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Léa a fermé à clef – double tour – la porte d’entrée de sa péniche-librairie et elle va s’asseoir sur un banc, tout près, au bord du canal.
Il fait bon. Elle a étiré ses jambes devant elle et les laisse reposer au sol, sur les talons. Et elle dépose aussi ses bras, comme de lourdes charges, de chaque côté du corps. Elle soupire, fatiguée. Elle a les yeux fermés. Elle se concentre sur le cri des mouettes.

Tonin a encore les mains pleines des couleurs de ses pinceaux, mais il a eu besoin du dehors et il est sorti de l’atelier. Sur le quai du canal, il est allé se poser comme un oiseau sur un banc.
Là, il est tout regard sur ce qui vient. Et qu’est-ce qui vient ? L’eau, qui passe. Il y a des jours où l’on a l’impression que l’eau du canal est immobile, et d’autres, au contraire, où l’eau s’écoule et emporte, dans son mouvement, celui qui veut bien se laisser porter, emporter, comme lui.

Et des jours passent.
Des jours où Léa entre dans sa péniche-librairie et trottine dans les livres, telle une souris grise, sans lunettes. Des jours où Tonin entre dans son atelier et fait face à la toile, en attente. Et où il part souvent dans le mauve, comme un minuscule insecte qui se perdrait dans un crocus.
Des jours où Léa, ou Tonin, sortent de leur lieu pour s’asseoir sur le banc de consolation.
Et puis un jour …

Léa est sur son banc familier lorsque, quelqu’un, discrètement, s’approche et s’assoit, à l’autre extrémité du banc.
L’eau coule et tournent les mouettes.
Léa se penche légèrement pour observer cet homme, jeune, silencieux, immobile. Il a les yeux clos, une petite moustache, des cheveux noirs, porte un bleu de travail maculé de taches de couleurs et un drôle de petit chapeau sur la tête. Léa sourit et repose à nouveau son dos contre le banc, en refermant les yeux.
C’est lui qui parle le premier.

« J’aimerais être un oiseau. »
Elle a ouvert les yeux, surprise.
« Si j’étais un oiseau, je ne resterais pas ici. Comme ces mouettes. Vous ne trouvez pas qu’elles sont stupides ? »

Léa écarquille grand les yeux.
« Quand on a des ailes, on part !
– Où ? demande Léa.
– Vers la mer …
– Oui. Vous avez raison.
– Vous aimez la mer ? Je vais vous raconter quelque chose … »

Léa s’est redressée. Tonin s’est rapproché. Ils ont les yeux dans les yeux et la parole, entre eux, flotte.
« J’étais désespéré. Je suis parti à la mer, en camion. Tout seul, face à la mer, chercher la consolation.
– Et vous l’avez trouvée ?
– Oui. Vous n’allez pas me croire … Au matin, mal dormi, comme un somnambule, je suis sorti du camion et, sur le capot, savez-vous ce que j’ai trouvé ? Une Bible … Le soleil se levait sur la mer quand je l’ai ouverte, là où un signet était glissé. Et j’ai lu la rencontre de Jésus avec une femme, venue puiser de l’eau au puits, et tellement triste qu’il lui a dit : « Celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif, et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d’eau de vie ». Alors, j’ai bu de cette eau, et depuis, je ne cesse d’en boire … »

Léa est silence.
« La Bible, oui … C’est un livre que je n’ai pas, dans ma librairie … »
Elle tourne son regard vers la péniche-librairie : « L’eau et les rêves ».
« Ah ! C’est vous … murmure Tonin. Moi, j’ai beaucoup cherché dans les livres et dans les rêves, et je n’ai pas trouvé. C’est alors que je suis parti vers l’eau, et j’ai trouvé la vie. « L’eau et la vie », ça me conviendrait mieux … »

Jean 4 : 14
« Celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif, et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui une source qui jaillira jusque dans la vie éternelle.»

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