu
Nous l’oublions souvent, mais tout homme « connaît » Dieu. Paul en parle clairement en Romains 1 :18-20. Chaque être humain possède une certaine connaissance de Dieu. Non pas dans le fait qu’il pourrait comprendre de façon autonome et exhaustive l’existence d’un Dieu créateur du ciel et de la terre. Mais Dieu se fait connaître à chacun. La connaissance de Dieu est toujours et exclusivement le résultat d’une révélation, c’est-à-dire que toute connaissance de Dieu n’est possible que parce que Dieu se manifeste d’une manière ou d’une autre à l’homme. Ainsi, alors que l’homme croît dès sa naissance dans la connaissance de lui-même et du monde qui l’entoure, il grandit aussi dans une connaissance de Dieu. En effet, la création entière témoigne de sa puissance divine. Cependant, l’homme est pécheur, et il supprime cette connaissance pour se construire un monde dont lui seul est le centre. Ce faisant, l’homme rejette la réalité du monde qui l’entoure pour s’enfermer dans un monde mensonger au sein duquel il est devenu lui-même la norme de toute vérité. Il n’en demeure pas moins que l’homme est aussi redevable et responsable vis-à-vis de Dieu à cause de cette connaissance. Et lorsqu’il la supprime en plaçant sur le « trône » de son cœur toute sorte d’idoles, il est répréhensible vis à vis du Dieu qui s’est révélé à lui par le biais de sa création. Cette connaissance rend inexcusable chaque homme qui ne donne pas à Dieu l’hommage qui lui est dû et qui constitue une simple reconnaissance de son Créateur.
La liberté n’exclut pas la responsabilité
On se doit de reconnaître que la notion de liberté de nos jours s’est paradoxalement transformée en une forme de tyrannie qui n’admet plus les notions de responsabilité et de redevabilité. En effet, lorsqu’elle est comprise comme « autonomie », la liberté devient une forme d’égocentrisme totalitaire qui se résume dans une phrase de Judge Dredd, héros de comics : « La loi c’est moi ! ». Et pourtant… notre système juridique français n’a que faire (et heureusement) de cette compréhension de la liberté. L’homme est un être responsable, et sa responsabilité ne trouve sa raison d’être qu’au sein de la relation Créateur-créature qui est le fondement même de son humanité. Cette responsabilité s’articule de façon cohérente avec sa liberté de choix, avec sa capacité de choisir pour lui-même. Sa responsabilité s’exprime donc par le fait qu’il soit redevable à Son Créateur de l’usage de sa liberté. Et sa liberté n’annule pas sa responsabilité, mais c’est le fait d’être un être responsable qui donne tout son sens et toute sa cohérence au principe même de la liberté de choix.Finalement, nous pouvons souligner que la redevabilité de l’homme vis-à-vis de son Créateur trouve son enracinement dans sa qualité d’être personnel créé à l’image de Dieu au sein d’une alliance personnelle (alliance créationnelle). Rejeter cela revient à rejeter la réalité du monde qui nous entoure et qui trouve son origine, sa subsistance et sa raison d’être en Dieu seul. En tant que chrétiens sauvés par grâce, nous devons lui être reconnaissants de nous avoir donné par Son Esprit la vie en Jésus-Christ, pour enfin le reconnaître et lui donner la gloire qui lui est due.
CP : cc by-nc-sa 2.0 Tiago S Costa