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L’Éternité dans leur cœur

A travers son livre, Don Richardson veut encourager les chrétiens à être zélés pour la mission en regardant à l’œuvre de Dieu parmi les peuples et en voyant combien l’Évangile est pour tous les peuples.

Dans la première partie de son livre, Richardson nous montre que de nombreux peuples qui adhèrent à des religions tribales ont en fait un concept de Dieu unique, Suprême qu’ils vénèrent, avec la conscience d’avoir perdu le lien avec lui. Cette connaissance peut alors servir de tremplin à l’Évangile, si seulement des personnes se lèvent pour aller l’annoncer. Ainsi, Pachacuti, le dirigeant des Incas du XVe siècle avait découvert que le soleil que son peuple adorait comme Dieu n’était en fait qu’une création. Il avait alors renoué avec le Dieu unique adoré des siècles avant par son peuple et qui était appelé Viracocha. Malheureusement, il ne transmit pas cette vérité à son peuple (juste aux élites), ce qui fit qu’elle se perdit avec l’arrivée des conquistadors espagnols. On peut encore citer d’autres peuples qui avaient cette connaissance du Dieu Unique : les Santals d’Inde, les Gédéos d’Éthiopie, les Mbakas de Centrafrique, etc. A travers tous ces peuples, on voit que « le concept d’un Dieu Suprême ne saurait être le monopole de ce qu’on appelle « les civilisations évoluées » ! »1. Bien que chaque peuple avait son nom pour désigner ce Dieu Unique, Suprême, ces termes peuvent être utilisés pour désigner le vrai Dieu si aucune fausseté n’y est attachée. Mais parfois le concept de « Dieu » peut être souillé par l’occulte lui faisant perdre tout son sens. Ainsi, par exemple, le terme grec Zeus qui désignait le Dieu tout Puissant finit par être associé à des faussetés (parents de Zeus, etc.) qu’il en perdit son sens original et fut abandonné par ceux voulant désigner un Dieu Suprême, incréé.

La connaissance d’un Dieu unique, Suprême, bienfaisant dans des sociétés « primitives » étonne les anthropologues qui ont souvent un présupposé évolutionniste. Pour eux, même la religion évolue, mais en parallèle avec la société humaine. Ainsi, le concept de Dieu Suprême ne pourrait pas exister avant que naisse la monarchie. Pourtant l’étude approfondie des sociétés dites primitives montre que « 90 % des religions tribales dans le monde sont imprégnées de présuppositions monothéistes »2 . On retrouve ainsi très souvent l’existence d’un « Dieu du ciel ».

L’éternité dans leur coeur - Première • Quatrième L’éternité dans leur coeur [Broché] L’histoire ignorée du christianisme dans les religions locales des peuplades anciennes

L’éternité dans leur coeur - Première • Quatrième L’éternité dans leur coeur [Broché] L’histoire ignorée du christianisme dans les religions locales des peuplades anciennes

Jeunesse en Mission. 208 pages.

Dans une fascinante suite d’histoires bien documentées, qu’il s’agisse du peuple santal en Inde ou des philosophes cultivés de l’Athènes antique, Don Richardson relate, au travers d’incroyables exemples, comment le concept d’un Dieu suprême a subsisté depuis des siècles dans des centaines de cultures du monde entier.

Missionnaire canadien, Don Richardson est l’auteur des best-sellers Peace Child, traduit en français sous le titre L’enfant de paix (aux éditions Vida) et Lords of the Earth. Il est connu pour son travail d’anthropologue et de linguiste parmi les Sawis, peuple de l’âge de pierre en Irian Jaya ou Nouvelle Guinée Occidentale.

Jeunesse en Mission. 208 pages.

Mais pour les anthropologues classiques, la religion évolue avec l’homme et ce dernier finit par s’en débarrasser car il comprend mieux le monde grâce à la science. Les idées d’évolution de la religion furent reprises par des philosophes et influencèrent le communisme international qui devint anti-religieux et persécuta, tua les juifs, les musulmans, les bouddhistes et les chrétiens. L’idée de développement plus rapide de certains hommes fut reprise par Nietzsche, lequel fut repris par Hitler pour donner naissance au nazisme. « C’est donc ainsi que la science de l’anthropologie, à cause de la prise de position de ces fondateurs contre Dieu, a présidé sans le savoir à la naissance de deux des aberrations les plus violentes de l’histoire… »3, ce qui causa des dizaines de millions de morts.

