×
Parcourir

Définition

La doctrine de l’élection établit que Dieu a choisi ceux qu’il allait sauver et que son choix précède toute appréciation de notre foi.

Résumé

Dans cet article, j’expliquerai brièvement en quoi consiste la doctrine de l’élection dans son contexte théologique, puis nous l’examinerons de plus près en parallèle à des passages bibliques clés. Une attention particulière sera accordée à l’Évangile selon Jean et à 1 Corinthiens 1. Enfin, nous explorerons les fondements de l’élection et nous appliquerons la doctrine au culte chrétien.

Définition et contexte théologique

Le fait que Dieu choisisse ceux qu’il sauve est un thème récurrent des Écritures. Le décret éternel de Dieu englobe toutes choses, et le salut est également conforme à son dessein bienveillant (Ac 13.48 ; Ro 8.28‑30 ; Ép 1.11 ; 2 Ti 1.9). Dieu sauve ceux qu’il a choisi de sauver (Ép 1.4 ; 1 Th 1.4,5 ; 2 Th 2.13,14, etc.). Voilà, en résumé, en quoi consiste la doctrine de l’élection.

Dans cette doctrine, la « décision » de sauver remonte à Dieu lui-même, dans l’éternité passée. Cette conception affirme que c’est le Créateur, et non l’homme, qui détermine qui sera sauvé (Ép 1.3‑6). Les Écritures déclarent souvent que le règne souverain de Dieu est universel et que son décret de prédestination est entièrement exhaustif. L’élection au salut est un aspect ou une dimension de ce décret : Nous avons été prédestinés « suivant le plan de celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté » (Ép 1.11). Étant un aspect plus restreint du décret éternel et global de Dieu (la prédestination), l’élection peut être considérée comme une sous-catégorie de la théologie propre, aussi connue sous le nom de doctrine de Dieu (Ép 1.11). Cependant, en termes d’exposition biblique réelle, elle peut être considérée comme une sous-catégorie de la sotériologie ; après tout, il s’agit de l’élection au salut (2 Th 2.13). Les théologiens classent souvent en trois catégories les différents aspects du salut : planifié, accompli et appliqué. L’élection relève de l’aspect planifié du salut. Dans ce plan, Dieu le Père choisit ceux qu’il va sauver et envoie son Fils dans ce but (Jn 6.37‑40). Ceux qui sont « choisis » (Ép 1.4, etc.) sont également décrits comme « donnés » au Fils (Jn 6.37,39 ; 10.29 ; 17.2,6‑12,24) et comme ses « brebis » qu’il est venu sauver (Jn 10.11,15,16). En effet, c’est parce qu’ils appartiennent électivement au Christ qu’ils entendent sa voix et viennent inévitablement à lui quand il appelle (Jn 6.37 ; 10.26,27 ; voir aussi Ac 13.48 ; Ro 11.7 ; 1 Th 1.4,5). Cela implique que notre foi en Christ conduisant au salut ne survient pas par accident, et qu’elle ne découle pas simplement de notre propre « décision ». Elle est l’accomplissement du dessein de Dieu de toute éternité (voir Ac 13.48 ; Ro 8.28‑30 ; Ép 1.9,11 ; 2 Ti 1.9). C’est Dieu qui a « choisi » ou « élu » ceux qu’il allait sauver (Ép 1.4 ; 1 Th 1.4,5 ; 2 Th 2.13,14).

L’Évangile selon Jean

Dans l’Évangile selon Jean, les paroles de Jésus à ce sujet sont particulièrement révélatrices : il présente la doctrine de l’élection en évoquant un peuple (les « brebis » de Dieu) « donné » par le Père au Fils et le Fils qui vient les sauver.

… vous m’avez vu, et vous ne croyez point. Tous ceux que le Père me donne viendront à moi, et je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi ; car je suis descendu du ciel pour faire, non ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé. Or, la volonté de celui qui m’a envoyé, c’est que je ne perde aucun de tous ceux qu’il m’a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour (Jn 6.36‑39).

Notez que Jésus définit sa mission salvatrice comme le sauvetage de ceux qui ont été choisis par le Père et qui lui ont été donnés (au Fils) dans ce but.

Dans Jean 10, Jésus n’affirme pas que nous devenons des brebis lorsqu’il nous sauve, mais que nous sommes sauvés précisément parce que nous sommes ses brebis, qui lui ont été données par son Père dans ce but.

J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie ; celles-là, il faut que je les amène ; elles entendront ma voix (Jn 10.16).

