Le bref récit du serpent de bronze (Nombres 21.4-9) est certainement mieux connu que beaucoup d’autres récits vétérotestamentaires aussi sommaires, probablement parce que Jésus lui-même y fait référence dans Jean 3.14-15 : « Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut, de même, que le Fils de l’homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle ». Quelle est la nature du parallèle que Jésus établit ?
Dans le récit des Nombres, il est dit que tout en poursuivant la route que Dieu lui avait indiquée à travers le désert, « le peuple s’impatienta en route, parla contre Dieu et contre Moïse » (v. 5). Il gémit même contre la nourriture que Dieu lui a fournie, la ration quotidienne de manne : « Nous sommes dégoûtés de ce pain méprisable » (v. 5). C’est pourquoi l’Éternel le frappe d’un jugement sous la forme de serpents brûlants. De nombreux Israélites meurent de leurs morsures. Sous le coup du châtiment, le peuple confesse à Moïse : « Nous avons péché, car nous avons parlé contre l’Éternel et contre toi » (v. 7). Il le supplie d’intercéder auprès de Dieu en sa faveur. Dieu donne alors à Moïse l’ordre de fabriquer un serpent en bronze et de le fixer au sommet d’une perche : « Quiconque aura été mordu et le contemplera, conservera la vie » (v. 8). Moïse obéit, et fait ce que Dieu lui dit. Les résultats ne se font pas attendre.
Nous sommes donc en présence d’un peuple ingrat, qui critique ce que Dieu a fait et s’en prend à son conducteur. Il subit le jugement de l’Éternel ; le seul moyen d’échapper à la sanction se trouve dans une disposition que Dieu lui-même prend : il suffit aux personnes mordues par les serpents de porter leur regard sur le serpent de bronze.
Dans Jean 3, la situation de Nicodème n’est pas très différente. Ses premiers mots indiquent qu’il s’estime tout à fait capable de supporter le jugement de Jésus (Jean 3.1-2), alors qu’il ne comprend même pas ce dont Jésus parle (Jean 3.4, 10). Le monde est condamné et périt. Son seul espoir réside dans la mesure que Dieu prend en élevant sur une perche quelque chose d’autre qu’un serpent, ou plus exactement en élevant quelqu’un d’autre sur une croix. C’est la première mention du verbe « élevé » dans l’Évangile selon Jean. Au fil des chapitres, il devient une expression technique pour désigner la crucifixion de Jésus. Le seul remède, le seul moyen d’échapper au jugement de Dieu, c’est de fixer les yeux sur la mesure que Dieu a prise : pour avoir la vie éternelle, nous devons croire au Fils de l’homme qui a été élevé. Cette parole nous est adressée à nous aussi. Les murmures traduisent une incrédulité coupable. Tôt ou tard, nous devrons nous en expliquer devant Dieu. Notre unique espoir consiste à regarder celui qui a été fixé sur une croix.