Les versets 12 à 14 du psaume 144 décrivent une situation idyllique dans le pays : des fils et des filles qui sont en bonne santé et se multiplient, des greniers qui regorgent de biens, des troupeaux qui recouvrent les pâturages, un commerce florissant, une puissante armée pour défendre le pays, l’absence d’une superpuissance régionale menaçante, une prospérité générale et un contentement de tous. Quelle est l’origine ou la cause de ces conditions idéales ?
Le dernier verset résume la réponse à cette question : « Heureux le peuple pour lequel il en est ainsi ! Heureux le peuple dont l’Éternel est le Dieu ! » (v. 15). Cette dernière exclamation ne signifie pas seulement que les gens qui jouissent de ces conditions très favorables sont des gens qui ont choisi la bonne religion. Le sens est différent : si ce Dieu, le seul vrai Dieu, possède un peuple qui le reconnaît comme son Dieu, se confie en lui, l’adore et lui obéit, alors ce peuple est heureux et béni. Ce dernier vers résume ce qui précède, et le reste du psaume explicite cette notion.
Le poème s’ouvre par la louange : « Béni soit l’Éternel, mon rocher » ; le rocher est le symbole qui évoque la stabilité et la sécurité absolues. Ce Dieu entraîne les mains du roi à la guerre ; sa domination providentielle s’exerce en pourvoyant aux besoins de ceux qui ont pour devoir d’assurer la défense du pays et en les fortifiant ; encore faut-il que ces chefs humains s’appuient sur lui et ne pensent pas que leurs succès militaires sont le signe d’une supériorité intrinsèque (v. 1-2). Loin de là ! Car les êtres humains sont éphémères, ils ne sont que des ombres qui passent (v. 3-4). Ce qu’il nous faut, c’est la présence du Souverain de l’univers, son intervention puissante : « Éternel, incline tes cieux et descends ! Touche les montagnes, et qu’elles fument ! » (v. 5). Si Dieu étend la main, il sauve David et son peuple du danger, de l’oppression et de la séduction (v. 7-8). Voilà de quoi inspirer un nouvel élan pour louer celui qui « donne le salut aux rois, [qui] délivre de l’épée cruelle David, son serviteur » (v. 10). La main tendue de Dieu entraîne la sécurité et la fécondité décrites dans les versets 10 à 15.
Il y a là un équilibre rarement bien compris, et encore plus rarement atteint. Il s’applique autant au réveil de l’Église qu’à la sécurité et à la prospérité de l’Israël d’autrefois. Nous reconnaissons d’une certaine façon la nécessité absolue que Dieu incline les cieux et descende. Mais cette attente ne doit pas entraîner la passivité ou le fatalisme. David sait que la force du Seigneur le rend capable de combattre victorieusement. Ne cultivons ni une mentalité arrogante qui consiste à nous croire capables d’accomplir des prouesses par nos propres forces et qui repousse l’intervention de Dieu aux calendes grecques, ni une spiritualité qui confond passion et passivité. Ce qu’il nous faut, c’est la force du Dieu souverain, du Dieu qui transforme les êtres, les choses et les situations.