Merci à vous les pasteurs

Dans mon voisinage à Toronto, chaque soir, les gens se tiennent devant leur porte d’entrée en tapant sur des casseroles pour célébrer les travailleurs de la santé qui sont en première ligne. Les trottoirs sont couverts d’arcs-en-ciel et de messages de gratitude : « Merci, travailleurs essentiels ! » Ces gestes, dans un contexte de pandémie mondiale, sont tout à fait appropriés. Et pourtant, il y a un autre groupe que je tiens à remercier.

À côté des conducteurs de bus et des employés des magasins d’alimentation, en plus des médecins et des infirmières et à côté des travailleurs et des enseignants des crèches et garderies, je veux remercier les pasteurs.

Maintenant que le pastorat et la prédication sont passés au numérique, je m’inquiète pour les pasteurs. Je m’inquiète pour eux alors qu’ils se tiennent dans leurs maisons, prêchant les Écritures à des pièces vides. Je m’inquiète pour leur lassitude, pour leur propre découragement et leur isolement. Même si certaines parties de l’économie ont commencé à s’ouvrir, on ne sait pas combien de temps l’église restera dispersée, et je crains que les pasteurs oublient à quel point leur travail est important.

Même si certaines parties de l’économie ont commencé à s’ouvrir, on ne sait pas combien de temps l’église restera dispersée, et je crains que les pasteurs oublient à quel point leur travail est important.

D’une certaine manière je suis particulièrement apte à offrir ces remerciements. Je ne suis pas pasteur ou femme de pasteur. Je ne sers pas non plus dans une équipe de responsables dans une église. Au contraire, je représente les personnes les plus ordinaires assises dans l’assistance, dimanche après dimanche, année après année. Je suis une petite fille dont les jambes se sont allongées à l’église, dont la vie a été marquée de façon indélébile par les hommes qui se tiennent derrière les chaires et qui se présentent à nos vies.

Voici quelques-uns de mes remerciements.

1. Merci d’avoir répondu à l’appel.

Quand il était dans sa vingtaine, mon pasteur était un jeune étudiant en droit brillant et ambitieux quand il a rencontré Jésus. Avant sa conversion il rêvait d’habiter dans un des meilleurs quartiers de Toronto, d’envoyer ses enfants dans les meilleures écoles privées et de pouvoir s’octroyer l’adhésion aux clubs les plus exclusifs. Dieu avait d’autres plans. Quand Dan donna sa vie à Christ, il abandonna aussi ses projets de carrière comme avocat. Il a répondu à un appel, d’abord pour un ministère parmi les étudiants, puis pour faire un séminaire et finalement pour implanter une église au cœur du centre-ville de Toronto.

Quand les heures pastorales sont longues, quand le bilan émotionnel est pesant, quand la gratitude est maigre, j’imagine les pasteurs douter de leur vocation, surtout à la lumière des sacrifices. Rares sont les pasteurs qui ne rêvent pas, le lundi, d’emplois plus faciles (et de l’épargne-retraite qu’ils auraient pu accumuler). Mais je tiens à dire combien leur exemple est important. Ils incarnent pour nous une vie investie dans le royaume de Dieu, une vie qui prend au sérieux la promesse de Jésus : « Quiconque aura laissé des maisons, des frères, des sœurs, un père, une mère, des enfants ou des terres, à cause de mon nom, recevra le centuple et héritera de la vie éternelle » (Matt. 19:29).

Quand les heures pastorales sont longues, quand le bilan émotionnel est pesant, quand la gratitude est maigre, j’imagine les pasteurs douter de leur vocation, surtout à la lumière des sacrifices.

Quand je me souviens des sacrifices de mon pasteur, je suis mise au défi d’aimer moins mon confort et d’aimer davantage le Seigneur et mon prochain – ce qui semble être une leçon particulièrement marquante durant cette pandémie. Pasteurs, merci de nous aider à apprendre à écouter l’appel de Dieu, quel qu’en soit le prix.

2. Merci de prêcher les Écritures.

Il y a quelques années, tandis que l’un de nos pasteurs prêchait sur Romains 1, un homme s’est levé dans la mezzanine pour protester bruyamment. « Comment osez-vous ? » disait-il, en agitant le doigt vers le jeune pasteur derrière la chaire, qui avait fidèlement abordé un texte qui heurtait la sensibilité de notre époque. Notre église, bien sûr, est située au milieu de la quatrième plus grande ville d’Amérique du Nord, une ville qui prône la liberté personnelle et la tolérance. Mais que les pasteurs prêchent dans des chaires urbaines ou rurales, chacun doit avoir le courage prophétique de dire la vérité que leurs fidèles (et visiteurs) détestent souvent entendre.

La prédication fidèle d’un pasteur à partir des Écritures, semaine après semaine, est un don pour son église, particulièrement en des temps comme les nôtres. Une immersion régulière dans la Parole de Dieu renouvelle nos pensées et nous aide à devenir le genre de personnes qui discernent la volonté de Dieu pour les contours particuliers de notre propre vie. Cela nous aide à répéter régulièrement l’histoire vraie du monde : que Dieu a fait le monde, qu’il a travaillé pour le racheter en Jésus, qu’un jour vient où la mort et la maladie ne sont plus. Une prédication hebdomadaire fidèle des Écritures nous pousse à reprendre la Bible les autres jours de la semaine : à la lire, à l’étudier, à la mémoriser, à en parler, à se fier à sa sagesse. La Parole de Dieu fournit une ancre d’espoir en ces temps. Pasteurs, nous vous remercions de nous aider à apprendre à l’aimer.

3. Merci de partager nos peines.

Lorsque mon père est mort subitement il y a plus de 25 ans, et que mon frère s’est suicidé plusieurs années plus tard, c’est notre pasteur, Darrel Gabbard, qui est arrivé le premier. Il a été témoin de nos plus récents moments d’horreur, a prêché pour leurs funérailles, a continué à appeler bien après que les casseroles aient cessé d’arriver. Je pense souvent à ce fardeau pastoral : aider à supporter le poids du chagrin des membres de la congrégation.

La prédication fidèle d’un pasteur à partir des Écritures, semaine après semaine, est un don pour son église, particulièrement en des temps comme les nôtres.

Dans une pandémie mondiale, ce partage du deuil est, bien sûr, limité par la distance sociale. Pourtant, le travail n’en est pas moins urgent : aider ceux qui tombent malades, ceux qui perdent des proches, ceux dont la vie est bouleversée par le chômage et d’autres incertitudes. Je suis convaincu que les pasteurs trouveront les moyens de nous accompagner dans la vallée de l’ombre de la mort, même si, pour l’instant, cela signifie des réunions Zoom, des SMS et des appels téléphoniques.

Lorsque la lumière s’éteindra ce soir au-dessus de Toronto et que les gens exprimeront leurs remerciements aux travailleurs essentiels : chers pasteurs, je remercierai Dieu pour vous.