Il vaudrait mieux intituler la parabole dite du semeur (Marc 4.1-20) la parabole des sols, car la variable qui lui donne vie et profondeur, ce sont les différentes natures de sols dans lesquels le semeur jette la semence.
Comme Jésus interprète lui-même l’histoire qu’il raconte, nous n’avons aucun doute quant à ce qui est important. La semence, c’est la « parole », plus précisément la Parole de Dieu, qui équivaut à l’Évangile, la Bonne Nouvelle du royaume. Comme le fermier d’autrefois qui jetait la semence par pleines poignées sur la terre, la parole se répand partout. Inévitablement, une partie tombe sur des endroits qui, pour une raison ou une autre, lui sont peu propices. C’est le cas du sentier que foulent les passants, où les oiseaux viennent la prendre avant qu’elle ait eu le temps de prendre racine, et la mangent; ou des endroits où elle pousse à l’ombre des buissons épineux qui l’étouffent et l’empêchent de se développer; ou encore les endroits où la couche de terre arable est tellement mince que la semence ne peut plonger ses racines assez profondément pour puiser l’humidité nécessaire à sa croissance. Les parallèles avec la manière d’écouter sont évidents. Certaines personnes sont endurcies et n’offrent aucun accès à la parole; d’autres sont vite distraites par les sources d’amusement que Satan propose; d’autres constatent que les soucis et les richesses suppriment tout intérêt aux choses spirituelles; d’autres encore entendent la parole avec joie et semblent annoncer une belle récolte, mais la parole ne pénètre jamais assez profondément en eux pour que la vie spirituelle soit nourrie. Mais remercions Dieu pour le terrain qui produit du fruit et parfois du fruit abondant.
Jusque-là tout est bien clair. Pourtant, deux autres traits de la parabole méritent réflexion.
1° Comme beaucoup d’autres paraboles, celle-ci corrige l’idée très répandue que la venue du Messie allait s’accompagner d’un changement radical: ce qui est coupable et sale serait condamné, et ce qui est juste et propre entrerait dans un règne transformé. Voilà comment les hommes s’imaginaient l’instauration du royaume. Or, Jésus décrit l’inauguration du royaume de manière légèrement différente. Dans la parabole de la graine de moutarde (v. 30-32), par exemple, il compare le royaume à un arbre qui commence très petitement pour atteindre une taille importante; il est question de crois- sance, non d’une apothéose spectaculaire. La même leçon se dégage de la parabole du semeur: actuellement, la parole est répandue abondamment et les gens la reçoivent de différentes manières et avec des rendements très divers.
2° La vie ne prend pas racine et ne porte pas du fruit forcément chez tous ceux qui manifestent les premiers signes du royaume. Cette vérité mérite d’être méditée et requiert un sérieux examen de soi.