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Au niveau social, mon adolescence a été un cauchemar. J’ai grandi dans le Sud rural des États-Unis, mais je ne rentrais absolument pas dans moule de la masculinité telle qu’elle était vue là-bas. Le sport ne m’intéressait pas le moins du monde ; jouer à la bagarre me mettait mal à l’aise ; et tuer des animaux innocents me semblait cruel et écœurant. Bien évidemment, je n’ai jamais osé proférer à voix haute de tels blasphèmes, ç’aurait été stupide de ma part ! Mais j’étais complètement à l’opposé de ce que ma culture (celle des chasseurs virils aux bandanas flanqués de la bannière étoilée) voulait que je sois.

J’étais un garçon sensible. J’aimais lire. J’aimais dessiner. J’aimais écrire mon journal intime. Je n’étais pas le genre de garçon à se rouler dans la boue, ni à aimer chasser le sanglier.

Le cauchemar est devenu encore plus horrible (aussi horrible que Freddy Krueger) quand je compris que j’étais attiré par le même sexe. Alors que mes camarades garçons craquaient pour les filles, moi je craquais pour eux. Jusqu’à mes 19 ans, je ne prononçai jamais le mot « gay » pour me décrire et personne n’avait connaissance de ma prétendue orientation sexuelle. Mais moi, je savais. J’en étais conscient et je souffrais de me sentir anormal, peu viril, dénaturé et paumé. À cause de ça, mes relations avec les autres garçons étaient… inexistantes.

Vous pouvez imager à quel point la vie devint effrayante pour moi.

Se sentir différent

Je pensais vraiment que le dieu qui m’avait créé (peu importe lequel) devait être un peu ivre lorsqu’il avait assemblé mes différentes pièces. Je n’ai jamais eu l’impression d’être une femme et je n’ai jamais voulu en être une, mais je ne me n’avais pas non plus l’impression d’être un homme. Je me sentais différent et pour cette raison je me considérais inférieur aux autres hommes. J’étais mal à l’aise en leur présence. Alors oui, j’avais des amis de sexe masculin. Mais ces amitiés n’étaient que des contrefaçons. Ces gars-là ne connaissaient pas celui que j’étais réellement au-dedans de moi. Ils ne connaissaient que le faux Matt — le Matt qui jouait au football, faisait la fête et sortait avec des filles juste pour être perçu comme un gars normal. Le vrai Matt Moore, celui que je ne leur ai jamais montré, était constamment en proie à la peur et à l’anxiété, parce qu’il ne pensait pas être à la hauteur de leur virilité. Je me sentais inférieur à ce que j’étais censé être. Incomplet. Dénaturé. Autre.

Faisons maintenant un bond dans le temps et sautons des années dramatiquement gâchées. Six ans plus tard, je suis devenu chrétien et j’ai intégré une nouvelle communauté : l’église. Même si le besoin le plus profond de mon âme (à savoir, être réconcilié avec Dieu) avait été satisfait par l’union à Jésus, dans la sphère relationnelle de ma vie j’étais toujours comme étranglé par des sentiments d’infériorité et d’insécurité. Je me sentais encore inadapté en tant qu’homme et douloureusement mal à l’aise en présence d’autres gars.

Donc même à l’église, là où j’aurais pourtant dû me sentir le plus à l’aise, je me sentais un peu comme un étranger. Au cours des deux premières années de ma nouvelle vie en Jésus, j’ai pu constater comment la fraternité chrétienne était admirablement mise en œuvre dans les différentes églises que j’ai visitées. Mais malgré cela, je pensais toujours n’être « pas assez homme » pour m’y intégrer et je n’étais pas assez fort pour supporter d’être rejeté — je croyais en effet que c’est ce qui m’arriverait si j’essayais. Alors je faisais le minimum pour ma vie à l’église : j’assistais aux offices, mais je m’échappais rapidement pour qu’aucun homme ne puisse me repérer et m’inviter à discuter.

Mais un dimanche matin, ce qui devait arriver arriva…

Démasqué

Ce dimanche-là, je m’apprêtais à sortir en douce du bâtiment une fois le culte terminé, quand un type se mit littéralement à crier mon nom. Je me suis retourné et, lentement, me suis avancé vers cet homme qui criait sans complexe et qui avait réussi à mettre un terme à mon évasion. Je l’ai reconnu immédiatement : c’était Kyle. Kyle était un des responsables de l’église. Quelques semaines plus tôt, il m’avait envoyé un message sur Facebook. Il était tombé sur l’un des articles de mon blog. Il avait vu ma photo et m’avait reconnu dans l’église.

Il a tendu sa main pour serrer la mienne et s’est présenté à nouveau. Après avoir bavardé quelques minutes, il m’a libéré. Il devait avoir compris que cette situation était terriblement inconfortable pour moi. J’ignorais alors que cette situation embarrassante allait être le début d’une incroyable amitié, une amitié qui transformerait définitivement ma vie.

Après cela, je retrouvais Kyle pour un petit déjeuner une fois par semaine. La plupart des gars que je connaissais se retrouvaient seulement pour prendre part à des activités comme jouer au football, construire quelque chose, tirer sur quelque chose ou faire des choses pour lesquelles je n’avais aucune compétence. Avec Kyle, c’était la première fois que je rencontrais régulièrement un autre homme, juste pour discuter. Je pensais qu’il allait falloir se forcer à parler, mais en fait pas du tout. Nos conversations étaient naturelles, honnêtes et agréables. Kyle n’a jamais cherché à esquiver ni mon complexe passé d’homosexuel, ni mes luttes incessantes avec les tendances qui y sont liées. Il me parlait de mes luttes, sans être mal à l’aise, sans les dépeindre d’une manière plus étrange ou plus grave que ses propres luttes. Kyle s’adressait à moi de manière à me faire comprendre que ni ma personnalité ni mes luttes contre le péché ne m’invalidaient en tant qu’homme. Il me traitait d’égal à égal en Christ et d’égal à égal en tant qu’homme.