Cela signifie que ces brebis sont déjà à lui, et que c’est précisément parce qu’elles lui appartiennent qu’il doit les poursuivre et les ramener à la bergerie (c’est-à-dire les sauver). Quant à elles, il nous assure qu’elles viendront à lui quand il les appellera (Jn 10.26,27). Ses brebis croiront et recevront la vie éternelle.

Quelques versets plus loin, Jésus réaffirme la même chose, mais en des termes plus affûtés et exclusifs :

Mais vous ne croyez pas, parce que vous n’êtes pas de mes brebis. Mes brebis entendent ma voix ; je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle (Jn 10.26‑28).

1 Corinthiens 1 : la dépravation humaine et l’initiative divine

De nombreux passages des Écritures affirment que l’élection au salut ne concerne pas seulement l’Église dans son ensemble, mais aussi chaque croyant individuellement (Ac 13.48 ; Ép 1.4 ; 1 Th 1.4,5 ; 2 Th 2.13,14 ; 2 Ti 1.9 ; 1 Pi 1.1,2). Dans 1 Corinthiens 1, par exemple, l’apôtre Paul fait remonter le salut du croyant à sa source ultime en Dieu : ceux qui sont sauvés (v. 18) sont ceux qui croient (v. 21), ceux qui croient sont ceux qui sont appelés (v. 24,26) et ceux qui sont appelés sont ceux qui ont été choisis (v. 27,28), afin que tous sachent que c’est Dieu seul qui sauve (v. 29‑31).

Cependant, la signification de ce passage va plus loin. L’apôtre Paul présente ici cette doctrine dans le contexte de la souveraineté divine, mais aussi de la dépravation et de l’asservissement de l’homme au péché. Il insiste sur le fait que l’Évangile qui sauve est un message considéré comme une folie par le monde (v. 18‑25). Ce dernier méprise le message même qui peut le sauver. Le problème n’est pas que l’Évangile est difficile à comprendre. Si c’était le cas, les « érudits » de ce monde croiraient à la Parole et les autres ne pourraient jamais en saisir le sens. Or, dans l’ensemble, l’Église est constituée d’une écrasante majorité de personnes ordinaires en comparaison ; cela démontre que le salut n’est pas le fruit d’une quelconque ingéniosité ou perspicacité humaine, mais qu’il découle uniquement de l’initiative et de l’intervention divines (v. 26‑29). Dieu seul a déterminé qui sera sauvé, et par conséquent toute la gloire lui en revient (v. 29‑31). Il n’en reste pas moins que l’homme naturel considère l’Évangile comme une folie inacceptable. Il n’accepte pas l’Évangile, parce qu’étant asservi au péché, il ne peut le comprendre (1 Co 2.14 ; voir aussi 2.1‑16). Le péché obscurcit tellement l’esprit humain que celui-ci ne voit, ni la gloire du Christ, ni la nécessité pour lui de l’accepter. « Mais l’homme naturel n’accepte pas les choses de l’Esprit de Dieu, car elles sont une folie pour lui, et il ne peut les connaître, parce que c’est spirituellement qu’on en juge » (1 Co 2.14 ; voir aussi 2 Co 4.3‑6). C’est la raison pour laquelle Jésus s’est adressé ainsi aux Juifs de son époque qui le rejetaient : « Comment pouvez-vous croire, vous qui tirez votre gloire les uns des autres, et qui ne cherchez point la gloire qui vient de Dieu seul ? » (Jn 5.44.) En effet, on peut dire que l’esprit humain est tellement obscurci par le péché qu’il ne peut pas estimer l’Évangile à sa juste valeur : « Et moi, parce que je dis la vérité, vous ne me croyez pas » (Jn 8.45). L’apôtre Paul souligne la même chose : « Car l’affection de la chair est inimitié contre Dieu, parce qu’elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, et qu’elle ne le peut même pas » (Ro 8.7 ; voir aussi Jn 6.44 ; 8.43). Cet asservissement aveugle au péché rend impossible toute forme d’initiative humaine en matière de salut. Le choix du salut réside nécessairement en Dieu, car notre manque de clairvoyance naturel nous empêche de voir pour croire. Notre salut découle inévitablement d’un choix de Dieu, car nous ne l’aurions nous-mêmes jamais choisi (Ps 14.1‑3 ; voir aussi Jn 15.16).

Cette prise en considération des conséquences aveuglantes de la dépravation humaine est nécessaire si l’on veut éviter une représentation très répandue mais erronée de l’élection. À aucun moment les Écritures n’évoquent le rejet de personnes désireuses d’être sauvées. Toutefois, l’incrédulité de l’humanité et son rejet de Dieu sont universels (Ps 14.1‑3 ; És 53.6 ; Mt 23.37 ; Jn 5.40 ; Ro 3.12). C’est d’ailleurs ce qui rend nécessaire le choix souverain de Dieu, sans lequel tous seraient perdus.

