Le choc culturel dans les Églises Évangéliques

Chaque Église possède sa culture : sa manière de vivre, ses traditions, ses préférences, ses forces et ses faiblesses.

La culture d’une église locale fait son charme et son charisme. C’est elle qui fait de chaque Église une identité unique, irremplaçable. Elle communique rapidement des premières impressions aux visiteurs. Et lorsque cette culture est en décalage avec le quotidien de ce que les gens vivent, c’est le choc culturel.

Le message de l’Église percute : Jésus appelle chaque individu à se reconnaitre pécheur, à abandonner sa vie pour le suivre. Pour une personne qui n’a pas grandi dans une Église, être confronté à l’Évangile est un choc intense. Toute personne non-croyante qui entre dans une Église devrait être choquée. C’est parce que l’Église est choquante dans son message qu’elle doit faire d’autant plus attention à ne pas choquer inutilement dans sa manière de faire. C’est triste, en effet, quand des personnes sont prêtes à endosser le choc de l’Évangile mais qui se sentent en décalage avec la manière de vivre et de communiquer d’une Église et que le choc culturel les en éloigne.

Paul encourage : « Ne soyez une cause de faux pas ni pour les non-Juifs, ni pour les Juifs, ni pour l’Église de Dieu » (1 Cor 10.32). C’est intéressant que l’Église n’arrive qu’en 3eposition dans le raisonnement de l’apôtre…

 

Le patois de Canaan

L’Église de chaque génération développe son propre langage : à partir de métaphores bibliques, de termes théologiques, d’expressions popularisées par des auteurs ou personnalités évangéliques du moment, de termes faisant référence à son histoire ou ses traditions, etc. Ce qui peut être évident pour des croyants qui ont grandi dans une Église, peut être complètement incompréhensible pour un visiteur ou un non-croyant.

Changer sa manière de parler n’affecte pas forcément la profondeur d’un partage. Par contre, cela oblige à développer son répertoire de synonymes. Par exemple, le mot « péché », peu employé dans la société, peut être appelé faute, orgueil, égoïsme, excès, rébellion, désobéissance à Dieu, etc. Je n’emploie presque jamais le terme « sanctification » sans l’accompagner d’un synonyme comme croissance spirituelle, progression dans la sainteté, grandir à la ressemblance de Christ, etc. Si nous voulons que les visiteurs et les nouveaux croyants comprennent les vérités que nous partageons, il faut les rendre accessibles. Des termes comme « alléluia » et « hosanna » se chantent bien mais doivent régulièrement être expliqués.

Nous sommes dans une culture postchrétienne. De nombreux jeunes ne savent même pas qui Jésus est – encore moins qui sont Abraham, Jonas ou Néhémie. Donner quelques phrases explicatives de contexte pour les allusions bibliques permet à certaines personnes de suivre et ne pas de se sentir exclues.

Certaines personnes, lorsqu’elles sont sur scène peuvent communiquer de manière trop paternaliste, avoir une attitude pompeuse, une dignité exagérée ou un langage trop solennel. Ce genre de décalage est incompréhensible pour les gens de l’extérieur.

 

Le style de musique

La Bible encourage à ne pas déplacer « la borne ancienne que tes pères ont posée « (Pr.22.28) ainsi que de continuellement progresser en tant qu’Eglise (1 Thes 4.1). L’équilibre pour certains sujets peut être difficile à trouver ! Sur la question délicate des styles de musique dans l’Église, l’expérience de la génération précédente est très instructive. Le style pop-rock de louange accepté largement de nos jours dans les Églises Évangéliques  a été extrêmement contesté au début. De nombreuses personnes sauvées du style de vie « amour, sexe et rock’n’roll » n’avaient pas envie de se rappeler de cette culture mondaine. Cela se comprend. La tension qui a duré plus de 40 ans a fini par s’estomper. Mon encouragement pour notre Église est de toujours avancer mais sans se précipiter.