Faire tomber les barrières

Le jour où j’ai découvert que Kyle allait déménager en Nouvelle-Orléans pour implanter une église, j’ai prié et j’ai décidé de me joindre à lui et son équipe. Quelques mois plus tard, nous étions huit à nous installer dans cette nouvelle ville et à former notre propre communauté d’église, toute riquiqui. Je me sentais vraiment à l’aise et confiant dans ma relation avec Kyle, mais malgré ça je suis resté à l’écart des deux autres hommes de notre toute petite église. Heureusement pour moi, ils ne comptaient pas me laisser en retrait ; ils étaient comme Kyle. Les deux hommes s’évertuaient inlassablement à renforcer notre amitié et à me faire comprendre que j’étais à ma place.

Lorsque je dis « me faire comprendre », je ne veux pas dire qu’ils ont essayé de me faire devenir comme eux. Ils n’ont pas cherché à me relooker, ils ne m’ont pas non plus obligé à aller voir des matchs de football, ni à prendre part à d’autres activités typiquement masculines que je n’aimais pas. Ils se sont juste assis avec moi et m’ont parlé. Ils m’ont invité à manger, à prendre des cafés, ont lancé consciemment des discussions sur des sujets qui m’intéressaient. Ils m’ont posé des questions sur ma vie, sur ma famille. Eux aussi m’ont parlé de leur vie, de leur famille. Puisqu’ils me faisaient part de leurs difficultés, je compris qu’ils ne considéraient mon attirance pour le même sexe comme pire ou plus grave que leur propre sentiment de misère spirituelle. Ces deux gars avaient décidé d’entamer un travail de longue haleine pour faire tomber les barrières derrière lesquelles je me cachais et apprendre à me connaitre.

Au fur et à mesure que je passais du temps avec ces hommes, je commençais à voir que nous n’étions pas si différents. Bien sûr, ils aimaient le football et pas moi. Mais mise à part la différence entre nos intérêts et nos passe-temps (j’avais enfin commencé à croire que ceux-ci ne pouvaient en aucun cas rendre un homme viril), nous étions des personnes semblables qui aimaient Jésus et pour qui une amitié sincère avait de la valeur. Plus j’observais leur vie, plus ce que signifiait autrefois pour moi « être un homme » a commencé à s’effondrer. Un homme pouvait être doux et compatissant. Un homme pouvait être prévenant et sensible. Un homme pouvait être meilleur en conversation qu’en sport. Un homme pouvait parler des femmes avec respect et intégrité. Un homme pouvait lutter contre diverses faiblesses. Si ces hommes, même avec leurs pires défauts, représentaient scrupuleusement la masculinité, alors moi aussi j’étais un homme tout ce qu’il y avait plus de normal.

La vraie virilité

C’est alors que Dieu a planté dans mon cœur les graines d’une confiance saine en ma propre virilité. J’ai commencé à découvrir les traits masculins que Dieu m’avait donnés : j’avais de la compassion pour les personnes marginalisées, le désir de protéger et de prendre soin des plus faibles, et la force de suivre et d’obéir à Christ. Alors oui, ma sexualité est détraquée. Mais au bout du compte, j’ai commencé à comprendre que ma misère ne m’invalidait pas en tant qu’homme. Chaque jour, je la soumets à la volonté et à la puissance de Dieu. Je pourrais être un homme hétéro et quand même échouer lamentablement dans mon rôle d’homme si je ne soumettais pas mon hétérosexualité à la volonté de Dieu. Il est bien plus masculin d’être principalement attiré par des hommes et d’obéir à Dieu, que d’être principalement attiré par les femmes mais de désobéir à Dieu. Un mec célibataire attiré par les hommes est bien plus « homme » qu’un mec qui court après les femmes et succombe à ses pulsions sexuelles. Les vrais hommes obéissent à Dieu.

En grandissant et me voyant ni plus ni moins que comme un homme racheté qui lutte contre sa chair, j’ai sans doute opéré la transformation la plus libératrice en tant que chrétien. Cette transformation m’a libéré de l’angoisse, de mes sentiments d’infériorité et de la vie dans les ténèbres de l’isolement. Elle m’a rendu libre de prendre part à l’amitié et à la fraternité d’une église locale (et une communauté d’hommes) qui aime Jésus. Si les deux gars de mon église en Nouvelle-Orléans ne m’avaient pas entouré d’une amitié véritable, je n’aurais jamais vécu tout cela.

Je suis tellement reconnaissant envers Dieu, parce qu’il a mis sur mon chemin des hommes qui n’ont pas essayé me relooker. Au lieu de ça, ils sont venus me chercher tel que j’étais et ont manifesté envers moi de l’amour quand je ne le désirais même pas. Ils m’ont permis d’apprendre ce qu’est un homme, un vrai. Ils ne sauront jamais à quel point ils ont enrichi ma vie.

Traduit de www.thegospelcoalition.org/article/how-i-discovered-true-masculinity/ par Mikaël S.O.

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