Même si les anthropologues ne le reconnaissent pas, ce Dieu du ciel comme certains l’ont appelé, existe bien dans de nombreuses religions tribales, et il cherche à se faire connaître. Ainsi, il se rapproche des tribus et leur parle chaque fois que des messagers chrétiens arrivent. Il indique qu’il est le Dieu qui est annoncé. Pour l’auteur, cela explique l’accueil phénoménal obtenu par le christianisme auprès de peuples de religions différentes dans le monde. Cela conforte les Écritures qui attestent que Dieu n’est pas sans témoignage dans le monde, même en-dehors de la prédication de l’Évangile.

Des missionnaires aidés par ce phénomène de connaissance du Dieu du ciel dans les religions du monde ne l’ont pas fait connaître : sans doute par peur de la remise en cause de leur envoi, par peur d’être considérés non orthodoxes ou par peur d’une critique sur la suffisance de la Bible et son caractère de révélation spéciale ; ou encore parce que ces présuppositions seraient des erreurs, des déviations sataniques. Ces erreurs et déviations peuvent exister, Don Richardson le reconnait, mais pour lui, la reconnaissance du Dieu suprême par les religions tribales n’en est pas une.

En plus d’avoir la conscience de l’existence d’un Dieu unique, Don Richardson nous apprend que certains peuples avaient la croyance qu’il existait un Livre qui parlait de ce Dieu, que le Livre était perdu, mais qu’un jour, quelqu’un viendrait chez eux avec le Livre. Ce fut le cas par exemple des Karens et des Kachins de Birmanie, des Lisus de Chine, etc. Quand des missionnaires vinrent auprès de ces peuples, ils reçurent l’Évangile avec empressement, de sorte qu’il y eut des milliers de conversions en quelques années. Les ouvertures parmi ces peuples se sont faites « au travers de leurs religions tribales respectives et non malgré elles »4. Cela, les anthropologues non chrétiens ne l’ont pas compris. Pour eux le christianisme est une religion occidentale qui ne fut acceptée en Asie et en Afrique que dans le sillage des empires coloniaux, et qui disparaitrait avec leur disparition. Mais en réalité, ces conversions furent réelles et le christianisme gagne toujours du terrain, de sorte qu’aujourd’hui, il grandit plus en Afrique et en Asie qu’en Europe.

Les religions tribales de ces peuples furent des alliées pour la réception de l’Évangile. Lorsque les chrétiens tardèrent à arriver auprès de certains peuples, Satan a plaqué des religions formelles (islam, hindouisme, bouddhisme, etc.) sur les religions tribales, les empêchant ainsi de jouer le rôle d’alliées. La réception de l’Évangile est alors plus difficile, mais pas impossible.

Enfin, toujours concernant la préparation des peuples à l’Évangile, Don Richardson note que certains peuples ont des coutumes étranges au premier abord mais qui peuvent en fait être utilisées comme ponts pour l’Évangile.C’est le cas du peuple Dayak de Bornéo, qui dépose ses péchés sur un bateau envoyé au loin avec tout un rituel, 1 fois par an. Cela fait bien sûr penser au jour de l’expiation dans l’Ancien Testament. Mais l’auteur nous met en garde : « il faut toujours étudier le motif qui se cache derrière une coutume donnée avant de tirer des conclusions sur un rapport virtuel avec les concepts bibliques »5. En effet, si la coutume des Dayak ressemble à celle du jour de l’expiation chez les juifs, les bouddhistes aussi envoient des bateaux éclairés dans la nuit, mais c’est pour emporter l’esprit des morts ou apporter des offrandes aux morts.

A travers cette première partie, l’auteur nous montre que Dieu a un cœur pour les peuples. Il a ainsi permis que des éléments le concernant demeurent, même dans leurs croyances souvent erronées. Ce sont des ponts formidables pour l’Évangile qui ne demandent qu’à être utilisés. Mais pour cela, il faut des gens pour l’annoncer. C’est réjouissant de constater l’œuvre de Dieu parmi les Nations, et cela encourage à la faire connaître et à y prendre part. Que le Seigneur continue d’envoyer des ouvriers dans Sa moisson !

Dans la deuxième partie de son livre, Don Richardson veut nous montrer que l’Évangile était prévu dès le début pour toutes les Nations.

