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Pour bien comprendre la force d’Amos 6, il faut se pencher sur deux thèmes : l’autosatisfaction et l’élite au pouvoir.

1° Je commence par rappeler une anecdote que j’ai déjà rapportée dans la méditation du 15 janvier. L’un de mes professeurs d’histoire du lycée raconta comment il avait été démobilisé vers la fin de la Seconde Guerre mondiale à cause de ses blessures. Il avait vu beaucoup de ses compagnons d’armes tomber autour de lui ; d’autres étaient encore au front. Il voyageait en bus dans une ville canadienne et entendit une femme visiblement riche et vaniteuse dire à sa voisine : « J’espère que la guerre ne prendra pas fin de si tôt. Nous n’avons jamais été si prospères ». Il faut dire que son mari gagnait de l’argent dans la fabrication d’armes.

C’est la face laide de l’autosatisfaction égoïste. Le tableau de « ceux qui vivent tranquilles dans Sion » (v. 1) n’est pas moins répugnant. Ils sont là à gratter leurs guitares, s’imaginant être des musiciens aussi doués que David (v. 5), savourant bruyamment leur bière, dans une atmosphère chargée de parfums (v. 6). Ils ne se lamentent pas sur tout ce qui est mal et corrompu.

2° Presque toute société donne naissance à une élite. La monarchie absolue et la dictature communiste le prouvent très clairement. Le communisme, cette philosophie qui en théorie abolit les classes, développe sa propre élite, forme ses propres cadres ; les privilèges autrefois liés à la naissance sont remplacés par ceux de l’appartenance au parti et au pouvoir politiques. Dans les démocraties, il peut exister une certaine égalité des chances, mais cela n’équivaut pas à la disparition des classes. Dans le meilleur des cas, l’égalité des chances garantit une certaine mobilité à l’intérieur d’une société plus ou moins stratifiée : des gens du dehors peuvent entrer dans le cercle plus fermé et pénétrer l’élite. L’aristocratie et la dictature sont remplacées par la « méritocratie », le règne des riches et des nobles cède la place à la domination des parvenus, des malins et des vicieux. C’est évidemment presque inévitable, comme de nombreux sociologues l’ont expliqué : pour des raisons pratiques, le gouvernement direct par le peuple est impossible. Il faut que des représentants, des gens mandatés prennent des décisions et dirigent les affaires, ce qui crée un nouveau bloc de pouvoir. Le plus grand bienfait de la démocratie est peut-être d’éliminer les gens incompétents au
bout de quelques années et de les remplacer par des gens plus compétents.

Cela dit, dans la perspective de Dieu, le leadership va de pair avec la responsabilité. Amos 6 vitupère contre les capitales de Juda et d’Israël (Sion et Samarie) et contre les « grands » (v. 1). L’horrible satisfaction personnelle que dénonce ce chapitre est celle des chefs et des leaders qui sont à l’origine de la décadence, des magouilles, des injustices et de la perversité théologique. Dans l’Église et la culture ambiante, où le leadership et l’autosatisfaction se donnent-ils la main ? À quels niveaux ? Quel regard Dieu portet-il sur cette situation ?

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