Au cas où quelqu’un, après avoir lu 1 Corinthiens 4, aurait conclu qu’il n’y a pas de règles à observer dans l’Église – car, après tout, le respect de règles n’oblige-t-il pas à juger ceux qui ne les observent pas ? -, le chapitre suivant, 1 Corinthiens 5, montre que l’apôtre Paul condamne sévèrement l’Église de Corinthe pour ne pas avoir exercé le jugement et la discipline. Disons d’abord quelques mots sur le cas présent avant de voir comment il se rattache au chapitre précédent.
À propos de l’homme décrit en 5.1, Paul met en évidence deux maux. Le premier est de nature sexuelle. Un membre de l’Église a « la femme de son père ». Par cette expression, Paul indique que l’homme en question couche avec sa belle-mère. Ce péché est tellement flagrant et odieux qu’il choque même les païens. Le second est la réaction lente et indolente de l’Église. Malgré la gravité de la faute commise au sein de leur assemblée, la tendance des membres à se pavaner, qui se remarque dans plusieurs chapitres de 1 et 2 Corinthiens, ne faiblit pas. Les chrétiens auraient dû être écrasés de tristesse ; ils auraient dû excommunier le coupable (v. 2).
Nous ne pouvons pas aborder tous les éléments de ce jugement, mais nous pouvons remarquer ce qui suit.
1° Paul aurait souhaité que l’Église prononce un jugement communautaire. Tous les membres, assemblés « au nom du Seigneur Jésus » (v. 4), doivent agir, pleinement conscients que Jésus est présent au milieu d’eux et qu’il est puissant. Le refus de sanctionner est une faute grave de toute l’Église.
2° S’il faut prendre des mesures disciplinaires, c’est parce « qu’un peu de levain fait lever toute la pâte » (v. 6) ; le mal qui se commet dans l’assemblée et que personne ne dénonce finit par contaminer l’Église tout entière. 3° Cela n’a rien à voir avec le jugement porté sur le monde extérieur. Pour Paul, le monde permet au péché de proliférer en son sein. Ce qui importe à l’apôtre est que l’Église exerce la discipline en son sein (v. 9-10). 4° Selon Paul, la discipline que l’Église doit exercer ne se limite pas au domaine sexuel ni à cette forme particulière de péché sexuel. La correction doit s’appliquer à tout péché moral important, dont il donne une liste indicative : cupidité, idolâtrie, médisance, ivrognerie, escroquerie. Ailleurs, il ajoute des fautes morales graves dans deux autres domaines : les déviations doctrinales importantes et la tendance persistante au schisme.
Il invite ensuite ouvertement les chrétiens à juger tous les coupables de choses pareilles (v. 12-13). Les chrétiens doivent juger « ceux du dedans », alors que Dieu juge « ceux du dehors ». Il faut maintenir la tension des chapitres 4 et 5 pour les garder en équilibre. De plus, au chapitre 4, Paul reproche aux Corinthiens d’émettre des jugements qui vont « au-delà de ce qui est écrit » (4.6), c’est-à-dire qu’ils s’appuient sur des normes et des critères qui n’ont aucun fondement dans la révélation de Dieu et ne tiennent compte que des intérêts partisans. Au chapitre 5, Paul leur reproche de ne pas prononcer de jugement malgré ce que l’Écriture, bien comprise, déclare.
Les deux attitudes sont des transgressions de la révélation divine.