Certains chants sont intemporels. Un cantique comme « Dieu Tout-Puissant » sera encore chanté dans 100 ans. D’autres chants vieillissent plus vite. Il faut juger avec sagesse. Une Église dont l’ambiance reflète le Moyen-âge ou les années 60 aura plus de mal à garder ses jeunes. Une Église qui se précipite vers les derniers styles à la mode risquera de perdre l’ancienne génération. Pour ne pas choquer plus que nécessaire, le mieux est de ne garder que les meilleurs chants des générations passées et les meilleurs chants de notre génération. Certains cantiques aux styles désuets restent souvent dans nos répertoires par attachement émotionnel. Si c’est le cas, mieux vaut les renouveler.

 

Le club des chrétiens

« L’esprit de famille » des Églises peut facilement devenir un esprit de club où les habitués se sentent bien entre eux et les autres sont exclus. Cela vous est-il arrivé de visiter une Église où les gens s’entendaient tellement bien entre eux, que personne n’est venu vous saluer ? Ou vivre un culte qui parait comme un rituel où les éléments s’enchainent sans explications, sans que vous vous sentiez invité à prendre part au déroulement ? Ou encore, au moment des annonces vous ne compreniez pas la signification des activités parce qu’elles portaient toutes des noms originaux et bizarres que tout le monde connaissait sauf vous (comme le « club J » pour le groupe de jeunes) ?

Lorsque la communication de l’Église n’est dirigée que vers l’intérieur, il est normal que les gens de l’extérieur se sentent exclus.

 

Des moments de prière déséquilibrés

Vous êtes-vous déjà sentis mal à l’aise pendant un moment de prière lors d’un culte ? Même pour les croyants, les temps de prière peuvent créer un malaise : lorsqu’il y a des trous, lorsque des personnes prient trop longtemps ou prient une liste de requêtes personnelles qui n’impliquent pas l’assemblée, lorsque des individus prient des hérésies, etc. Un temps de prière mal géré dans l’Église donnera autant de mauvaises impressions à un visiteur croyant qu’à un visiteur non-croyant.

Toute assemblée a besoin d’être guidée pour ses moments de prière. L’animateur de la louage peut donner quelques lignes directives : prier en réponse aux chants, de manière courte et comprise de tous, se limiter à un sujet etc.  Mais aussi par l’intervention des responsables de l’Église qui voient en privée les personnes qui peuvent être des éléments perturbateurs. Des moments de prière trop lents ou trop agités mettront particulièrement les nouveaux mal à l’aise.

 

Des traditions inexpliquées

Il y a des centaines de choix à faire pour la gestion d’un culte : le nombre de chants, le style de musique, le choix des instruments, le rôle de l’animateur, la manière de s’habiller, les choix de décoration et d’aménagements des locaux, la place de la chair, le choix de l’éclairage, le temps du message, le style de la prédication, la manière de faire participer l’assemblée, la longueur et le but du temps de prière, la façon de célébrer le repas du Seigneur, les interventions spéciales et les annonces, etc. Par ces choix de préférence, une assemblée crée des habitudes et des traditions. Ces traditions communiquent l’essentiel des priorités d’une assemblée : il vaut mieux bien les choisir !

Les traditions dans l’Église ne sont pas mauvaises. Au contraire. C’est en grande partie par nos traditions que nous parvenons à transmettre notre compréhension des Écritures et leur application à la génération suivante. Le problème est lorsque des pratiques prennent une grande place dans la vie de l’Église sans être justifiées par les Écritures. Quand une manière de gérer le culte ou la vie d’Église se fait « parce qu’on a toujours fait comme cela » plutôt que parce que l’Église a une conviction tirée des Écritures, il y a danger. Les traditions infondées sont illisibles et inintéressantes pour les visiteurs. Elles participent au choc culturel qui peut éloigner des gens en recherche.

 

Conclusion

Dieu utilise les choses faibles de ce monde pour confondre les fortes. C’est un encouragement, sachant que notre manière d’agir sera toujours en décalage avec notre société.  En même temps, autant possible, que les gens soient choqués avant tout par l’Évangile et non par des traditions qui pourraient être facilement adaptées !