Pour cela, il remonte tout à l’alliance avec Abraham. Elle est pour lui le point de départ de la mission de Dieu. Dieu s’engage à bénir Abraham et sa descendance, et à travers eux tous les peuples. Pour l’auteur, la bénédiction promise à Abraham est en fait la rédemption par le Messie et les bénéficiaires en sont tous les peuples de la terre. L’Ancien Testament donne ainsi des exemples de fils et filles d’Abraham qui ont été une bénédiction pour les autres Nations : Joseph pour l’Egypte, Daniel et ses amis aux Babyloniens, Jonas pour Ninive, etc. Et dans le Nouveau Testament, on voit une connexion claire entre l’alliance à Abraham et l’œuvre de Jésus-Christ dont elle est le développement. Par son œuvre, toutes les familles de la terre sont bénies, notamment les païens. A travers Jésus-Christ la « vraie » postérité d’Abraham, les païens peuvent aussi devenir la postérité d’Abraham. Pour l’auteur, l’alliance avec Abraham est essentielle car elle est la « colonne vertébrale de la Bible »6. Il considère que si cette vérité avait été bien comprise et bien communiquée, les chrétiens auraient plus de zèle pour la mission. En effet, on voit tout au long de la Bible que Dieu cherche à accomplir cette alliance, pour laquelle il s’est engagé par serment. C’est donc naturel de retrouver en Apocalypse la mention d’une foule composée de toute nation, de tout peuple, de toute tribu, de toute langue louant Dieu.

Jésus lui-même avait conscience que son œuvre était à ancrer dans cette alliance. Pour Don Richardson, toute la vie de Jésus, sa mort et sa résurrection furent étroitement liées à la promesse de bénédiction de tous les peuples à travers la bénédiction d’Abraham et de sa descendance. Matthieu le montre en faisant remonter la généalogie de Jésus à Abraham, en citant le cantique de Marie qui parle du serment à Abraham ou encore en citant Siméon qui déclare qu’il a vu le Messie, salut pour tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire d’Israël. Par ailleurs, Jésus a des ancêtres païens (Tamar, Ruth et Rahab) et a commencé son ministère en Galilée, région où résidaient de nombreux païens. Jésus a rempli son ministère en étant un homme pour tous les peuples, en servant et en aimant les Gentils et les Samaritains autant que les Juifs. Richardson a raison de le souligner car cela est vrai, mais malgré tout, Jésus a donné une priorité aux juifs, ce qu’on ne peut nier.

Don Richardson ajoute que le mandat missionnaire donné par Jésus n’était pas une surprise. En effet, il a accueilli les samaritains et les Gentils qui le visitaient, les prenant souvent en exemples de foi. Il avait pleinement conscience de son rôle de Sauveur du monde, et pas seulement des juifs, ce qu’on peut voir dans ses déclarations. Il a à cet égard déclaré que la moisson était abondante en parlant des Samaritains en Jean 4, ou encore dit qu’il attirerait tous les hommes à lui après sa mort (pas juste les juifs) en Jean 12.32. Pour l’auteur, malgré le projet de Jésus pour tous les peuples, ce dernier n’envoya ses disciples que vers les Juifs dans les Évangiles parce que ces derniers n’étaient pas prêts psychologiquement et spirituellement à la mission interculturelle, bien qu’il les a préparés en leur disant qu’un jour ils témoigneraient devant des gouverneurs et des rois. L’auteur ajoute que ce fut sans doute la raison pour laquelle Judas le trahit, voulant que les bénéficies spirituels et financiers apportés par Jésus ne soient que pour les juifs et plus particulièrement aux douze, et surtout pour lui. Que les disciples n’aient pas compris la portée universelle de l’œuvre de Jésus, on ne peut le nier. Mais je trouve que l’auteur extrapole un peu ici sur la raison de l’absence d’envoi des disciples vers les non-juifs.

