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La priorité de Noël

Noël revient une fois encore. Comme tous les ans, la musique traditionnelle de Noël accompagnera le stress du shopping. Comme tous les ans, ce sera la course à qui aura le meilleur cadeau. Comme tous les ans, nombreux seront nos contemporains à s’endetter au rythme incessant des guirlandes. Comme tous les ans, Noël reviendra avec ses critiques de chant, ses utilisations sociales de Jésus, et ses controverses quant à la date exacte de sa naissance. Les réseaux sociaux seront noyés de débats intra-chrétiens condamnant nos prédécesseurs dans la foi pour avoir « trahi » Jésus, voire paganisé l’Eglise. Pendant ce temps, nos contemporains vivront Noël, esclaves d’une vision purement matérielle du monde. Pendant ce temps, nous passons à côté de la période de l’année la plus favorable au témoignage de la réconciliation.

Une question de priorité

Est-ce que cela veut dire que ces débats n’ont aucun intérêt ? Est-ce que cela signifie qu’il faut absolument ne pas chercher à être toujours plus ancrés dans la Bible dans tout ce que nous disons, pensons, écrivons, et croyons ? Bien sûr que non ! Il est important de nous demander si ce que nous chantons est fidèle à la Bible… de la même manière qu’il est crucial de nous demander si nous prêchons fidèlement. Il est important de discerner comment pratiquer l’accueil et le soin des plus faibles. Et Jésus étant Dieu incarné, dans la chair, alors il est bien né un certain jour—que nous pussions le déterminer avec certitude ou non. Ce qui me pose problème, c’est l’absence de priorités.

Le débat, surtout celui qui exige une réponse émotionnelle, a pris le pas sur la perspective globale de notre témoignage. Tous les débats, tous les désaccords sont déterminants pour la foi. Tout sujet, quelle que soit son importance, est un critère séparant la fidélité de la trahison. Célébrer la naissance de Christ le mauvais jour est une erreur quasi impardonnable. Chanter Sur la paille fraîche peut être un signe d’hérésie christologique. Et les exemples sont nombreux…

Le problème n’est pas que ce n’est pas important. Le problème, c’est une mise en rapport entre ce que nous défendons et la manière et le moment où nous le défendons. Le problème, c’est que nous avons perdu l’art et la manière de vivre notre foi. Nous ne pouvons pas défendre notre foi tout le temps de la même manière. Nous devons choisir le temps et la manière de présenter et défendre telle ou telle implication de la foi que nous avons reçue.

Noël, la descente du Sauveur

La question que nous devons nous poser n’a rien d’original. Elle va de soi, surtout en cette période de l’Avent. La question essentielle est la suivante : que célébrons-nous à Noël ? Dans le silence et le froid de Judée, qu’avons-nous vu ? Dieu a visité son peuple. Il a entendu le cri des pauvres, et des opprimés, mais aussi ceux qui sont esclaves de leurs richesses. Dans le silence et le froid de Judée nous voyons la « visitation » de Dieu, venu pour les aveugles de Jéricho et pour les Zachée. Que célébrons-nous à Noël ? La venue de Dieu qui, selon sa promesse « est venu secourir son peuple et l’a délivré ! » (Lc 1.68). Nous nous réjouissons parce que Dieu a fait se lever le salut (Lc 1.69). Nous chantons parce que Dieu « a fait briller sur nous une lumière d’en haut, semblable à celle du soleil levant » (Lc 1.78).

Un homme et une femme, au milieu de tout le peuple d’Israël, peuvent nous servir de guides. Peut-être que leur société se perdait en débats mal placés, ou en arguments importuns. Peut-être que leur cercle religieux préférait un bon désaccord théologique que l’attente fidèle du Messie. Puis, Anne, fidèle d’entre les fidèles, connaissait la priorité et « parlait de l’enfant à toutes les personnes qui attendaient que Dieu délivre Jérusalem » (Lc 2.38). Puis, Siméon, plein de foi, pouvait confesser :

« 29 Maintenant, ô maître, tu as réalisé ta promesse :

tu peux laisser ton serviteur aller en paix.

30 Car j’ai vu de mes propres yeux ton salut,

31 ce salut que tu as préparé devant tous les peuples :

32 c’est la lumière qui te fera connaître aux populations

et qui sera la gloire d’Israël, ton peuple. »

Noël, c’est la réalisation de la promesse pour tout ceux qui l’attendaient, et plus encore pour ceux qui l’ignoraient. C’est la promesse pour les esclaves sexuels, et pour les prédateurs, pour ceux qui sont consumés par leur consommation, et ceux qui désirent une société plus juste, pour ceux qui désirent accueillir et ceux qui veulent la sécurité. Noël n’est pas pour les uns ou pour les autres, mais pour les injustes, ceux qui se soumettent à une idole. Quelle qu’elle soit.

Il y aura bien sûr un temps pour toutes ces autres choses, car les implications de la foi en ce bébé déjà Sauveur sont radicales. Peut-être trop. Elles exigent une allégeance sans compromissions, sans exceptions, au Roi de l’univers. Mais ce temps n’est pas celui de l’Avent, ou celui de Noël. Le temps dans lequel le cycle des années nous plonge est celui de l’attente, dans la nuit, du retour du Sauveur. Le temps que nous vivons est d’autant plus un temps de témoignage qu’il commémore la venue du Sauveur. Célébrons, devant les yeux d’un monde qui se perd, la naissance du Sauveur, le Médiateur de la réconciliation, le grand Rassembleur de son peuple. Notre célébration de Noël doit aussi être une démonstration visible du salut gratuit et immérité que nous avons reçu.

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