Le fondement de l’élection

Tout cela sert à répondre à la question du fondement de l’élection divine. D’un point de vue négatif, Dieu n’a choisi personne, comme certains tentent de le faire valoir, sur la base d’une foi anticipée. Ce serait impossible à cause de la dépravation humaine et du rejet unanime du monde à son égard. Cela entrerait aussi totalement en opposition avec Éphésiens 1.11 – « celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté » –, qui exclut du salut toute notion d’exception. Dieu n’agit pas de manière aléatoire et prend l’initiative de toute son activité rédemptrice. Il accorde le salut aux uns et le refuse aux autres selon ce qui lui plaît (Mt 11.25,26). Il a choisi par amour (Ép 1.4,5) selon son sage dessein (1 Co 1.18‑31 ; voir aussi Mt 11.25‑27 ; Ro 8.28,29 ; Ép 1.9,11), et non en raison d’une quelconque considération pour les élus eux-mêmes (Ro 9.11,16 ; 2 Ti 1.9). De plus, l’élection dépend de la grâce (Ro 11.5) ; ses raisons résident en Dieu seul. Ce dernier nous a choisis « pour célébrer la gloire de sa grâce » (Ép 1.4‑6). Son objectif n’est autre que sa propre louange. C’est probablement aussi pour cette raison que nombre de personnes composant l’élite mondiale n’ont pas été choisies par Dieu : cela donnerait l’impression que le salut est lié à l’accomplissement personnel, une notion que notre Créateur tenait à exclure. Ainsi, dans l’ensemble, celui-ci a contourné certaines personnes haut placées et en a choisi d’autres à la place (1 Co 1.18‑31 ; voir aussi Mt 11.25,26). Il était déterminé à sauver uniquement de manière à en recevoir tout le mérite.

D’un point de vue affirmatif, la raison pour laquelle Dieu a choisi certaines personnes et pas d’autres reste un mystère. C’est ici que se ferme la porte de la révélation, et il ne nous reste plus qu’à l’adorer pour cela. On nous dit seulement que le fondement de son choix était son propre bon plaisir et qu’il accorde ou retient le salut en conséquence (Mt 11.25,26). L’élection se fait selon la grâce (Ro 11.5), et ses raisons se trouvent en Dieu seul.

L’élection, un sujet de louange

L’élection est donc une raison considérable de louer avec joie et exultation, et c’est ainsi que les auteurs bibliques abordaient sans cesse la doctrine. Il s’agit d’une « bénédiction » salvatrice exceptionnelle pour laquelle nous pouvons chanter :

Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle […] Dieu nous a élus […] il nous a prédestinés dans son amour […] pour célébrer la gloire de sa grâce ! (Ép 1.3‑6.)

S’opposant à notre rébellion et à notre obstination insensées et pécheresses, l’Éternel a prévu de meilleures choses pour nous (Ro 8.28). Pour des raisons qu’il est le seul à connaître, il a choisi de nous sauver, faisant de nous des trophées de sa bonté et de sa grâce (Ép 2.7). Négligeant d’autres personnes, il nous a privilégiés de la meilleure façon possible, en se révélant à nous dans l’amour et en nous permettant de le connaître (Mt 11.25‑27). La louange revient à lui seul (Ps 3.9 ; Jon 2.10), et la juste reconnaissance de sa gracieuse élection suscite en nous le désir de la lui adresser. Dieu nous a sauvés de telle sorte que, lorsque nous exultons, nous ne pouvons le faire qu’en lui (Ép 1.4‑6 ; 1 Co 1.30,31). Comme l’apôtre Jean, nous pouvons proclamer : « Voyez quel amour le Père nous a témoigné, pour que nous soyons appelés enfants de Dieu ! Et nous le sommes » (1 Jn 3.1).

Lectures complémentaires

Remarque : Certaines parties de cet article sont des adaptations de mes courtes interventions dans Lexham Survey of Theology.


Cet essai fait partie de la série « Concise Theology ». Tous les points de vue exprimés dans cet essai sont ceux de l’auteur. Cet essai est gratuitement disponible sous licence Creative Commons avec Attribution Partage dans les mêmes conditions (CC BY-SA 3.0 US), ce qui permet aux utilisateurs de le partager sur d’autres supports/formats et d’en adapter/traduire le contenu à condition que figurent un lien d’attribution, les indications de changements et que la même licence Creative Commons s’applique à ce contenu. Si vous souhaitez traduire notre contenu ou rejoindre notre communauté de traducteurs, n’hésitez pas à nous contacter.