Toujours est-il qu’après sa résurrection, Jésus a clairement donné l’ordre aux disciples de porter l’Évangile au monde, vers tous les peuples. Mais ils ont résisté à cet ordre, en raison de leur ethnocentrisme. Dieu leur avait pourtant donné le Saint-Esprit, avec le signe du parler en langues, pour qu’il soit « clair comme de l’eau de roche que la puissance du Saint-Esprit était, et est encore, donnée dans le but extrêmement précis d’évangéliser tous les peuples alentour »7. Ils n’ont pourtant apporté l’Évangile qu’à Jérusalem, pendant une bonne période. Dieu dût donc les forcer à accomplir son ordre de mission par la persécution, ce qui conduisit les chrétiens qui fuyaient Jérusalem à évangéliser sur leur chemin. Philippe évangélisa la Samarie et quelques bourgades. Pour qu’un apôtre, Pierre, aille évangéliser un païen, Dieu dût lui donner la même vision 3 fois. L’Église de Jérusalem critiqua Pierre, avant de finalement comprendre que l’Évangile était pour tous. Malgré cela, lorsque des juifs convertis allèrent dans d’autres pays, la majorité n’apporta l’Évangile qu’aux juifs.

Ce n’est qu’avec Paul (et Barnabas) que l’évangélisation des païens prit de l’ampleur. Il avait compris que les païens n’avaient pas à se soumettre à la Loi de Moïse et pouvaient se gouverner eux-mêmes en églises. Cela finit par être accepté par les apôtres restés à Jérusalem, qui décidèrent de continuer d’évangéliser les Juifs, tandis que Paul et Barnabas se chargeraient des non-juifs. L’auteur s’étonne de cette proportion étonnante d’apôtres pour les juifs, et il y a de quoi en effet. Mais cela ne dura pas ainsi ; selon la tradition, tous les apôtres, sauf Jacques, finirent par quitter Jérusalem et apporter l’Évangile ailleurs, même si on ne sait pas si ce fut par compréhension de leur ordre de mission ou à cause de la destruction de Jérusalem. Toujours est-il que l’Évangile finit par se libérer du particularisme juif pour se répandre dans le monde entier, comme une force spirituelle au-dessus de toutes les cultures, et le christianisme finit par être séparé du judaïsme.

Sur la trace des premiers chrétiens et des apôtres, des chrétiens vont en mission, mais ils ne sont qu’une minorité selon Don Richardson. Il ajoute que nous, les chrétiens d’aujourd’hui sommes les conséquences de l’œuvre de cette minorité, que nous pouvons imiter dans leur élan missionnaire.

« Par conséquent c’est entre nos mains que se trouve la possibilité d’amener à son plein épanouissement cette promesse de Dieu vieille de 4000 ans »8. On peut toutefois ajouter que tous les chrétiens ne sont pas appelés à partir, donc peut-être que c’est normal qu’il n’y ait qu’une minorité qui parte en mission (au sens classique du terme). Par contre, cette minorité reste trop peu nombreuse, il faut donc que des ouvriers continuent d’être envoyés et que ceux qui restent les soutiennent et œuvrent pour le royaume, partagent l’Évangile là où ils sont.

La lecture du livre de Richardson (bien qu’impossible à faire en une semaine) fut encourageante pour moi. C’est assez incroyable de se rendre compte que de nombreux peuples ont des concepts d’un Dieu unique, Suprême, Créateur et bienfaisant. Cela rappelle à quel point Dieu aime les peuples, a des projets pour eux, et ne les laisse pas complètement se perdre, même s’ils n’ont pas encore entendu l’Évangile. Il les y prépare et nous pouvons œuvrer avec Lui pour le leur annoncer. Je n’en avais pas connaissance, et cela pourrait être un formidable encouragement à la Mission pour d’autres.

Ce fut aussi très intéressant tout ce rappel sur l’importance de la promesse à Abraham. En tant que chrétiens, nous savons (la plupart du temps) qu’il s’agit d’une alliance inconditionnelle que Dieu a réalisée en Jésus-Christ, la vraie descendance d’Abraham. A travers Lui, tous les peuples de la terre peuvent être bénis, en acceptant son œuvre de rédemption. Nous le savons, mais il est vrai que cette alliance n’est que rarement utilisée dans des discours sur la Mission. On a tendance à beaucoup insister sur le mandat missionnaire et donc sur le côté « impératif » de la Mission, comme ordre du Seigneur. On gagnerait à exploiter plus le côté bénédiction pour les peuples de celle-ci à travers l’alliance avec Abraham. J’essaierai de garder cela en tête.

1 RICHARDSON Don, L’Éternité dans leur cœur, Éditions Jeunesse en Mission, Yverdon-les-Bains Suisse, 2007.

2 Ibid, p 49

3 Ibid. p 54

4 Ibid. p 104

5 Ibid. p 119-120

6 Ibid. p 144

7 Ibid. p 174

8 Ibid. p 187

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